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Le réseau perenne de mesure de la houle : De l'installation des matériels jusqu'au calcul des paramètres d'états de mer

De Wikhydro

Sommaire

Introduction

Le CETMEF, Service Technique à compétence nationale du Ministère de l'Écologie, du Développement Durable et de l'Énergie, est spécialisé en ingénierie, en promotion de l’état de l’art, en expertise technique dans les domaines portuaire, côtier et fluvial, en sécurité de la navigation et en télécommunications. Anciennement Service Technique des Phares et Balises, il installe et exploite des appareils destinés à la mesure de la houle depuis 1972. Pour rappel, la mesure de houle est de première importance pour les domaines suivants : les risques littoraux (PPR, submersions marines, action des vagues, catastrophes naturelles) ; l'évolution du climat et de son impact sur le littoral; la morphodynamique côtière et suivi de trait de côte ;le dimensionnement d'ouvrages portuaires et littoraux ;la sécurité de la navigation ;les énergies renouvelables.

Depuis 2007, un effort particulier a été déployé pour doter la France d'un réseau national côtier de mesure de houle in situ cohérent et pérenne dont la gestion est assurée par le CETMEF (réseau CANDHIS, Centre d'Archivage National des Données de Houle In Situ). Ce réseau arrive à maturité. Il comporte 19 stations de mesure (bouées de mesure de houle) réparties le long du littoral métropolitain (voir la figure n°1). Il est principalement constitué de houlographes DATAWELL de type DWR-MKIII (voir la figure n°2).

Figure 1 - Implantation des stations de mesure de houle du réseau pérenne.jpg Figure 2 - Houlographe Datawell DWR-MKIII.jpg


Le fonctionnement du houlographe

Le houlographe DWR-MKIII possède un accéléromètre permettant de mesurer l'amplitude des vagues.

Figure 3 - Définition des axes de la DWR-MKIII.jpg

L'axe sensible de l'accéléromètre pointe dans la direction verticale. Après filtrage et double intégration du signal de l'accélération on obtient un déplacement. L'accéléromètre est constitué d'un disque suspendu dans un fluide de densité égale. Un très petit lest métallique monté sur le disque le rend sensible à la gravité. La combinaison de la grande masse du fluide avec la faible force du métal constitue un pendule ayant une période naturelle de 40 secondes.

La direction de la houle est obtenue en mesurant les mouvements horizontaux de la bouée et en les corrélant avec les mouvements verticaux. Deux accéléromètres montés perpendiculairement mesurent les mouvements dans le plan de la bouée. La mesure des angles de roulis et de tangage lorsque la bouée est inclinée permet de ramener les accélérations dans le plan de la bouée aux accélérations dans le plan horizontales.

Les angles de roulis et tangage sont déterminés par des bobines montées autour du capteur et mesurant le couple électromagnétique par rapport à une bobine montée sur la plate forme stabilisée.

Un compas Fluxgate permet de transformer les coordonnées de la bouée par rapport au repère magnétique (Nord-Ouest).

Nous obtenons donc 3 déplacements (voir la figure n°3)

Le pilonnement (déplacement vertical). Le roulis (déplacement Est-Ouest). Le tangage (déplacement Nord-Sud).


La composition de la ligne de mouillage

Afin que le houlographe puisse suivre au mieux la forme des vagues il est nécessaire que la ligne de mouillage soit la plus libre possible (voir la figure n°4). Les quatre principaux éléments la constituant sont : l'élastomère, le synthétique, la chaîne et le corps-mort.

Figure 4 - La ligne de mouillage.jpg

L'élastomère

Il est situé en cul de bouée et se détend sous la force des vagues. Il agit donc comme amortisseur et évite ainsi que la force de rappel de la ligne d'ancrage n'écrête le sommet des vagues.

