Wikigeotech:Évaluer la difficulté d'extraction des déblais rocheux : Différence entre versions
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== MÉTHODE DE SCOBLE ET MUFTUOGLU (1983) == | == MÉTHODE DE SCOBLE ET MUFTUOGLU (1983) == |
Version du 23 novembre 2015 à 17:49
Introduction
Le terrassement des déblais rocheux ne s'improvise pas et impose d'étudier spécifiquement la difficulté d'extraction des matériaux. On peut parler de l'excavabilité des massifs. Ceci nécessite une étude à part entière qui ne porte ni sur le réemploi ni sur la stabilité des talus ni sur le dimensionnement des arases. Il s'agit bien d'une étude spécifique qu'il s'agit de mener en appliquant les outils précisés dans cet article. L'approche est complexe et il existe une multitude de méthodes dont les principales en vigueur sont décrites ci-dessous. L'intérêt de ces études est de permettre le dimensionnement des ateliers d'extraction que l'entreprise de terrassement pourra mettre en œuvre. La difficulté d'extraction permet souvent de proposer des modes de rémunération différents[1] prenant en compte la gradation de la difficulté. Ainsi, il est souvent fait mention de deux catégories de matériaux : les déblais de catégorie 1 et les déblais de catégorie 2. Dans la réalité, les matériaux ne se classent pas automatiquement dans une ou l'autre des catégories, et le simple fait de parler de déblais rocheux ne suffit pas pour envisager une rémunération de type déblai de catégorie 2. Il est également possible de rémunérer l'exécution d'un déblai toutes sujétions comprises en laissant à l'entreprise le soin d'évaluer la difficulté du terrassement sur la base des données géotechniques fournies en général dans le dossier d'appel d'offre.
Ne pas envisager d'étude spécifique pour ce sujet entraîne une prise de risque géotechnique non négligeable pouvant se solder par des réclamations d'entreprises justifiées par le manque d'informations géotechniques fournies dans le dossier d'appel d'offre.
On trouveras ci dessous une bibliographie des méthodes d'évaluation des difficultés d'extraction; présentée dans un ordre chronologique. La diversité apparente des approches est en grande partie liée aux spécificités des études initiales (tunnels, mines de charbon à ciel ouvert , etc..) qui en limite l'extrapolation aux problémes de terrassements rocheux des infrastructures. Toutefois deux types de paramètres restent dominants : ceux liés à la résistance et dureté de la roche, et ceux liés à la fracturation; dans des proportions variables.
MÉTHODE D’ATKINSON (1977)
Il est proposé des zones d’application pour chaque type de machine en fonction exclusivement de la résistance à la compression simple des roches.
Il faut préciser que les caractéristiques des machines ont fortement évolués depuis l'établissement de ce tableau.
MÉTHODE DE FRANKLIN( 1971)
Il a proposé de classer les massifs rocheux en fonction de 2 paramètres :
- Is : indice de résistance sous charge ponctuelle (essai Franklin).
- If : indice d’espacement entre les fractures.
Ceci donne lieu à une classification du type graphique pour l’étude des méthodes d’excavation (de manière générale, on ne spécifie pas le type de machine), ainsi que des relations entre Is et If et d’autres paramètres géomécaniques.
- If = 3/Jv
- Jv = 1/S1+1/S2+1/S3
(avec Si l'espacement des joints de la famille i)
Il convient de préciser que les caractéristiques des machines ont fortement évolués depuis l'élaboration de ce tableau.
On peut également établir un lien entre la résistance en compression et l'indice Is tel que
Rc = a × Is (a pouvant varier entre 19,5 et 23 selon la nature du matériaux)
MÉTHODE DE WEAVER (1975)
Cet auteur a déterminé le degré de rippabilité d’un massif rocheux grâce à la valorisation de 7 facteurs, dont les plus importants sont :
- L’espacement entre joints
- Vitesse sismique
- Orientation / direction des discontinuités
- Dureté
Ceci donne lieu à une table où sont proposés certains types de machines en fonction de ces paramètres :
La matrice intervient pour 1/3 de l’indice (20 à 45 % selon la part de « matrice » affectée a la vitesse sismique).
