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Diagnostic de fissuration d'ouvrages fluviaux

De Wikhydro

Cette vidéo a été mise en place par le Commissariat Général au Développement Durable du ministère du développement durable et organisée par le Service de Navigation de Strasbourg. Centrées sur l'hydrosystème RHIN et ses problématiques, elles se sont déroulées du 17 au 21 mai 2010.

Intervenants :

Pierre Charbonnier - Responsables du Groupes Métodes Physiques au Laboratoire des Ponts et Chaussées de Strasbourg.

Valérie Muzet - Chercheur ERA27 Imageries Méthodes-Optiques au Laboratoire des Ponts et Chaussées de Strasbourg.




WIKHYDRO - Diagnostic de fissuration d'ouvrages... par Wikhydro

Sommaire

Introduction


Dans les ouvrages d’art, les fissures sont un signe de fragilisation de la structure. Leur détection et leur caractérisation préventives permettent de réduire les coûts ultérieurs d’intervention.
L’introduction d’armatures métalliques au sein du matériau permet de reprendre les efforts de traction et a pour but d’éviter sa fissuration en maintenant le béton dans sa zone de fonctionnement en compression. Les méthodes traditionnelles de détection de dégradations, fondées sur l’emploi de jauges de déformation et d’extensomètres, satisfont aux exigences requises pour des mesures ponctuelles, mais ne donnent que partiellement accès à un champ de déplacement. Les auscultations visuelles nécessitent d’être en contact avec l’ouvrage, ce qui soulève le problème de la sécurité de l’opérateur. Il est souvent difficile de distinguer visuellement ou au toucher les défauts actifs d’origine mécanique, seuls dangereux pour les structures, des défauts passifs. L’intérêt des méthodes optiques est qu’elles sont non destructives, ne nécessitent pas l’intervention humaine au plus près de l’ouvrage et offrent une visualisation globale du champ de déformation.

Les auscultations visuelles nécessitent d’être en contact avec l’ouvrage, ce qui soulève le problème de la sécurité de l’opérateur. Il est souvent difficile de distinguer visuellement ou au toucher les défauts actifs d’origine mécanique, seuls dangereux pour les structures, des défauts passifs. L’intérêt des méthodes optiques est qu’elles sont non destructives, ne nécessitent pas l’intervention humaine au plus près de l’ouvrage et offrent une visualisation globale du champ de déformation.

Lorsqu’une structure en béton est stimulée, une fissure se manifeste au travers des discontinuités qu’elle crée sur le réseau de franges obtenu par interférométrie optique. Compte tenu de la sensibilité des méthodes optiques, le phénomène peut apparaître pour des ouvertures de fissures très inférieures à 0,1 mm. Des études de faisabilité ont montré la pertinence de l’utilisation de différentes techniques interférométriques (holographie, holographie digitale et shearographie) pour la détection de fissures sur des ouvrages d’art.

Afin d’optimiser la gestion des infrastructures et des ouvrages d’art existants en vue de prolonger leur durée de vie, il est nécessaire de connaître leur état et de détecter leurs défauts. Les méthodes optiques sont des moyens de contrôle et de mesure non destructifs. Le Centre d’Études Techniques de l’Équipement de l'Est a conçu une méthode de détection et d'analyse des fissures des ouvrages en béton à partir de photographies. Le test présenté sur les bajoyers de l'écluse de Gambsheim ouvre des perspectives intéressantes sur l'applicabilité de cette méthode.


Le Groupe Méthodes Physiques du Laboratoire Régional des Ponts et Chaussées de Strasbourg


constitué d'une équipe de recherche associée ERA LCPC, travaille dans dans 2 domaines méthodologiques :
methodes le groupe methodes physiques png
  • le traitement des images numériques.
  • les méthodes optiques et électroniques.


Ces méthodes marient l'optique et l'électronique, et se servent de la lumière pour mettre en évidence les défauts. Une technique d'interférométrie (la shearographie) permet de voir les fissures sur les ouvrages.

Il existe deux champs d'application principaux: historique de l'imagerie routière et  les ouvrages d'art non distructifs. C'est ce dernier domaine où les investigations sont plus en avant.

Ces méthodes là sont reprises dans le cadre des problématiques des voies navigables.