L'élastomènre est commercialisé en deux diamètres et longueurs différents. Le diamètre de 35mm est utilisé pour les houlographes de 90cm et celui de 27mm pour les 70cm. Concernant les longueurs, elles sont de 15 ou 30m. Pour des hauteurs d'eau de 8 à 16m la longueur de 15m est utilisée. Les 30m servent lorsque la hauteur d'eau atteint les 17m.

L'élastomère est le point faible de la ligne de mouillage. A la moindre amorce de coupure, il y a risque de rupture lorsqu'il est mis en traction. Afin d'éviter que le houlographe ne parte en dérive, une ligne de sécurité, égale au double de la longueur de l'élastomère, est enroulée tout autour de ce dernier. Cette ligne est constituée de Polypropylène de 16mm ou de Dyneema de 8 mm (voir la figure n°5).

Figure 5 - Elastomère avec sa ligne de sécurité.jpg

Le synthétique

La jonction entre l'élastomère et la chaîne s'effectue avec du Polyamide de 22mm. Ce dernier est utilisé car sa densité est de 1,14. Il coule donc mais a un poids très faible dans l'eau et il n'y a aucune partie en surface. Afin qu'il n'aille pas frotter le fond, un flotteur est monté sur sa partie supérieure. Il devra être placé à 5m au minimum sous la surface de l'eau afin d'éviter d'être coupé par l'hélice d'un bateau. Un second flotteur est monté à 2 m du bas, permettant ainsi de relever d'un mètre la chaîne dormante et donc d'éviter de frotter le fond.

La chaîne

Suivant l'exposition du site à instrumenter deux types de chaîne sont utilisés, soit de l'acier de 16mm ou de l'acier de 22mm. La longueur doit être égale à la hauteur d'eau des cartes marines + la hauteur de marnage + 5 mètres. Afin d'éviter que le mouillage ne s'emmêle, un émerillon est monté sur la partie supérieure de la chaîne.

Le corps-mort

La réserve de flottabilité maximale d'un houlographe est de 180Kg. Le corps-mort utilisé est en béton d'un poids de 500Kg, soit une masse dans l'eau de 250Kg.

Le déploiement du matériel

Le mouillage doit être déployé sur le pont (voir la figure n°6) de façon à ce qu'il n'y ait aucun risque d’emmêlement.

Figure 6 - Préparation du mouillage sur le pont du navire.jpg

La mise à l'eau du matériel dépend des moyens nautiques dont on dispose et des conditions météorologiques. La méthode la plus classique consiste à mettre le houlographe à l'eau une fois sur site (voir la figure n°7). Ensuite on laisse filer l'élastomère et le Polyamide jusqu'à la chaîne. Enfin le navire se positionne précisément sur le point et met le corps-mort à l'eau.

Figure 7 - Mise à l'eau du houlographe.jpg

La récupération des données

Le houlographe transmet à terre les mesures, par voie hertzienne (bande de fréquence 31,500 Mhz).

Les 3 déplacements (Roulis, Tangage et Pilonnement) sont envoyés à une fréquence de 1,28Hz (0,78125 s). Un résultat d'analyse spectrale calculé dans la bouée sur 64 raies est aussi envoyé via cette fréquence.

Ces informations sont collectées à terre par un récepteur qui les traite et les transfère vers un ordinateur. Sur ce dernier est installé un logiciel développé par le CETMEF (VagueDir MKIII) qui analyse les données reçues et les stocke sur son disque dur afin qu'elles puissent être retraitées avant d'être archivées dans la base de données CANDHIS(voir la figure 8). Ce sont les données en « temps différés » (données validées).

Le logiciel effectue toutes les trente minutes une analyse temporelle et un décodage des données spectrales calculées dans la bouée (voir la figure n°9). Il contrôle la position GPS du houlographe et transmet une alarme vers une personne d'astreinte si la position reçue est supérieure à 500 mètres de celle théorique.

