S'abonner à un flux RSS
 

Le Rhône en 100 questions : 8-04 Les aménagements du Rhône perturbent-ils les nappes ?

De Wikhydro
Version du 23 novembre 2012 à 15:41 par Admin60 (discuter | contributions)

(diff) ← Version précédente | Voir la version courante (diff) | Version suivante → (diff)
le rhone en 100 questions multi579
Cette page fait partie du deuxième chapitre: "Le fonctionnement du fleuve", de l'ouvrage '"Le Rhône en 100 questions'", une initiative de la ZABR avec l'appui de toute l'équipe du Graie et soutenue par les instances qui ont en charge la gestion du fleuve.











Les aménagements du fleuve ont eu des conséquences importantes sur les équilibres qui prévalaient à l’origine. Ces effets étaient à la fois quantitatifs et qualitatifs sur les nappes en relation avec le fleuve, avec des effets induits sur les milieux naturels (en particulier sur la végétation et le fonctionnement biologique de la zone hyporhéique située sous le lit du fleuve dans le premier mètre de sédiments).


Dans les secteurs du Rhône qui ont fait l’objet d’études piézométriques détaillées, l’abaissement du niveau de la nappe est le suivant :

  •  tronçon court-circuité de Chautagne : 1 à 1,5 m à Serrières ; 5 à 6 m à l’aval du barrage de Motz ;
  •  Belley : 0,2 à 0,3 m dans le Vieux-Rhône, 0,5 m au marais de Lavours ;
  •  Brégnier-Cordon : 1,5 m dans le Vieux-Rhône au droit de Champagneux ;
  •  tronçon court-circuité de Pierre-Bénite : 1,5 m à 3,9 m en rive droite, 1,5 m à 2,3 m en rive gauche ;
  •  tronçon court-circuité de Péagede-Roussillon : 1,5 m s’ajoutant à un premier abaissement de 1,5 m consécutif à l’aménagement Girardon ;
  • tassement des terrains qui tendent à s’affaisser avec parfois des impacts sur le bâti (fissures).
    Les riverains ont observé le phénomène sur plusieurs bâtiments en Chautagne (Serrières).

Cet effet de tassement s’est aussi fait sentir sur certaines voies de communication comme le CD 57 entre Vions et Chindrieux, en Chautagne.

Sommaire

Modification des niveaux de la nappe


amenagement hydraulique de la vallee du rhone
La nappe alluviale de la vallée du Rhône est directement influencée par le fleuve qui règle son niveau dans les plaines alluviales, et qui peut tout à la fois constituer l’exutoire ou contribuer à alimenter la nappe suivant les secteurs et l’état hydrologique.
La réalisation de la série de retenues par la Compagnie Nationale du Rhône (CNR) a eu des répercussions sur le niveau de la nappe:
  •  le toit de la nappe est surélevé au niveau des retenues et des canaux d’amenée en amont des barrages et des usines hydroélectriques ;
  •  il est abaissé en aval de ces ouvrages au niveau des canaux de fuite et des tronçons court-circuités. La CNR a pris des dispositions pour limiter ce phénomène.

Pour prévenir les exhaussements de nappe, des contre-canaux de drainage (plus de 200 km sur le Bas Rhône) ont été réalisés en bordure des endiguements. Ils se jettent dans le fleuve en aval des ouvrages de retenues. L’objectif essentiel est d’éviter l’inondation des caves ou les remontées capillaires dans les constructions. Des dispositions ont aussi été prises pour assurer la pérennité de l’assainissement dans les zones affectées avec mise en place de grands collecteurs débouchant sur des stations de pompage. Il a en revanche été plus difficile de prévenir les abaissements de nappe.
La CNR n’y est parvenue que localement par la mise en place de seuils dans certains tronçons court-circuités. À Donzère par exemple, il a fallu réaliser sur 13 km, le long du canal de fuite un dispositif coûteux de réalimentation de la nappe par réinjection d’eau dans le sol.

Le canal de fuite ayant abaissé la nappe d’une dizaine de mètres, un canal de réalimentation a été installé dans la plaine.

Des forages permettent d’injecter son eau dans les alluvions et de relever la nappe de 5 à 6 m.


Impact des contre-canaux de drainage


baix le logis neuf
Les contre-canaux de drainage contribuent à diminuer l’importance du battement de la nappe, le niveau piézométrique variant moins qu’auparavant au cours de l’année en de nombreux secteurs.
Ce phénomène peut contribuer à favoriser le colmatage progressif du fond du lit du Rhône, et par conséquent réduire les échanges entre le fleuve et sa nappe. À titre d’exemple, la nappe dans le secteur de Péage-de-Roussillon variait avant aménagement d’environ 5 à 6 m au cours de l’année en fonction des variations de ligne d’eau du fleuve. Cette variation serait limitée actuellement à 1 ou 2 m. En Chautagne, l’amplitude de variations du niveau de la nappe s’est considérablement amortie depuis la mise en service du barrage. D’une amplitude maximale égale à 3 m, la nappe est passée à une amplitude de moins de 1 m.
L’exhaussement des niveaux des nappes a conduit en certains secteurs à la modification des caractéristiques et de la qualité des eaux, avec apparition de fer et de manganèse. Dans certains cas, le fer et le manganèse ont posé ou posent problème pour l’exploitation des puits de captage d’eau potable en nappe (voir question 08-02 « Les nappes d’accompagnement du fleuve sont elles de bonne qualité?»).