Les discontinuités comptent pour 2/3 de l’indice
MÉTHODE DE KIRSTEN (1982)
Il propose un système de classification pour l’excavation des massifs rocheux basé sur l’indice suivant (Q system Barton):
$ N = Ms*(RQD/Jn)*Js*(Jr/Ja) $ ,
avec :
- Ms : Mass Strength Number (= Rc *densité/27 en KN/m3)
- RQD : Rock Quality Designation (%)
- Jn, Jr : paramètres du système de Barton
- Js : valeur de la disposition relative des blocs inclinés selon la direction d’abattage (matériau intact : Js = 1)
- Ja : facteur d’altération du joint
Selon l’indice N, on évalue ainsi la facilité d’abattage par rippage :
- facile : N = 1 à 10
- difficile : N = 10 à 100
- très difficile : N = 100 à 1.000
- extrêmement difficile : N = 1.000 à 10.000
- explosifs : N >10.000
MÉTHODE D’ABDULLATIF ET CRUDEN (1983)
Ces auteurs ont exploité des données provenant de 23 chantiers. L'exploitation de ces données a permis d'établir le graphique ci-dessous, exprimant QIndice de Barton - Q en fonction de l'indice RMR ou Rock Mass Rating. Ils interprètent les résultats en estimant ainsi que l’excavation est possible par des moyens classiques jusqu’à un RMR de 30 et rippable jusqu’à 60. Les massifs considérés comme de "meilleure qualité" doivent faire l’objet de perforations avec usage d’explosifs.
MÉTHODE DE SCOBLE ET MUFTUOGLU (1983)
Ceux-ci ont défini un indice d’excavabilité IE, en combinant 4 paramètres géomécaniques :
- Résistance à la compression simple
- Extension de l’altération
- Espacement des joints
- Espacement des plans de stratifications
On a ainsi :
IE = W + S + J + B ,
PARAMETRES CLASSES DE MASSIFS ROCHEUX 1 2 3 4 5 ALTERATION intense élevée moyenne légère nulle NOTE (W) <0 5 15 20 25 RESISTANCE COMPRESSION SIMPLE (Mpa) < 20 20 - 40 40 - 60 60 - 100 > 100 RESISTANCE entre pointes (Mpa) Is(50) < 0,5 0,5 - 1,5 1,5 - 2 2 - 3,5 > 3,5 NOTE (S) 0 10 15 20 25 SEPARATION DIACLASES (m) 0,3 0,6 - 1,5 0,6 - 1,5 1,5 - 2 > 2 NOTE (J) 5 15 30 45 50 TAILLE STRATES (m) < 0,1 0,1 - 0,3 0,3 - 0,6 0,6 - 1,5 > 1,5 NOTE (B) 0 5 10 20 30 En fonction de l’indice IE, ils proposent la classification suivante : CLASSE EXCAVATION IE 1 très facile < 40 2 facile 40 - 50 3 moyennement difficile 50 - 60 4 difficile 60 - 70 5 très difficile 70 - 95 6 extrêmement difficile 95 - 100 7 marginale sans explosions > 100 La matrice (altération / résistance) compte pour 38% Les discontinuités comptent pour 62%
MÉTHODE DE HADJIGEORGIOU ET SCOBLE
Ce système de classification empirique pour évaluer la facilité d’excavation des massifs rocheux combine les 4 paramètres suivants :
- Résistance sous charge ponctuelle
- Taille des blocs
- Altération
- Disposition structurelle relative
Ainsi l’indice d’excavabilité devient ici : IE = (Is + Bs)*W*Js
Classe I II III IV V Point load index < 0,5 0,5 – 1,5 1,5 – 2,0 2,0 – 3,5 > 3,5 Note (Is) 0 10 15 20 25 Taille blocsVolumetric joint countJv (J/m3) Très petits> 30 Petits30– 10 Moyens10 – 3 Grands3 – 1 Très grands1 Note (Bs) 5 15 30 45 50 Altération Complete forte modérée faible sain Note (W) 0,6 0,7 0,8 0,9 1,0 Orientation des joints Très favorable favorable légèrement défavorable défavorable très défavorable Note (Js) 0,5 0,7 1,0 1,3 1,5 IE = (Is + Bs)*W*Js <20 20-30 30-45 45-55 >55 FACILITE D’EXCAVATION très facile facile difficile très difficile explosifs