Un ordinateur équipé d'un logiciel développé par le CETMEF (TéléVagueWeb) vient toutes les heures récupérer les données calculées. Il les contrôle, les met en forme et les transfert sur le site internet CANDHIS du ministère (voir la figure n°10). Ces données sont donc accessibles à tous et réactualisées toutes les heures. Elles peuvent être consultées à l'adresse: http://candhis.cetmef.developpement-durable.gouv.fr/. Ce sont les données « temps réel » (données non validées).

Figure 8 - Station réceptrice de houle.jpg Figure 9 - Logiciel VagueDir.jpg Figure 10 - Accès temps réel sur CANDHIS.jpg


Le calcul des paramètres d'état de mer

Les paramètres d'états de mer sont entièrement recalculés par le CETMEF. L'ensemble de ces paramètres est obtenu par deux analyses différentes.

Analyse Vague par Vague (ou Temporelle)

Il s'agit d'une analyse statistique des vagues définies par le passage au niveau moyen calculé sur l'ensemble du signal étudié (voir la figure n°11).

Figure 11- Définition des hauteurs de vagues par l'analyse vague par vague.jpg

Principaux paramètres d'états de mer calculés par l'analyse vague par vague : H1/3, H1/10, Hmax, Tavd, TH1/3, TH1/10 et Thmax.

Spectre directionnel :

Le spectre directionnel de variance (appelé spectre directionnel) représente la répartition de l’énergie des vagues, en fonction de la fréquence et de la direction.

L’état de mer est représenté par une superposition linéaire d’ondes sinusoïdales élémentaires (voir la figure n°12). Le capteur doit mesurer au minimum trois signaux :3 déplacements ou une pression et 2 vitesses ou autres.

Figure 12 - Superposition linéaire d’ondes sinusoïdales et spectre directionnel .jpg

La répartition de l’énergie est représentée à la fois sur les fréquences et sur les directions. Le spectre directionnel est généralement représenté sous forme polaire (voir la figure n°13).

Figure 13 - Représentation polaire du spectre directionnel de variance..jpg

Principaux paramètres d'états de mer calculés à partir du spectre de variance: Hm0, T02, TE, Tp, Dir et Etal.

Définitions

H1/3  : Hauteur significative, valeur moyenne du tiers supérieur des hauteurs des vagues observées sur une durée de 30 minutes.

H1/10  : Valeur moyenne du dixième supérieur des hauteurs des vagues observées sur une durée de 30 minutes.

Hmax  : Hauteur de la plus grande vague observée sur une période de 30 minutes.

Tavd  : Période moyenne des vagues observées sur une durée de 30 minutes définies par passage au niveau moyen par valeurs décroissantes.

TH1/3  : Période significative, définie par la valeur moyenne des périodes du tiers supérieur des plus grandes vagues observées sur une durée de 30 minutes.

TH1/10  : Valeur moyenne des périodes du dixième supérieur des plus grandes vagues observées sur une durée de 30 minutes.

THmax  : Période de la vague de la plus grande hauteur observée sur une durée de 30 minutes. Hm0  : Estimation de la hauteur significative des vagues à partir du moment d’ordre zéro de la densité spectrale.

T02  : Période moyenne calculée en prenant la racine carrée du rapport du moment d’ordre zéro sur le moment d’ordre deux de la densité spectrale.

TE  : Période d’énergie définie par le rapport du moment d’ordre moins un sur le moment d’ordre zéro de la densité spectrale.

Tp  : Période correspondant au maximum de la densité spectrale.

Dir  : Direction moyenne de provenance des vagues au pic du spectre d’énergie. L’angle est compté positivement, suivant le sens des aiguilles d’une montre, entre le Nord géographique et la direction de provenance des vagues.

Etal : Largeur directionnelle, caractérise l’étalement directionnel de l’énergie autour de la direction moyenne au pic (fonction de répartition angulaire de l’énergie associée à la fréquence de pic du spectre d’énergie).



Article rédigé par Guy AMIS, chargé du réseau national de houlographes au CETMEF.

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