Seuil hydraulique (HU)
Traduction anglaise : Weir
dernière mise à jour : 23/12/2019
Surélévation du radier d'un ouvrage, normalement submergée, construite à des fins diverses, par exemple pour stabiliser la loi hauteur/débit au droit d'une station hydrométrique (seuil jaugeur) ou pour assurer une profondeur d'eau minimale dans un bief ou pour limiter le débit dans une direction particulière (seuil de déversoir d’orage).
Sur le plan du vocabulaire utilisé en assainissement il existe souvent une forte ambiguïté entre le mot seuil et le mot déversoir, ces mots peuvent par exemple être associés aux mêmes qualificatifs (par exemple seuil mince et déversoir à paroi mince), ou associés entre eux de différentes façons (par exemple seuil déversoir et déversoir à seuil).
Dans cet article, l'usage du mot seuil sera réservé aux ouvrages présentant la particularité physique de disposer d'une surélévation du radier qui induit une modification des conditions hydrauliques, quelles que soient les conséquences de cette modification. Les ouvrages dont la fonction est de déverser une partie du débit vers le milieu naturel, indépendamment du procédé utilisé pour contrôler le débit déversé sont traités dans l'article Déversoir d'orage.
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Évolution des connaissances sur le fonctionnement hydraulique des seuils
La première formule applicable aux seuils frontaux a été établie par Poleni dès 1717 :
avec :
- $ g $ : accélération de la pesanteur (m/s2) ;
- $ h_0 $ : hauteur d'eau au dessus du seuil (m) ;
- $ L $ : largeur du seuil (m) ;
- $ m $ : coefficient dépendant de la forme du seuil ;
- $ Q $ : débit au dessus du seuil (m3/s).
Les expériences de Weisbach et Francis entre 1841 et 1852, puis celles de Bazin en 1888 et enfin de Rehbock en 1912 permirent l'élaboration de formules relativement simples, applicables aux seuils frontaux. Ces formules sont d'ailleurs toujours en usage aujourd'hui. A peu près à la même époque étaient élaborées les approches théoriques sur le calcul des déversements (Belanger en 1849 ; Mullins en 1890 ; Frizell en 1899 ; Flamert en 1900 ; Boussinesq en 1907).
L'analyse du fonctionnement des seuils latéraux a pour sa part été plus tardive. La variation de la hauteur d'eau le long du seuil introduit en effet une difficulté supplémentaire. Les premiers travaux furent l’œuvre de Coleman et Smith en 1910, de Forchmer en 1924 et De Marchi en 1934 [De Marchi, 1934]. Cependant, contrairement aux seuils frontaux, il ne fut pas possible d'établir une formule simple et indépendante des conditions de l'écoulement, permettant de prévoir le débit déversé en fonction de la géométrie de l'ouvrage. Ce n'est guère que dans les années 1980 que le développement des outils informatiques a permis le développement de modèles reposant sur le calcul de la ligne d'eau le long du seuil. Citons en particulier à ce sujet les travaux de Smith et El Khashab, repris ultérieurement et validé par Carleton [El Khashab & Smith, 1976], [Carleton, 1985].
Classification et concept de base
Il existe un grand nombre de types de seuils, ayant des formes et des fonctions différentes. Plusieurs classifications sont possibles selon que l'on s'intéresse aux principes constructifs utilisés ou au mode de fonctionnement des ouvrages. On se limite souvent à une typologie fondée sur la position du seuil par rapport à la ligne principale d'écoulement. On peut ainsi distinguer :
- les seuils frontaux ;
- les seuils latéraux.
Seuils frontaux
Les seuils frontaux ont pour particularité de barrer la ligne d'écoulement sur toute sa largeur. Ils sont généralement installés plus ou moins perpendiculairement à l'écoulement.
Seuils latéraux
Les seuils latéraux peuvent être placés sur un seul côté de l'ouvrage (seuil simple) ou de chaque côté (seuil double). Le seuil de déversement peut être rectiligne ou courbe, de hauteur constante ou variable. Dans la section correspondant au seuil de déversement, la cunette d'arrivée d'eau peut avoir une section constante ou se rétrécir.