Réduction de la recharge des nappes par les eaux du Rhône


L’aménagement concourt à limiter la recharge de la nappe par l’eau superficielle par :

  •  une diminution importante des zones d’expansions de crues ;
  •  le colmatage du fond et des berges du fleuve liés au ralentissement général du courant et à la stabilisation des nappes par les contre-canaux.

Cependant, il n’est guère possible d’établir le bilan de ces processus d’autant qu’ils se superposent aux modifications locales de niveau au sein de chaque aménagement.


Impact sur l’alimentation en eau


marais de lavours une zone humide a preserver
La nappe alluviale du Rhône est un réservoir d’eau potable pour de nombreuses agglomérations de la vallée (Lyon, Valence, Montélimar, Beaucaire, etc.), et même plus lointaines comme Nîmes.


La nappe est aussi très sollicitée par les grandes industries de la vallée en particulier par les industries chimiques et par l’agriculture.


En dehors de quelques réaménagements (approfondissement ou déplacement de captages en nappe) rendus nécessaires en raison du dénoyage de puits d’exploitation antérieurs aux aménagements, le principal impact des aménagements du Rhône s’est fait ressentir dans des secteurs où le niveau d’eau de la nappe avait été relevé.




Conséquences sur les milieux naturels


evolution de la nappe alluviale du rhone au niveau de l ile de la platiere
La nappe souterraine joue un important rôle de connexion entre les différentes parties de l’écosystème fluvial, en particulier entre le fleuve et ses annexes (bras morts, marais, etc.). Les effets diffèrent selon que l’on a un abaissement ou un relèvement de la nappe.
  • L’abaissement des niveaux de nappe constaté en différents secteurs s’est répercuté sur la plaine alluviale du Rhône avec des conséquences diverses : 

   - assèchement de zones humides (marais, prairies, etc.) ;

   - diminution du niveau des lônes qui se transforment en systèmes clos dont l’eau n’est plus renouvelée et qui se comblent progressivement et rapidement ;

   - modification de la végétation de la plaine alluviale, avec évolution de la forêt de bois tendre vers la forêt de bois dur.

De fortes perturbations ont été enregistrées ou s’enregistrent encore en particulier dans les secteurs :

   - de Chautagne et Lavours : perte du caractère humide des marais, réduction de densité de nombreuses espèces inféodées aux milieux humides, progression des espèces de bois dur, apparition de nouvelles associations végétales, progression d’espèces opportunistes ;

   - du Rhône court-circuité par l’ouvrage de Pierre-Bénite qui a fait depuis l’objet d’un programme de restauration, avec relèvement du débit réservé de 10 à 100 m3/s, remise en eaux de certaines lônes et
exhaussement du niveau de la nappe qui reste malgré tout faible ;

  - de Péage-de-Roussillon : à l’abaissement du toit de la nappe dû à l’ouvrage hydroélectrique s’ajoute le rabattement dû à des pompages importants par les industries chimiques.

  • Le relèvement de la nappe, moins fréquent, provoque un rajeunissement des milieux et des modifications de la végétation. La remontée de la ligne d’eau a parfois été bénéfique pour la remise en eau de certaines lônes (par exemple la lône des Pécheurs à l’amont du barrage de Jons en amont de Lyon).
    Ces remontées peuvent toutefois être à l’origine d’une asphyxie de la végétation avec mortalité des saules, peupliers et aulnes glutineux ainsi que des vergers comme en amont de la retenue du barrage de Péage-de-Roussillon.


Ce qu’il faut retenir


Les aménagements du Rhône réalisés entre les années 1970 et 1980 ont eu des conséquences importantes sur les nappes
liées au Rhône malgré les aménagements annexes consentis pour en limiter les effets (contre-canaux en particulier).
Les abaissements ou relèvements des niveaux de nappe et la perturbation des échanges entre nappe, Rhône et annexes fluviales, a conduit à une modification des équilibres qui prévalaient à l’origine.

La conséquence la plus visible est l’assèchement d’un certain nombre de milieux humides exceptionnels dépendant de la nappe. Il faut aussi noter certaines perturbations enregistrées pour l’usage en eau potable de la nappe avec une modification dans les caractéristiques des eaux et l’apparition de concentrations importantes en fer et manganèse.
Aujourd’hui on tend vers un nouvel équilibre avec des efforts en faveur de la restauration des milieux humides dégradés mais sans pouvoir escompter un retour même approximatif à la situation qui prévalait à l’origine.



question précédente |retour au sommaire | question suivante

Outils personnels