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Wikigeotech:Remblais contigus

De Wikhydro

Sommaire

Définition

Figure 1 : Définition du remblai contigu,zones poids et zone de poussée

Le remblai contigu à l’ouvrage (figure 1) assure la transition entre le point dur représenté par l'ouvrage et le remblai courant (profil en long). Il supporte la dalle de transition.
Il fait l'objet de prescriptions plus restrictives que le remblai courant en matière de choix de matériau car il participe au bon fonctionnement mécanique de l'ouvrage. Il englobe les zones où :

  • ses caractéristiques mécaniques influent sur le dimensionnement et la pérennité de l'ouvrage (notamment son angle de frottement interne φ') ;
  • sa mise en œuvre se fait dans un espace exigu et sensible ;
  • les matériaux ne doivent pas être agressifs pour l'ouvrage (agression chimique et électrochimique, agression mécanique) ;
  • les fonctions de drainage sont indispensables.

Le remblai contigu est donc défini par des critères prioritairement mécaniques à travers son influence sur les structures rigides qui le soutiennent (mur, culée d’ouvrage). Les principales préconisations en matière de choix de matériaux, de réalisation, de contrôle sont rappelés dans une note d'information intitulée "Construire des remblais contigus aux murs et culées d'ouvrages d'art"[1].

Domaine d'application

Les remblais contigus, souvent appelés remblais techniques ou blocs techniques, sont une partie intégrante des ouvrages. Ils contribuent, parfois de façon prépondérante, à la stabilité et assurent la transition entre les structures rigides, souvent en béton, au terrain naturel ou aux remblais courants. Leurs rôles sont souvent sous-estimés, voire méconnus, alors qu'ils sont parfois le cœur, donc la clé de la réussite de certains ouvrages. La maîtrise des conditions de mise en œuvre de ces remblais particuliers est nécessaire pour garantir la pérennité et la durabilité des ouvrages. Le non-respect de certaines règles peut entraîner de graves dysfonctionnements. De nombreuses règles ont été proposées, certaines parfois anciennes, pour de nombreux types d'ouvrages.

Les remblais contigus aux ouvrages d'art courants et murs de soutènements, sont ceux mis en œuvre à l'arrière des ouvrages suivants :

  • Piédroit de PICF (Passage Inférieur en Cadre Fermé), PIPO (Passage Inférieur en Portique Ouvert), POD (Portique Ouvert Double) ;
  • Mur de front, mur en retour ou en aile de culées de ponts ;
  • Mur de soutènement poids, mur de type béton armé sur semelle ou mur constitué d’éléments empilés.
Remblai contigu.jpg

Les matériaux utilisables

Les matériaux granulaires

Le choix de préconiser des matériaux granulaire répond à un besoin de limiter le risque d'intervention prématurée sur les ouvrages. Leur utilisation est souvent éprouvée et basée sur l'emploi de matériaux granulaires élaborés, dont le comportement mécanique à long terme est maîtrisé et connu. Bien qu’étant onéreux, leur utilisation est également adaptée aux faibles volumes que représentent les remblais contigus, aux difficultés de mise en œuvre dans des espaces exigus.

Les matériaux granulaires actuellement recommandés, basés sur le classement de la norme NFP 11-300[2], doivent être mis en oeuvre conformément au Guide Technique Réalisation des remblais et des couches de forme (GTR)[3] et au guide de remblayage des tranchées[4].

Critères granulométriques et intrinsèques

Les matériaux granulaires doivent être non évolutifs, non gonflants, insensibles à l'eau, non érodables et doivent présenter des paramètres physico-chimiques non agressifs vis à vis du béton et des armatures.
Les coefficients Los Angelès[5] et micro-Deval humide[6] seront inférieurs à 45. On pourra également vérifier que la fragmentabilité[7] et la dégradabilité[8] restent inférieures à 7.

Le matériau granulaire doit être exempt d'éléments supérieurs à 50 mm (Dmax < 50 mm) et le passant à 80 µm doit être inférieur à 12 %. Lorsque le diamètre maximal des éléments est compris entre 31,5 et 50 mm (31,5 mm < Dmax < 50 mm), il est nécessaire de mettre un dispositif de protection de l'étanchéité, qu’il s’agisse d’un matériau roulé ou concassé.

Masse volumique du matériau mis en œuvre

La masse volumique du matériau retenue lors du calcul de l’ouvrage doit être aussi proche que possible de la masse volumique du matériau mis en œuvre, une variation de 10% pouvant être tolérée. Bien qu’une masse volumique humide de 20 kN/m3 soit en général retenue il est fréquent d’observer des masses volumiques mises en œuvres plus proches de 21 kN/m3.

