Déplacement d’une pluie (HU) : Différence entre versions
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[[File:deplacement pluie.JPG|1200px|center|thumb|<center>''<u>Figure 1</u> : Exemple d'images [[Panthere (HU)|Panthere]] produites par Météo-France de l'évolution d'une succession de cellules convectives affectant le sud est de la France et en particulier la région de Marseille ; les images radar des intensités sont espacées de 30 minutes ; <u>Source</u> : Seramm/Suez.''</center>]] | [[File:deplacement pluie.JPG|1200px|center|thumb|<center>''<u>Figure 1</u> : Exemple d'images [[Panthere (HU)|Panthere]] produites par Météo-France de l'évolution d'une succession de cellules convectives affectant le sud est de la France et en particulier la région de Marseille ; les images radar des intensités sont espacées de 30 minutes ; <u>Source</u> : Seramm/Suez.''</center>]] | ||
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− | Il est possible d'imaginer que l'importance d'une crue peut être renforcée si la pluie se déplace dans la même direction et dans le même sens que les écoulements ou au contraire diminuée dans le cas inverse. A ce propos, Koch, (1967) faisait déjà remarquer que pour que le sens de déplacement de la pluie joue un rôle déterminant dans l'augmentation du risque de crue, il était nécessaire, d'une part que la pluie se déplace dans le même sens que l'écoulement, et d'autre part qu'elle se déplace à une vitesse inférieure au double de la vitesse moyenne d'écoulement dans le réseau. Or on observe que les vitesses de déplacement des cellules pluvieuses sont généralement assez importantes (de l'ordre de 7 à 15 m/s), très supérieures à la vitesse de propagation des ondes de crue dans les systèmes d'assainissement ou dans les bassins versants plus naturels. | + | Il est possible d'imaginer que l'importance d'une crue peut être renforcée si la pluie se déplace dans la même direction et dans le même sens que les écoulements ou au contraire diminuée dans le cas inverse. A ce propos, Koch, (1967) faisait déjà remarquer que pour que le sens de déplacement de la pluie joue un rôle déterminant dans l'augmentation du risque de crue, il était nécessaire, d'une part que la pluie se déplace dans le même sens que l'écoulement, et d'autre part qu'elle se déplace à une vitesse inférieure au double de la vitesse moyenne d'écoulement dans le réseau. Or on observe que les vitesses de déplacement des cellules pluvieuses sont généralement assez importantes (de l'ordre de 7 à 15 m/s), très supérieures à la vitesse de propagation des [[Onde de crue (HU)|ondes de crue]] dans les systèmes d'assainissement ou dans les bassins versants plus naturels. |
− | Malgré tout le déplacement peut dans certains cas jouer un rôle important. A titre d'illustration, on peut citer la pluie du 24 août 1995 qui a causé en Seine-Saint-Denis des dégâts hors de proportion avec ses caractéristiques. En effet, la hauteur précipitée en quatre heures (20 à 30 mm selon les points de mesure) permettrait de lui attribuer une période de retour de 1 à 2 ans. Or cette pluie a traversé le département d'est en ouest, dans le sens des écoulements et les réseaux ont largement débordé. La vitesse moyenne de la pluie (8,4 m/s, soit 30 km/h) était pourtant supérieure de 3 à 6 fois à celle de la propagation de la crue dans le réseau principal (1,5 à 2 m/s). Mais compte-tenu de l'étendue du réseau, le pic de crue s'est superposé en tous points avec la fin du ruissellement local, créant ou aggravant les inondations. Une simulation a montré que si la pluie s'était déplacée en sens inverse, les lignes d'eau dans le réseau principal auraient été plus basses de 0,30 à 1,30 mètres, ce qui aurait notablement réduit les désordres. | + | Malgré tout le déplacement peut dans certains cas jouer un rôle important. A titre d'illustration, on peut citer la pluie du 24 août 1995 qui a causé en Seine-Saint-Denis des dégâts hors de proportion avec ses caractéristiques. En effet, la hauteur précipitée en quatre heures (20 à 30 mm selon les points de mesure) permettrait de lui attribuer une période de retour de 1 à 2 ans. Or cette pluie a traversé le département d'est en ouest, dans le sens des écoulements et les réseaux ont largement débordé. La vitesse moyenne de la pluie (8,4 m/s, soit 30 km/h) était pourtant supérieure de 3 à 6 fois à celle de la propagation de la crue dans le réseau principal (1,5 à 2 m/s). Mais compte-tenu de l'étendue du réseau, le pic de crue s'est superposé en tous points avec la fin du ruissellement local, créant ou aggravant les inondations. Une simulation a montré que si la pluie s'était déplacée en sens inverse, les lignes d'eau dans le réseau principal auraient été plus basses de 0,30 à 1,30 mètres, ce qui aurait notablement réduit les désordres (source : personnes en charge du réseau au moment des faits). |
==Prise en compte dans la gestion des crues== | ==Prise en compte dans la gestion des crues== | ||
− | L'étude du déplacement de la pluie peut également être essentielle pour l'anticipation des intensités de précipitation, en particulier pour la mise en alerte des gestionnaires ou des usagers et dans le cas des systèmes de gestion en temps réel. Plus le délai d'anticipation est grand et plus il est possible de mettre en œuvre des mesures efficaces. L'utilisation des images fournies par les radars météorologiques permet aujourd'hui d'apprécier avec une bonne précision les intensités probables par | + | L'étude du déplacement de la pluie peut également être essentielle pour l'anticipation des intensités de précipitation, en particulier pour la mise en alerte des gestionnaires ou des usagers et/ou dans le cas des systèmes de gestion en temps réel. Plus le délai d'anticipation est grand et plus il est possible de mettre en œuvre des mesures efficaces. L'utilisation des images fournies par les radars météorologiques permet aujourd'hui d'apprécier avec une bonne précision les intensités probables par bassin versant pour les heures à venir. Les méthodes d'extrapolation utilisées sont cependant beaucoup plus compliquées qu'un simple déplacement sur une trajectoire (voir [[Prévision des crues : les données nécessaires (HU)]]). |
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<u>Bibliographie</u> : | <u>Bibliographie</u> : |
Version actuelle en date du 3 mars 2025 à 09:57
Traduction anglaise : Rainfall movement, storm movement
Dernière mise à jour : 02/03/2025
Certains modèles de représentation ou de prévision des pluies tiennent compte de leur déplacement sur une trajectoire ; que signifie exactement le déplacement d'une pluie ?
