Wikibardig:Digues : Etude de Dangers : Différence entre versions
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Version du 14 mai 2020 à 14:15
Les systèmes d’endiguement font l’objet d’une réglementation spécifique en raison des risques qu’ils génèrent, notamment pour la sécurité des riverains, de leurs effets potentiellement indésirables sur l’environnement et de la nécessaire justification de la protection qu’ils doivent apporter contre les inondations.
L’étude de dangers est à réaliser par un bureau d’étude agréé (article R214-116-I du code de l’environnement).
L’EdD de système d’endiguement et la réglementation de 2015
Deux textes réglementaires encadrent l’étude de dangers des systèmes d’endiguement classés au titre du décret de mai 2015 :
- Le décret du 12 mai 2015
Relatif aux règles applicables aux ouvrages construits ou aménagés en vue de prévenir les inondations et aux règles de sûreté des ouvrages hydrauliques, il classe les systèmes d’endiguement en trois catégories en fonction du nombre d’individus qu’ils protègent (C, B et A pour les plus importantes). Pour chacune de ces catégories, le décret définit les obligations des responsables d’ouvrages. L’étude de dangers est l’une de ces obligations. Elle doit être réalisée pour les systèmes appartenant à chacune de ces trois classes.
- L’arrêté du 7 avril 2017
Il précise le plan de l’étude de dangers des digues organisées en systèmes d’endiguement et des autres ouvrages conçus ou aménagés en vue de prévenir les inondations et les submersions.
D’après l’arrêté du 7 avril 2017, l'étude de dangers d'un système d'endiguement comporte trois parties :
- Un résumé non technique, dont la fonction est de présenter simplement les conclusions de l’étude de dangers en termes de niveau de protection, de délimitation du territoire protégé et de scénarios de risques de venues d'eau en fonctionnement normal et lorsque se produit un événement (crue, tempête) provoquant une montée des eaux excédant le niveau de protection ;
- Un document A « Présentation générale du système d’endiguement, associé le cas échéant à un ou plusieurs aménagements hydrauliques, contre les inondations et les submersions », dont la fonction est de présenter, en synthèse des éléments techniques détaillés et des justifications techniques fournies dans le document B, le niveau de protection, la zone protégée et le système d’endiguement qui lui est associé, l’organisation mise en œuvre par le gestionnaire du système d’endiguement pour surveiller, entretenir le système d’endiguement et le surveiller lors des épisodes de crue ou de tempête et informer les autorités chargées de l’organisation des secours en cas de risque de dépassement des performances du système d’endiguement ;
- Un document B « Analyse des risques et justification des performances », qui détaille les analyses techniques et scientifiques qui permettent d’établir et de justifier les performances du système d’endiguement. Le document B est en pratique l'analyse de risque du système de protection.
Le plan réglementaire du document A est le suivant :
- 1 - renseignements administratifs
- 2 - objet de l’étude
- 3 - description précise de la zone protégée, du système d’endiguement bénéficiant le cas échéant d’un ou plusieurs aménagements hydrauliques, de son environnement et de ses fonctions de protection contre les inondations et les submersions ;
- 3.1 - zone protégée,
- 3.2 - description des conditions naturelles pouvant conduire à des crues ou des tempêtes et des conditions de fondation des ouvrages et des sollicitations s’exerçant sur ces fondations,
- 3.3 - descriptions des éléments composant le système de protection et leurs fonctions hydrauliques,
- 3.4 - analyse du fonctionnement du système d’endiguement - analyse des risques de rupture - niveau de protection - analyse de l’organisation du gestionnaire et gestion en situation de crue ou de tempête,
Le plan réglementaire du document B est le suivant :
- 4 - caractérisation des aléas naturels
- 5 - description du système d’endiguement
- 5.1 - ouvrages existants,
- 5.2 - ouvrages à construire ou à modifier,
- 5.3 - description fonctionnelle du système d’endiguement,
- 6 - retour d’expérience concernant la zone protégée et le système d’endiguement
- 7 - diagnostic approfondi des éléments constitutifs du système d’endiguement et tenue des ouvrages
- 8 - étude des risques de venues d’eau dans et en dehors de la zone protégée
- 9 - présentation et analyse de l’organisation mise en place par le gestionnaire pour l’exercice de ses missions - adéquation des moyens mis en place pour la surveillance et l’entretien courant avec l’objectif de protection garanti
- 9 bis - recommandations de l’organisme agréé qui réalise l’étude de dangers
- 10 - cartographie
Remarque : le décret du 12 mai 2015 précise dans son article 3 section 2, que « les règles fixées par la présente section sont applicables à la mise en conformité des ouvrages construits ou aménagés en vue de prévenir les inondations ainsi qu’à la réalisation de tels ouvrages, à l’exception des ouvrages de correction torrentielle ». Si en effet le décret ne s’applique pas aux ouvrages de correction torrentielle (seuils, plages de dépôts, etc.), il s’applique toutefois bien aux systèmes d’endiguement en contexte torrentiel.