Suivant la pente du radier, les conditions hydrauliques d'écoulement à l'amont et à l'aval, la fraction de débit déversée, etc., la ligne d'eau au dessus du seuil peut présenter différentes configurations : hauteur d'eau plus faible à l'extrémité amont du seuil qu'à l'extrémité aval ou le contraire ; ressaut à l'amont, à l'aval, au milieu ; etc.. Ce type de seuil étant essentiellement associé à des déversoirs d'orage, les informations relatives au seuils latéraux sont regroupés à cet article.
Modèles de simulation
Les modèles de simulation ont pour objet de décrire le fonctionnement hydraulique des ouvrages et en particulier de permettre le calcul du débit déversé pour une hauteur donnée d'eau à l'amont. Les seuils frontaux sont théoriquement simples à étudier du fait que la ligne d'eau est parallèle à la crête du seuil. Les relations hydrauliques utilisables pour calculer le débit déversé au dessus du seuil se déduisent donc directement du théorème de Bernoulli moyennant quelques hypothèses simplificatrices. Malheureusement les conditions nécessaires au respect de ces hypothèses ne sont pas toujours vérifiées [Barbe & al., 1967] et il est souvent difficile d'analyser le fonctionnement hydraulique des ouvrages dès que leur géométrie se complique (présence d'écoulements latéraux, de vannes de fond, etc.). Le fonctionnement des seuils est fortement déterminé par la forme de la section mouillée au dessus du seuil.
Cas de base : seuil mince rectangulaire, déversement à nappe libre, sans contraction latérale
Si les dimensions de la partie du seuil qui touche l'eau sont suffisamment faibles pour être négligées, on parle de seuil à lame mince. Lorsque la nappe est suffisamment décollée du seuil pour que l'air puisse normalement circuler entre la nappe et le seuil, on dit que la nappe est libre (voir la figure 2).
Dans ce cas, et en l'absence de contraction latérale, on peut généralement faire l'hypothèse que la répartition de la pression est hydrostatique dans la lame d’eau et négliger les frottements sur le seuil. Connaissant la vitesse moyenne $ V_0 $ dans une section de référence située suffisamment à l'amont du seuil pour ne pas être perturbée par lui et suffisamment près pour que l'on puisse négliger les pertes de charge linéaires entre la section de référence et le seuil, on peut estimer la vitesse $ V $ au dessus du seuil, à une profondeur $ z $ par rapport à la surface libre de l'eau dans la section de référence, par la relation :
Le débit élémentaire $ dQ $ passant au travers d'une tranche de hauteur $ dz $ vaut donc :
avec :
- $ L $ : largeur de la tranche d'eau considérée.
En intégrant cette quantité entre $ z = 0 $ et $ z = h $ ($ h $ = hauteur d'eau au dessus du seuil), et en supposant que $ L $ est constant et égal à la largeur du seuil, on obtient l'expression suivante :
L'évaluation de $ h $ est délicate. En effet, $ h $ est plus faible que la différence de niveau entre la ligne d'eau dans la section de référence et le seuil, car la ligne d'eau s'abaisse au passage du seuil.
Pour résoudre ce problème, Weissbach a proposé en 1841 la relation suivante :
avec :
- $ h_0 $ : différence de niveau entre la ligne d'eau dans la section de référence et le seuil.
- $ μ $ : coefficient < 1, tenant compte de l'abaissement de la ligne d'eau sur le seuil et des pertes de charge.
$ V_0 $ et $ h_0 $ sont calculés en supposant que l'écoulement est permanent et uniforme. Si la vitesse de l'écoulement est faible, on peut négliger les termes en $ V_0^2 $
On retrouve alors la formule simple de Poleni :
Cette formule est cependant parfois trop restrictive, aussi Bazin a-t-il proposé de réintroduire la vitesse à l'amont, en considérant la charge totale $ H_0 $ en lieu et place de la hauteur d'eau $ h_0 $ :
avec :
- $ α $ choisi empiriquement entre 0 et 1, en général $ α = 1 $.
La formule devient alors :
En pratique, on néglige cependant souvent la valeur de la vitesse et on confond les valeurs de $ H0 $ et $ h0 $. Différentes formules existent pour estimer m ; elles sont toutes d'origine expérimentale et ne sont donc valables que dans les conditions où elles ont été établies. Les plus connues sont les suivantes :