La shearographie, aussi appelée interférométrie différentielle ou interférométrie de speckle à décalage, est une méthode à chemins optiques quasi confondus. Elle possède de ce fait de nombreux avantages si on la compare à l’holographie : une sensibilité à la dérivée de la déformation qui permet une visualisation directe des zones de fortes contraintes, une certaine tolérance aux mouvements d’ensemble de la structure inspectée, une sensibilité ajustable en fonction de l’amplitude du décalage appliqué, enfin une robustesse aux perturbations.

dispositif d interferometrie shearographique en laboratoire
dispositif d interferometrie shearographique sur site png

Grâce à ce dispositif expérimental, on utilise une tête interférométrique, un logiciel FA (Fringe Analysis) utilisés pour piloter la tête et gérer l’acquisition et le traitement des images, une caméra, et un laser monomode longitudinal d’une puissance de 400 mW et de longueur d’onde 532 nm. 


Des images sont prises des routes et de leur environnement. Elles sont calibées à l'aide d'une grille au sol. Grâce à 2 caméras, des mesures de hauteurs, des mesures de gammes de panneaux, ainsi que des mesures de hauteur de glissière sont prises. Ces caméras sont placées parallélement à la vision pour obtenir la 3D. Des mesures par stéréovision sont utilisées depuis des années.

Ces systèmes sont transférés aux voies navigables. Une première expérimentation a été effecté en collaboration avec VNF. Un tunnel a été osculté, et des images de la voûte de cet ouvrage ont été prises via le chemin de halage.Ces images vont constituer une base de données pour les chercheurs traiteurs d'images, puisqu'elles vont permettre d'optimiser leur algorithme et détecter les fissures et mesurer leur taille.

Résultats obtenus en laboratoire


Les objets étudiés en laboratoire sont des plaques de béton armé qui ont été fissurées par chocs. Plusieurs expériences ont été réalisées pour différentes sollicitations et distances d’auscultation.

 À courte distance(moins de 2 m)

  •  Utilisation d’une sollicitation vibratoire

La plaque utilisée dans cette expérimentation est fortement fissurée sur sa face arrière, alors que, sur la face avant, la fissure n’est visuellement pas débouchante. Afin de faire vibrer la plaque, une stimulation acoustique est réalisée avec un haut-parleur placé à proximité de la plaque, à côté de la fissure, afin de voir les figures d'interference qui seront différentes de part t d'autre d'une fissure pour la mettre en évidence.
La fréquence et l’amplitude du signal sont pilotées par un générateur de basse fréquence. On a identifié par un rapide balayage fréquentiel les fréquences correspondant à des modes propres de vibration de la structure qui mettent particulièrement en évidence le défaut. Si l’on met en oeuvre la shearographie en temps moyenné, des franges d’interférence sont générées entre les deux lèvres de la fissure cisaillée. Les franges noires correspondent au zéro de la fonction de Bessel J0. Le contraste diminue avec l’augmentation de l’ordre des franges, la frange la plus brillante correspondant au zéro du gradient de déplacement dans la direction du cisaillement. Le nombre de franges et leur orientation varient en fonction de la fréquence de stimulation, car des modes propres de vibration différents sont générés.

l echantillon de beton arme fissure non debouchante sur la face avant png multi557
l echantillon de beton arme fissure non debouchante sur la face arriere png
l echantillon de beton arme image cisaillee
figure d interference


  • Utilisation d’une sollicitation mécanique

La cible employée avec une sollicitation mécanique est une plaque de béton armé qui comporte à l’avant des fissures débouchantes selon une seule orientation et à l’arrière plusieurs fissures suivant différentes orientations. Des déformations de la surface sont obtenues au moyen d’un système à trois points d’appui, répartis de part et d’autre de la fissure à l’arrière de l’échantillon.
Le cisaillement appliqué est horizontal. La méthode de décalage de phase à quatre images est utilisée pour calculer les cartes de phases.
La carte de phase de référence est enregistrée avant la sollicitation et une seconde carte de phase est enregistrée après le serrage. En faisant la différence entre les deux, on met en évidence les défauts de la structure. La shearographie permet de détecter la fissure visible aussi bien que les deux fissures non débouchantes, indécelables visuellement.

 A longue distance (de 3 à 15 m)
Les résultats présentés précédemment ont été obtenus à des distances d’auscultation faibles (inférieures à 2 m) non compatibles avec une utilisation in situ pour la détection de fissures sur ouvrages  d’art. C’est pourquoi des expériences complémentaires ont été réalisées pour des distances de visée plus importantes. L’objet étudié est une plaque de béton fissurée, stimulée mécaniquement comme précédemment. Des stimulations identiques sont appliquées avec des distances d’observation comprises entre 3 et 15 m. Le cisaillement appliqué est horizontal. L’objectif, de focale 70-300 mm, placé à l’extérieur de la tête shearographique, permet de visualiser la même zone à 3 m, 5 m et 7,50 m, soit une surface de 36 × 21,5 cm. La focale n’est plus suffisante à 15 m et la zone observée devient plus importante.