La conduite de l’étude de dangers est une démarche d’analyse de risques qui s’appuie sur une identification puis une évaluation des événements susceptibles d’affecter le système d’endiguement et de provoquer l’inondation de la zone protégée.
Cette démarche repose sur :
- Une recherche en accidentologie, s’appuyant sur des événements passés affectant des systèmes d’endiguement de nature similaire, qui permet l’identification des risques, c’est-à-dire la recherche de l’ensemble des facteurs de risque susceptibles d’influencer le risque d’inondation dans les zones protégées ;
- La caractérisation des événements hydrauliques susceptibles de se produire dans le cours d’eau ou la mer et l’estimation de leur probabilité d’occurrence ;
- Le diagnostic approfondi du système d’endiguement permettant la caractérisation des événements de défaillance du système d’endiguement et l’estimation de leur probabilité d’occurrence ;
- L’identification et l’évaluation des contrôles ou barrières de sécurité, liées notamment à l’organisation et à la politique de surveillance et d’entretien du gestionnaire ;
- La caractérisation, en termes de probabilité, d’intensité et de cinétique, des inondations de la zone protégée pouvant résulter de ces défaillances ou du dépassement du niveau de protection sans défaillance (notamment dans le cas d’inondation par un déversoir conçu à cet effet) ;
- L’estimation de la performance du système d’endiguement (niveau de protection et zone protégée) et de la dangerosité des venues d’eau (zones de venues d’eau dangereuses et niveaux de sécurités associés) ;
- En synthèse, la délimitation réglementaire de la zone protégée et la fixation du niveau de protection qui lui correspond, après que le gestionnaire aura choisi, en lien avec les éléments d’analyses fournies par le bureau d’étude agréé, le risque résiduel de rupture du système, lorsque le niveau d’eau atteint ce niveau de protection.
La réglementation définit par ailleurs des scénarios de référence dont l’étude doit être systématiquement incluse dans toute étude de dangers.
L’étude de dangers nécessite la réalisation d’études spécifiques telles que :
- La topographie de l’ensemble constitué par le milieu environnant, le système d’endiguement et la zone inondable ;
- L’hydrologie du bassin versant ou l’étude des niveaux marins ;
- L’hydraulique du cours d’eau ou du domaine maritime ;
- La morphodynamique de l’environnement fluvial, maritime ou torrentiel ;
- La géologie et l'hydrogéologie du site ;
- La structure et la géotechnique des ouvrages et de leur fondation ;
- Les équipements et organes mobiles des ouvrages (vannes, batardeaux, pompes…) ;
- L’état général des ouvrages composant le système d’endiguement ;
- Le bilan des désordres et facteurs aggravants vis-à-vis de la sûreté des ouvrages : végétation ligneuse, canalisations traversantes, galeries d'animaux fouisseurs, détériorations des ouvrages, etc. ;
- L’organisation du gestionnaire (procédures écrites existantes pour la surveillance, l’entretien, procédures effectivement mises en oeuvre, moyens humains et matériels à disposition, formation des agents, relations avec les autorités préfectorales…) ;
- La description de la zone inondable et de ses caractéristiques topographiques, environnementales et urbanistiques majeures.
Les objectifs de l’EdD de digues ou de système d’endiguement
Les principaux objectifs d’une EdD de digues ou de système d’endiguement doivent être les suivants :
- Définir le système de protection (ses limites, ses composants), sa zone protégée et son (ou ses) milieu(x) extérieur(s) eau le fonctionnement de cet ensemble et le (ou les) niveau(x) de protection associé(s) ;
- Identifier et estimer le risque d’inondation pour les enjeux présents dans la zone protégée, en fonction des limites du système de protection considéré et de sa possible défaillance ;
- Évaluer l’acceptabilité du risque d’inondation compte tenu du système de protection, des enjeux protégés et des incertitudes sur le niveau de risque ;
- Identifier les recherches, études et reconnaissances complémentaires à mener pour améliorer la qualité et la résolution des données ou encore la performance des méthodes employées pour réaliser l'étude de dangers ;
- Proposer des mesures de gestion et d’amélioration du système de protection destinées à réduire les risques : prévention de l'érosion interne, de l'érosion externe, fréquence et nature des opérations de surveillance et d'entretien, modification du système ...