La matrice intervient pour environ 1/3 de l’indice La fracturation intervient pour environ 2/3 de l’indice
MÉTHODE DE SINGH (1987)
Avec l’aide de ses collaborateurs, il a défini un nouvel indice de rippabilité IR, afin d’évaluer la facilité avec laquelle a lieu l’abattage mécanique. Les paramètres pris en considération sont les suivants :
- L’espacement entre discontinuités
- Résistance à la traction
- Degré d’altération
- Degré d’abrasivité
Ainsi, ils ont proposé la classification suivante des massifs rocheux en fonction de leur rippabilité :
PARAMETRES CLASSES DE MASSIFS ROCHEUX
1 2 3 4 5 RESISTANCE A LA TRACTION (MPa) <2 2-6 6-10 10-15 >15 NOTES 0-4 4-8 8-12 12-16 16-20 DEGRE D’ALTERATION complet élevé moyen léger nul NOTES 0-4 4-8 8-12 12-16 16-20 DEGRE D’ABRASIVITE Très faible faible moyen élevé extrême NOTES 0-4 4-8 8-12 12-16 16-20 ESPACEMENT ENTRE DISCONTINUITES (m) <0,06 0,06-0,3 0,3-1 1-2 >2 NOTES 0-10 10-20 20-30 30-40 40-50 NOTES TOTALES <22 22-44 44-66 66-88 >88 RIPPABILITE facile moyenne difficile marginale explosifs TRACTEUR RECOMMANDE léger moyen lourd très lourd très lourd PUISSANCE (kW) <150 150-250 250-350 >350 - POIDS (t) <25 25-35 35-55 >55 -
La matrice (altération / résistance) compte pour 55% Les discontinuités comptent pour 45%
MÉTHODE DE PETTIFER ET FOOKE (1994)
Ils adaptent la méthode de Franklin sur la base de nombreux chantiers (> 100 cas).
Les paramètres d’espacement de discontinuité sont à ajuster (entre + 20 et +40%) selon l’orientation de celles ci par rapport au travail de l’engin.
If = 3/Jv
Jv = 1/S1+1/S2+1/S3 (Si espacement des joints de la famille “i”)
MÉTHODE DE KAUSHIK (2008)
Cette méthode multiparamètre intègre :
- la résistance,
- la fracturation
- l’abrasivité
- la direction de travail vis à vis de la structure
- la puissance de la machine (originalité)
Classe I II III IV V Résistance entre pointes (Is50) < 0,5 0,5 – 1,5 1,5 – 2,0 2,0 – 3,5 > 3,5 Note (Is) 5 10 15 20 25 Volumetric joint count (no/m3) > 30 30– 10 10 – 3 3 – 1 1 Note (Jv) 5 10 15 20 25 Abrasivité (CERCHAR) < 0,5 0,5 – 1,0 1,0 – 2,0 2,0 – 3,0 > 3,0 Note (Aw) 3 6 9 12 15 Direction de travail vis à vis direction de fracturation principale 72° - 90° 54° - 72° 36° - 54° 18° - 36° 0° - 18° Note (Js) 3 6 9 12 15 Machine power (kW) > 1000 800 – 1000 600 – 800 400 – 600 < 400 Note (M) 4 8 12 16 20
Cuttability Index CI= Is + Jv + Aw + Js + M
Cuttability index Possibility of ripping 50 > CI Very easy excavation 50 < CI < 60 Easy excavation 60 < CI < 70 Economic excavation 70 < CI < 80 Difficult excavation, may be not economic CI > 80 Surface miner should not be deployed
Jv = 1/S1+1/S2+1/S3 (Si espacement des joints de la famille “i”)
Remarque Une estimation de Jv (Q system) peut être RQD=115-3,3 Jv On peut estimer Rc=21*Is (RC= 19,5 à 23*Is selon la nature du matériau)
On notera également que le découpage angulaire montre 2 classes de 36° (perpendiculairement et parallèlement à la facturation principale ); les autres classes étant ouvertes de 18° seulement.