Dans tous les cas, il y a nécessité de connaître la masse volumique sèche (ρd) de mise en oeuvre avec la réalisation d’un essai Proctor[9] ou d’une planche d’essai. Cette valeur est généralement fournie avec la fiche matériau lors de la demande d'agrément.

Cela conduit à retenir le même matériau pour les remblais contigus de part et d'autre des ouvrages d'art courant (PIPO, PICF), hors calcul spécifique. Dans le cas de réalisation de ponts cadres, PIPO, PICF, la montée simultanée des 2 remblais contigus de part et d'autre de l'ouvrage est vivement conseillée, afin d'éviter les poussées dissymétriques. Dans le cas contraire, une justification par le calcul en phase d'exécution devra être présentée par l'entreprise avant le début des travaux.

Il est également rappelé que le drainage de l’eau est essentiel car la poussée hydrostatique sur la hauteur totale du mur conduit augmenter considérablement la poussée totale.

Paramètres physico-chimiques

D’une manière générale le CCTP (cahier des clauses techniques particulières) fixe des exigences minimales auxquelles doit répondre le béton[10] utilisé dans la construction d’un mur ou d’un pont, et notamment sa classe d’exposition. Cela conduit généralement à retenir plusieurs formules de béton selon les parties d’ouvrage (comme les fondations, les semelles, les piles, les culées, tablier, etc.) bien avant le début de la construction.

Les caractéristiques physico-chimiques des matériaux de remblai contigu peuvent avoir des conséquences sur la durabilité du béton à leur contact. Il est recommandé aux maîtres d’œuvre de s’assurer que les formules de béton retenues sont compatibles avec les matériaux qui seront réellement utilisés en remblai contigu.

Les matériaux à exclure

La justification des ouvrages en terre est menée en considérant une cohésion de calcul prise égale à zéro (c' = 0 kPa). L’angle de frottement interne φ' et la masse volumique sont les paramètres dimensionnants des murs.

De ce fait les argiles et limons sont à exclure sans traitement car :

  • ils conduisent à un dimensionnement non économique des soutènements,
  • ils sont évolutifs et peuvent mettre en péril la pérennité de l’ouvrage,
  • ils sont difficiles à mettre en œuvre
  • ils peuvent se saturer d’eau et devenir le siège d’une nappe perchée.

De plus, en cas de pathologie, ces matériaux induisent des problèmes supplémentaires lors de la conception de confortements par tirants d’ancrages ou par clouages.

Les roches tendres évolutives de type argilites, marnes, schistes, ou craie, non traités, sont à exclure car elles créent des fines dans le temps, générant des vides et des affaissements.

Les Mâchefers d'Incinération d'Ordures Ménagères (MIOM) sont des matériaux alternatifs récents pour lesquels des soucis d'agressivité chimiques pourraient conduire à la ruine de l'ouvrage par corrosion des armatures. Sans étude particulière, le recul n'est actuellement pas suffisant sur ce type de matériau pour conseiller son utilisation en remblai contigu.

Des pathologies en région parisienne notamment, suite à l’emploi de sables fins, non traités, conduisent à exclure ces matériaux car trop érodables (D 0/2 mm, type sable de Fontainebleau), le matériau pouvant être entraîné dans le système de drainage et générer des vides et des affaissements.

Les matériaux traités

Les matériaux fin traités sont utilisés depuis un certain nombre d'années. Cependant les retour d’expériences ne sont pas encore suffisants pour en qualifier le comportement au terme de la durée de vie de l’ouvrage (70 à 100 ans). Un certain nombre de recherches et d'études particulières sont encore à entreprendre pour vérifier la pérennité du traitement et le maintien dans le temps des caractéristiques mécaniques.

En l'absence des résultats de ces recherches, on peut adopter les conditions particulières suivantes. Ces conditions ont été appliquées sur certains chantiers, notamment en région parisienne depuis une vingtaine d'années.

Matériaux traités à la chaux

Les matériaux traités à la chaux, de type limons A1 ou A2 faiblement argileux sont acceptables après vérification de l'angle de frottement interne φ' et aussi de la pérennité du traitement. Les essais d'Indice Portant Immédiat (IPI) et d'indices CBR (Californian Bearing Ratio) à 4 jours d'immersion avec CBRi/IPI > 1 sont utilisés à ce jour pour vérifier le caractère de faible sensibilité à l'eau des couches de formes en cas de traitement à la chaux vive. À défaut de protocoles d’essais plus adaptés ils pourront servir de base de jugement pour l'utilisation des matériaux en remblai contigus.