NB : les trois derniers points constituent l’une des finalités de la démarche de gestion des risques et donc une justification de la réalisation de l'analyse des risques. Néanmoins, dans l'arrêté du 7 avril 2017 précisant le plan de l'étude de dangers en application du décret de 2015, ils ne sont pas rendus obligatoires. Cependant l’intérêt du gestionnaire est aussi de disposer de propositions de mesures complémentaires de gestion des risques, ne constituant pas un engagement de sa part, et qu’il pourra mettre en œuvre à plus ou moins long terme.
La complexité de réalisation de l’EdD de digues ou de système d’endiguement
Contrairement aux barrages pour lesquels l’application du concept d’EdD est désormais maîtrisée, après une adaptation des principes de la sécurité industrielle, l’application du concept d’EdD aux digues et systèmes de protection contre les inondations est particulièrement délicate en raison de la grande complexité de ces systèmes. Cette complexité se manifeste notamment lors de la définition du périmètre de l’étude et de la mise en œuvre de l’analyse de risque.
Des difficultés pour définir le périmètre de l’étude de dangers, du fait :
- De la nature des différents types d’EdD possibles: EdD constat pour des ouvrages existant, EdD projet ou programme pour la création de nouveaux ouvrages ou la modification d’ouvrages existants ;
- Des limites réelles (hydrauliques) des systèmes endigués qui ne sont pas toujours faciles à appréhender : topographie peu marquée ou complexe à analyser ;
- De l'existence de territoires non compris dans la zone protégée (définie par le gestionnaire) mais pour lesquels le système de protection apporte tout de même une modification de l'aléa d'inondation ;
- De la présence d’ouvrages souvent très anciens et mal connus ;
- D’un historique des ouvrages complexe (travaux, modifications, rehaussements, brèches et réparations, …) et également mal connu ;
- Que les systèmes sont composés d’ouvrages à longs linéaires, souvent ramifiés ou parallèles, et pouvant comporter plusieurs rangs de protection ;
- De systèmes de protection pouvant parfois s’inscrire dans des zones protégées par d’autres systèmes de protection ;
- De la présence d’ouvrages dont la vocation n’est pas forcément la protection contre les inondations : des remblais routier, ferroviaires… ;
- De la présence d’ouvrages de protection directe ou indirecte ;
- De la présence d’éléments naturels (dunes, éperons rocheux, …) pouvant participer à la protection contre les inondations ;
- De propriétaires et gestionnaires d’ouvrages parfois multiples et aux intérêts pouvant diverger : cela peut engendrer des difficultés quant à la prise en compte des systèmes de protection dans leur intégralité dans le cadre de l’étude. La mise en œuvre de la compétence GEMAPI devrait améliorer ce point, mais une grande vigilance sera nécessaire lors de la première définition des systèmes dans ce cadre, compte tenu de limites géographiques de compétence pas nécessairement cohérentes avec les limites physiques des systèmes ;
- De limites d’influence des milieux eau de sollicitation parfois difficiles à définir ;
- …
Des difficultés quant à la mise en œuvre de l’analyse de risque :
- Une imbrication physique (topographique et hydraulique) souvent très complexe entre le système de protection et son environnement : de nombreux paramètres peuvent avoir une influence sur l’intensité des événements hydrauliques (les lignes d’eau au contact des ouvrages), les zones protégées peuvent être le siège d’une grande complexité hydraulique ;
- De nombreuses spécificités hydrauliques et morphodynamiques directement liées à la nature de l’environnement de l’ouvrage : milieu fluvial ; milieu marin (avec/sans marée) ; milieu estuarien ou d’embouchure ; milieu torrentiel ; milieu lacustre ;
- Des caractéristiques structurelles des ouvrages souvent hétérogènes : impliquent un besoin en reconnaissances à forte résolution ou de nombreuses approximations ;
- Des mécanismes élémentaires de détérioration des ouvrages et surtout des scénarios de défaillance et d’inondation pouvant s’avérer difficiles à appréhender ;
- …
L’intérêt des études de dangers de digues ou de systèmes d’endiguement
Les résultats de l’étude de dangers, et donc de l'analyse de risque, présentent un intérêt pour différents types d’acteurs du territoire.