la zone stimulee de taille face avant png
la zone stimulee de taille face arriere png
zone stimulee de difference de phase png

Résultats obtenus in situ


Deux zones de la travée d’un pont autoroutier circulé ont été observées : une zone non fissurée mais sale, recouverte de poussières et de toiles d’araignée et une zone présentant une fissure débouchante. La fissure, repérée à la craie bleue, a une ouverture de
l’ordre de 0,1 mm. La sollicitation est générée ici par le seul trafic routier.
Sur la zone saine, aucune détection de fissure n’a été observée par shearographie. Ce test confirme la capacité de la shearographie à détecter uniquement les défauts d’origine mécanique. Les défauts d’aspect de surface ne provoquent pas de déformation.
Dans la zone comportant un défaut actif, la fissure a été détectée avec différentes techniques de shearographie. La fissure est détectée en temps réel, bien que l’image obtenue soit très bruitée à cause des fluctuations aléatoires de la phase des grains de speckle. La méthode par temps moyenné permet également de visualiser la différence de sollicitation de part et d’autre de la fissure et ainsi de détecter celle-ci. L’image obtenue par temps moyenné présente un meilleur contraste et les bords de la fissure sont mieux délimités.

pont autoroutier ausculte par shearographie vue d enemble png
pont autoroutier ausculte par shearographie zone comportant une fissure png
pont autoroutier ausculte par shearographie zone non fissuree png multi876


La sollicitation générée par le passage des véhicules sur le pont semble adéquate pour l’étude qui a été menée. Pour voir apparaître une fissure, il faut cependant que le trafic soit homogène. En effet, lors du passage de poids lourds, les vibrations de l’ouvrage sont trop importantes et il y a décorrélation des grains de speckle. Il est donc recommandé d’appliquer la méthode décrite pour la détection de fissures dans un contexte de trafic stable. Bien que non reproductible, une telle sollicitation permet de réaliser en conditions réelles une auscultation d’ouvrages par shearographie, sans qu’il soit nécessaire d’apporter de sollicitation mécanique ou vibratoire supplémentaire.

phase entre un etat sollicite et un etat de reference par shearographie

Dans le domaine des voies navigables, des travaux ont été effectués en matière d'analyse d'images, dont une démonstration d'images prises sur les Bajoyers de l'écluse de Gambsheim.

Le but de cette démonstration est d'effectuer un relevé semi-automatique d'une fissure présente dans l'image entre 2 points. L'algorithme va automatiquement rechercher la fissure dans l'image. Dans le logiciel dit "Pitcher", développé par le LCPC, en collaboration avec le Groupes Méthodes Physiques permet e mesurer l'ouverture de la fissure le long de la ligne qui a été relevée.

Ce traitement assure une certaine répetabilité puisque le traitement est automatique et le processus sera donc répété sur des images prises d'une année à l'autre. Il y a également des techniques de recalage qui permettent de superposer ces imagesl'une par rapport à l'autre pour voir l'évolution temporelle de la fissure, en ouverture ou en longueur.

camera de detection de fissuration des ouvrages en beton
les bajoyers de l ecluse de gambsheim

A retenir


 Cette étude a montré la pertinence de l'interférométrie pour la détection de fissures sur ouvrages d’art. L’application d’une contrainte à la structure permet de mettre en évidence des défauts actifs par l’apparition de franges d’interférence au niveau du défaut cisaillé. Le dispositif mis en oeuvre est relativement compact, ce qui permet d’ausculter une surface étendue par simple déplacement de la tête holographique. Cette technique peut être utilisée même en cas d’observation à longue distance sous réserve de disposer d’un laser suffisamment puissant et d’un objectif approprié. En effet, l’application d’un décalage spatial permet d’augmenter la taille apparente du défaut, donc de s’affranchir de la distance, ce qui est un avantage non négligeable par rapport aux techniques d’holographie et de photogrammétrie classiques.

En outre, la méthode étant différentielle, les turbulences de l’atmosphère et les déplacements parasites d’ensemble affectent de façon quasi similaire les deux images dédoublées et ont peu d’influence sur les résultats. Cette technique est donc particulièrement adaptée à une utilisation en extérieur. Les expérimentations réalisées sur site sont prometteuses. En effet, la sollicitation naturelle d’un ouvrage d’art que constitue un trafic qui y circule s’avère bien adaptée à la détection de fissures par shearographie, dès lors que ce trafic est suffisamment régulier.



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