[modifier] Réalité du phénomène physique
Les images radar montrent que le phénomène pluvieux affecte le territoire de façon :
- différenciée en fonction de la position, et,
- évolutive en fonction du temps (figure 1).
Sur le territoire français, on observe assez régulièrement des directions privilégiées de déplacement des zones pluvieuses, soit liées à des situations météorologiques types (par exemple perturbations océaniques traversant le territoire d'ouest en est ou trains de cellules convectives se déplaçant du sud-ouest vers le nord est), soit liées à des conditions géographiques locales (relief en particulier)
Il est cependant très difficile de considérer un événement pluvieux comme un système relativement stable se déplaçant régulièrement le long d'une trajectoire. En pratique, les évolutions temporelles et spatiales de la pluie sont étroitement imbriquées, particulièrement pour des phénomènes de type convectif (voir figure 1).
[modifier] Influence des déplacements sur l'importance des crues
Il est possible d'imaginer que l'importance d'une crue peut être renforcée si la pluie se déplace dans la même direction et dans le même sens que les écoulements ou au contraire diminuée dans le cas inverse. A ce propos, Koch, (1967) faisait déjà remarquer que pour que le sens de déplacement de la pluie joue un rôle déterminant dans l'augmentation du risque de crue, il était nécessaire, d'une part que la pluie se déplace dans le même sens que l'écoulement, et d'autre part qu'elle se déplace à une vitesse inférieure au double de la vitesse moyenne d'écoulement dans le réseau. Or on observe que les vitesses de déplacement des cellules pluvieuses sont généralement assez importantes (de l'ordre de 7 à 15 m/s), très supérieures à la vitesse de propagation des ondes de crue dans les systèmes d'assainissement ou dans les bassins versants plus naturels.
Malgré tout le déplacement peut dans certains cas jouer un rôle important. A titre d'illustration, on peut citer la pluie du 24 août 1995 qui a causé en Seine-Saint-Denis des dégâts hors de proportion avec ses caractéristiques. En effet, la hauteur précipitée en quatre heures (20 à 30 mm selon les points de mesure) permettrait de lui attribuer une période de retour de 1 à 2 ans. Or cette pluie a traversé le département d'est en ouest, dans le sens des écoulements et les réseaux ont largement débordé. La vitesse moyenne de la pluie (8,4 m/s, soit 30 km/h) était pourtant supérieure de 3 à 6 fois à celle de la propagation de la crue dans le réseau principal (1,5 à 2 m/s). Mais compte-tenu de l'étendue du réseau, le pic de crue s'est superposé en tous points avec la fin du ruissellement local, créant ou aggravant les inondations. Une simulation a montré que si la pluie s'était déplacée en sens inverse, les lignes d'eau dans le réseau principal auraient été plus basses de 0,30 à 1,30 mètres, ce qui aurait notablement réduit les désordres (source : personnes en charge du réseau au moment des faits).
[modifier] Prise en compte dans la gestion des crues
L'étude du déplacement de la pluie peut également être essentielle pour l'anticipation des intensités de précipitation, en particulier pour la mise en alerte des gestionnaires ou des usagers et/ou dans le cas des systèmes de gestion en temps réel. Plus le délai d'anticipation est grand et plus il est possible de mettre en œuvre des mesures efficaces. L'utilisation des images fournies par les radars météorologiques permet aujourd'hui d'apprécier avec une bonne précision les intensités probables par bassin versant pour les heures à venir. Les méthodes d'extrapolation utilisées sont cependant beaucoup plus compliquées qu'un simple déplacement sur une trajectoire (voir Prévision des crues : les données nécessaires (HU)).
Bibliographie :
- Koch, P. (1967) : Les réseaux d'égouts ; Ed. Dunod, Paris ; 1967.
Voir aussi : Répartition spatio-temporelle des précipitations.