Pour tous les acteurs de la gestion des risques et tous les partis concernés par le risque d’inondation, l’étude de dangers permet de conclure sur la nature et l’importance de ce risque. Le premier intérêt de ce type d’étude est donc la connaissance du risque pour l’ensemble de ces acteurs du territoire (populations, collectivités locales, Etat, entreprises, gestionnaires de digues, gestionnaires de réseaux, …) ; la connaissance du risque est la première étape de la démarche de maîtrise du risque.
L’intérêt pour les gestionnaires de digues
L’EdD est un outil au service du gestionnaire du système de protection (gestionnaires actuels ou gestionnaires "GEMAPI"). En effet, elle permet tout d’abord d’approfondir la connaissance des ouvrages et d’identifier les éventuelles insuffisances en termes de niveau de protection et de niveau de sûreté. Elle donne également une évaluation de la criticité du risque associé aux ouvrages et à leur environnement. Cela facilite grandement l’optimisation de la politique de surveillance, d’entretien, de confortement et de gestion des systèmes de protection et permet de s’orienter vers une meilleure gestion des inondations qui résultent d’insuffisances ou de défaillances du niveau de protection. En effet, l'aide à la décision est alors menée en pleine conscience des conséquences potentielles pour les enjeux et avec la possibilité d’évaluer les réductions du risque pouvant découler de l’application des mesures envisagées.
Au-delà de ses résultats, l’EdD est également, pour le gestionnaire du système de protection, une occasion de synthétiser ou d'actualiser l’ensemble des éléments de connaissance relatifs au système de protection et aux risques d’inondation associés. A ce titre, la première EdD d’un système de protection est l’occasion de rechercher et de capitaliser (dans le dossier d’ouvrage) certains des éléments de connaissance qui n’étaient pas immédiatement disponibles ; les futures EdD ou autres études sur le même système de protection s’en trouveront ainsi facilitées, voire enrichies.
L’intérêt pour les acteurs du territoire et de la gestion des risques
L’EdD est un outil au service des gestionnaires du territoire :
- Elle donne des connaissances sur les enjeux et leur exposition aux phénomènes d’inondation et les niveaux de risque ;
- Elle apporte des connaissances sur les dynamiques d'inondation dans la zone protégée et peut donc aider à la planification de la gestion de crise ;
- Elle sert de support pour aider à définir les actions à entreprendre en termes de planification pour la réduction de la vulnérabilité. L'EdD indique implicitement les zones dans lesquelles il ne devrait pas y avoir d'augmentation des enjeux et/ou de leur vulnérabilité, et peut donc permettre de mettre en place une meilleure maîtrise de l’urbanisation et/ou des mesures particulières d’urbanisme et d’aménagement du territoire.
L’EdD est également un outil au service des gestionnaires de la sauvegarde des populations et des biens :
- Pour tous les acteurs de la crise : l’EdD constitue une base objective sur laquelle pourra reposer le travail de communication entre le gestionnaire du système de protection et les gestionnaires de la sauvegarde des populations (maire, préfet, services de secours), et éventuellement les collaborations (exemple : utilisation de la réserve communale de sécurité civile pour la surveillance des digues en période de crue) permettant l’anticipation et la planification globale de la gestion de crise, pour mieux définir les actions à entreprendre en cas de crise (mise en sécurité des populations et des biens) :
- Au niveau de l’Etat, au moyen du plan ORSEC (loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, décret n°2005-1157 du 13 septembre 2005 relatif au plan ORSEC). Il s'appuie sur 3 niveaux territoriaux : départemental, zonal et maritime, et comporte 3 volets : recensement et analyse des risques, dispositif opérationnel, préparation et exercices. L'EdD, présentant le recensement et l'analyse des risques, peut permettre au Préfet de planifier les secours adaptés aux crises ;
- Au niveau communal, au moyen du Plan Communal de Sauvegarde (PCS). L'EdD donne au Maire des éléments utiles à l'élaboration ou la révision du PCS ;
- Pour les établissements scolaires et plus généralement les établissements recevant du public ;
- Pour les entreprises : mise en protection des installations, plans d’évacuation, PCI, … ;
- Pour les réseaux : planification des actions à entreprendre pour diminuer leur vulnérabilité et améliorer la résilience de leurs fonctions ;
- Pour les particuliers : connaissance des risques et anticipation pour la mise en sécurité, mise au point de "plan familial de mise en sûreté", adaptation de l'habitat, …
Ces différentes valorisations indirectes des résultats de l’EdD (celle-ci étant avant tout dédiée au gestionnaire du système de protection) sont d’autant plus évidentes lorsqu’un effort de pédagogie et de communication est entrepris autour de l’étude. Ce travail est nécessaire pour une meilleure gestion du risque d’inondation sur le territoire.