Pour ces matériaux, la teneur minimale de traitement à la chaux doit être de 2 % en général[11]. La finesse de mouture sera de 0/20 mm au maximum, ce qui implique un pulvérisateur de sol et généralement un traitement en dehors de la zone de mise en œuvre. La teneur minimale dans le cas de graves traitées à la chaux pourra être inférieure et sera analysée au cas par cas.

Matériaux traités aux liants hydrauliques et au ciment

Figure 2 : zone de transition d'un remblai courant à un ouvrage d'art ferroviaire.
Les matériaux de classe GTR A1, B2, B4, B5 traités aux liants hydrauliques doivent être étudiés conformément aux Guide Conception Terrassement[11] et Guide de Traitement des Sols[12].

La teneur minimale de traitement aux liants de type ciment ou Liants Hydrauliques Routiers doit être supérieure à 3 %.

Cette solution conduit à créer à terme un massif rigide. Il convient alors de vérifier que le support de remblai est peu déformable et de prévoir une zone de transition de rigidité avec le remblai général. Cette solution est souvent préconisée dans la conception des zones de transition aux ouvrages ferroviaires à grande vitesse (figure 2).

Paramètres de dimensionnement

Le principe général est de vérifier par des essais que l’on est autorisé à calculer les ouvrages avec c’=0 kPa et φ'=35°. Il s’agira donc pour des matériaux traités de pouvoir s’assurer que ses caractéristiques mécaniques à long terme sont toujours suffisantes pour conduire à un effort de poussée inférieur ou égal à celui engendré par un angle de frottement à long terme φ' de 35° et une cohésion nulle.

En l’état actuel des connaissances il conviendra d’appliquer les consignes du GTS[12] complétées comme suit :

  • mesures à réaliser sur deux éprouvette compactées à 95% de l’OPN,
  • Rc après 14 jours de cure et 14 jours d’immersion supérieurs ou égal à 1 MPa,
  • Rc à 2 jours supérieur ou égal à 0,1 Mpa,
  • gonflement volumique (Gv) lors de l’essai d’aptitude inférieur à 2%.

Références

  1. Sétra. 2012. Construire des remblais contigus aux ouvrages d'art. Murs de soutènement et culées de ponts. Note d'information "Ouvrages d'art" n°34. Ed. Sétra. 20 pages.
  2. NF P 11-300. Exécution des terrassements - Classification des matériaux utilisables dans la construction des remblais et des couches de forme d'infrastructures routières
  3. Réalisation des Remblais et des Couches de Forme (GTR) - Guide technique - Fascicule I : Principes généraux - Fascicule II : Annexes techniques - Setra, LCPC, septembre 1992 - Réfer. D9233.
  4. Remblayage des tranchées et réfection des chaussées - Guide technique - Sétra, LCPC, mai 1994 - Référ. D9441.
  5. NF EN 1097-2 - Essais pour déterminer les caractéristiques mécaniques et physiques des granulats - Partie 2 : détermination de la résistance à la fragmentation.
  6. NF EN 1097-1 - Essais pour déterminer les caractéristiques mécaniques et physiques des granulats - Partie 1 : détermination de la résistance à l'usure (micro-DEVAL).
  7. NF P94-066 - Sols : reconnaissance et essais - Coefficient de fragmentabilité des matériaux rocheux
  8. NF P94-067 - Sols : reconnaissance et essais - Coefficient de dégradabilité des matériaux rocheux
  9. NF P94-093 (octobre 1999): Sols : reconnaissance et essais - Détermination des références de compactage d'un matériau - Essai Proctor normal. Essai Proctor modifié.
  10. NF EN 206-1 Béton - Partie 1 : Spécification, performances, production et conformité. Annexes nationales : A1 (avril 2005) et A2 (octobre 2005). AFNOR, indice classement P18-325-1.
  11. 11,0 et 11,1 Conception et réalisation des terrassements. Guide technique - Fascicule 1 : études et exécution des travaux. Setra, mars 2007. Réf. 0702-1
  12. 12,0 et 12,1 Traitement des sols à la chaux et/ou aux liants hydrau liques - Application à la réalisation des remblais et des couches de forme (GTS). Guide technique. Setra-LCPC, Janvier 2000, Réf. D 9924.
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