MÉTHODE DE KIRMANLI (2009)
Adaptation des méthodes de Rzhevsky, Muftuoglu and Pasamehmetoglu
Paramètre / Classe 1 2 3 4 5 Resistance en compression (MPa) <20 20–40 40–60 60–100 >100 Note R 0 10 15 20 25 Altération Décomposé Fortement altéré Moyennement altéré Légèrement altéré sain Note A 0 5 10 15 20 Vitesse sismique, (m/s) <1750 1750–2000 2000–2500 2500–3200 >3200 Note V 5 12 20 28 30 Espacement moyen des discontinuities (m) <0.1 0.1–0.5 0.5–1 1–1.5 >1.5 Note D 5 10 15 20 25 Espacement des bancs (m) <0.1 0.1–0.3 0.3–0.6 0.6–1.5 >1.5 Note E 0 5 10 20 30 DI = R+A+V+D+E <20 20–40 40–70 70–100 >100 Digging class Easy Medium Medium-hard Hard Very hard Excavabilité à la pelle hydraulique facile facile minage minage minage
Cette classification ne fait pas apparaître le rippage !
La matrice intervient pour environ 35 à 58% dans l’indice. La fracturation intervient pour 42 à 65 % environ dans l’indice
MÉTHODE TSIMBAOS ET SAROGLOU (2010)
Méthode développée en Grèce basée sur la description :
- de l’organisation des discontinuités (nombre de famille)
- de l’état de surface des discontinuités (altération des joints)
- la résistance
Cette méthode semble très “séduisante” dans son approche mais elle ne prend pas en compte l’espacement des discontinuités ; seulement la structure (nombre de familles) et l’état de surface des discontinuités.
2 chartes sont définies selon la résistance (Is ³ 3 Mpa soit Rc ³ 70 Mpa)
Proposed GSI chart for excavatability of rock masses (Is50 < 3 MPa)
Proposed GSI chart for excavatability of rock masses (Is50 ³ 3 MPa)
MÉTHODE CATERPILLAR
Le fabricant de machine propose des tables adaptées à chaque engin en fonction de la nature des matériaux et de la seule vitesse sismique. Caterpillar attire l’attention des utilisateurs sur les limites de la prise en compte de la seule vitesse sismique.
Cette méthode est majoritairement utilisée en France par les entreprises malgré les limites clairement annoncées.
PRATIQUE DES LRPC
La pratique des LRPC est toujours largement appuyée sur l’expérience locale. Elle est basée sur :
- l'application des tables Caterpillar tempérée par l’expérience locale
- l’intégration d’une analyse de la fracturation par le RQD
- la mise en pratique de méthodes associant la fracturation (RQD, ID), l’étude de l'altération de la matrice et une description de la typologie de la frange altérée,
- l'interprétation de méthodes combinant : la sismique réfraction, la diagraphie microsismique, les paramètres de forage et les essais sur échantillons (Rc et Vp).
Pour cette dernière catégorie l’usage des indices AFTES IC et ICm, ainsi que des corrélations entre microsismique et fracturation sont souvent combinées.
Une limite de rippabilité souvent prise en compte est liée un espacement de discontinuité de l’ordre de 30 cm. D’où l’utilisation que l’on peut rencontrer d’un indice RQD300 (seuil de prise en compte à 30 cm au lieu des 10 cm standard).
Références
- ↑ CFTR (2002). Terrassement à l’explosif dans les travaux routiers. Guide technique. Ed. Setra. 127 pages.