Les différents types d’études de dangers de digues ou de systèmes d’endiguement
En fonction de l’existence réelle ou projetée de tout ou partie d’un système de protection, il est possible de distinguer jusqu’à cinq types d’EdD de digues ou de systèmes d’endiguement. L'approche présentée ci-après est une analyse, compatible avec les réglementations de 2007 comme de 2015, mais n'est pas une lecture "mot à mot" de chacune de ces réglementations.
Les EdD « constat »
Peuvent être appelées EdD « constat » toute étude de dangers relative à un système de protection existant qui ne fait l’objet d’aucun projet de modification. L’EdD « constat » a pour objectif d’analyser les risques induits par un tel système à un instant donné (risque résiduel lié aux dépassements du niveau de protection et aux éventuelles défaillances du système).
Dans le cadre de la réglementation de 2007 (Décret n° 2007-1735 du 11 décembre 2007), l'EdD propose des mesures de réduction de ces risques. Le contenu du chapitre 9 de ce type d'EdD doit répondre aux attentes du guide de lecture des EdD de digues (circulaire du 16 avril 2010). Dans le cas de la réglementation de 2015 (Décret n° 2015-526 du 12 mai 2015), les mesures de réduction du risque ne sont plus demandées dans le cadre de l'EdD, mais le gestionnaire doit bien évidemment utiliser les résultats de l'EdD de la même manière afin de maitriser ou réduire le risque sur son système.
Trois types d’EdD « constat » peuvent être identifiées :
- L’EdD initiale ;
- La mise à jour régulière de l’EdD ;
- La mise à jour exceptionnelle de l’EdD.
L’EdD initiale
Il s’agit de la première EdD réalisée sur un système de protection existant. Elle est donc fondatrice.
Après avoir procédé à l’identification du périmètre du système de protection, l’EdD initiale dresse un premier constat daté du risque d’inondation de la zone protégée par rupture ou dépassement (surverse, contournement) de ce système. Elle aboutit, entre autres, à l’identification de la zone protégée et du niveau de protection associé.
L’EdD initiale résulte de l’exploitation de toutes les données nécessaires disponibles, rassemblées ou produites préalablement, et identifie précisément les études et investigations complémentaires à mener sur le système de protection et son environnement avant la prochaine EdD.
S’il fait l’acquisition de nouvelles données lui permettant d’approfondir les résultats de son EdD initiale, le gestionnaire n’est pas obligé d’attendre la prochaine mise à jour régulière pour faire évoluer le contenu de son EdD.
La mise à jour régulière de l’EdD
Le décret du 11 décembre 2007 impose aux gestionnaires de digues de mettre à jour les EdD au moins une fois tous les dix ans. Le décret de 2015 impose une remise à jour tous les 10 ans pour les systèmes de classe A, tous les 15 ans pour les classe B et tous les 20 ans pour les classe C.
Ces révisions passent notamment par l’intégration de toutes les évolutions récentes du système et de son environnement, ainsi que par l’exploitation des résultats des dernières investigations (Visite Technique Approfondie entre autres, Retour d’Expérience sur événements, ETC, …).
Des évolutions des méthodologies d'analyse peuvent également être intégrées lors des mises à jour ; par exemple, les méthodes de justification actuelle des ouvrages hydrauliques en remblai ne prennent pas en compte de manière satisfaisante tous les mécanismes de détérioration et de rupture, tels les mécanismes d'érosion interne, alors que des recherches sur ces mécanismes sont en cours et amèneront à la définition de nouvelles méthodes d'évaluation dans le futur.
La mise à jour exceptionnelle de l’EdD
Le préfet peut demander la mise à jour exceptionnelle d’une EdD s’il considère qu’un événement nouveau est de nature à remettre en cause sa validité comme, par exemple, la modification structurelle du système de protection ou encore un événement hydrologique majeur, ou un EISH. Il indique alors le délai dans lequel cette mise à jour doit être réalisée.
La réalisation de ce type d’EdD peut également répondre à un besoin énoncé dans les conclusions du chapitre 9 de la dernière EdD en date (type « réglementation 2007 ») ou encore être initiée par le responsable de l’ouvrage.
Les EdD "projet" ou "programme" de travaux
Concernant soit la création d’un nouveau système de protection, soit la modification d’un système existant déjà pourvu d’une EdD, ces études ne concluent pas sur des mesures de réduction du risque telles que décrites au chapitre 9 du plan réglementaire. En revanche, elle permet de justifier et de quantifier l'amélioration en termes de risque qui résulte de la réalisation d’un projet ou d’un programme de travaux, en effectuant une estimation du risque dans les deux situations (avant et après réalisation).
Les EdD « projet »
Une EdD « projet » est menée avant la mise en œuvre du projet. Elle doit permettre d'en justifier le bien fondé, en montrant l’influence du projet sur le risque d’inondation en présentant :
- Une estimation du risque pour la situation initiale ;
- Une estimation du risque pour la situation correspondant au projet ;
- Une estimation des bénéfices résultant de la mise en œuvre du projet (différence entre les deux situations précédentes).
L’EdD ultérieure et immédiatement consécutive à la réalisation du projet (une EdD « constat ») ne nécessitera alors qu’une actualisation de l’EdD « projet », pour rendre compte de l’aménagement effectivement implanté et du risque résiduel associé.
La différence essentielle entre les EdD liées à des travaux et les EdD « constat » tient à ce qu'au lieu de proposer ou d'aider à définir des mesures de réduction du risque, l’EdD « projet » permet plutôt de quantifier la réduction du risque apportée par la réalisation des travaux, en une ou plusieurs étapes.
Les EdD « programme »
Un programme de travaux est un projet mené par étapes, sur le moyen ou le long terme, et dont les résultats en matière de diminution du risque ne sont pas nécessairement effectifs avant l'étape finale.
L'EdD « programme » doit donc estimer la réduction du risque qui sera apportée par la mise en œuvre complète du programme en explicitant, pour chaque phase de travaux, les objectifs à atteindre. Ce programme peut correspondre à la création d’un nouveau système de protection ou à la modification d’un système de protection existant.
Spécificités liées à la création d’un nouveau système de protection
En l’absence d’ouvrages de protection, il n’existe localement aucune EdD antérieure à la réalisation de l'EdD "projet" ou "programme". Une étude spécifique d’estimation du risque d’inondation en situation initiale doit alors être menée sur la zone d’influence du projet d’aménagement. Elle permettra de mesurer l’impact du projet de création sur le risque d’inondation.
Spécificités liées à la modification d’un système de protection existant
Dans le cas de la modification d'un système de protection existant, l’EdD « projet » ou « programme » s’appuie sur la dernière mise à jour de l’EdD du système, si elle existe. Ce sont les résultats de cette dernière qui serviront de référence pour mesurer l’impact du projet de modification sur le risque d’inondation.
Le projet de modification, qui peut résulter de la mise en application de mesures de réduction du risque proposées dans (ou définies à l'aide) des EdD antérieures, peut faire partie d’un programme de travaux plus vaste sur plusieurs années. Un objectif de diminution du risque d’inondation est alors annoncé dans le projet et atteint à l’issue de sa mise en œuvre.
Références :
Article R214-116-I du code de l’environnement.
Arrêté du 7 avril 2017 précisant le plan de l'étude de dangers des digues organisées en systèmes d'endiguement et des autres ouvrages conçus ou aménagés en vue de prévenir les inondations et les submersions.
Décret n°2005-1157 du 13 septembre 2005 relatif au plan ORSEC et pris pour application des articles L741-1 à L741-5 du code de la sécurité intérieure.
Loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile.
Ministère de l’Ecologie, du Développement Durable et de l’Energie (MEDDE), Décret n° 2015-526 du 12 mai 2015 relatif aux règles applicables aux ouvrages construits ou aménagés en vue de prévenir les inondations et aux règles de sûreté des ouvrages hydrauliques.
Ministère de l’Ecologie, du Développement et de l'Aménagement Durables (MEDAD), Décret n° 2007-1735 du 11 décembre 2007 relatif à la sécurité des ouvrages hydrauliques et au comité technique permanent des barrages et des ouvrages hydrauliques et modifiant le code de l'environnement.
TOURMENT, R., BEULLAC, B., (coord.), 2019, Inondations : analyse de risque des systèmes de protection – Application aux études de dangers. Editions Lavoisier, 2019.
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