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Hydrologie urbaine (HU) : Différence entre versions

De Wikhydro
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''<u>Traduction anglaise</u>  :  Urban hydrology, research on urban drainage''
  
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Discipline scientifique de l'environnement se donnant pour objet l'étude de l'eau et de ses relations avec les différentes activités humaines en zone urbaine. Elle traite tout particulièrement des relations entre la gestion des eaux de surface et l'aménagement de l'espace en milieu urbain. Elle est organiquement liée à une technique urbaine particulière : l'assainissement.
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<u>Dernière mise à jour</u> : 13/6/2020
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Discipline scientifique pluridisciplinaire de l'environnement se donnant pour objet l'étude de l'eau et de ses relations avec les différentes activités humaines en zone urbaine.  
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L'hydrologie urbaine traite tout particulièrement des relations entre la gestion des eaux de surface et l'aménagement de l'espace en milieu urbain. Les recherches finalisées développées dans son champ se nourrissent des interactions permanentes qu'elle entretient avec les aspects techniques ou organisationnels des activités liées à l’assainissement, ainsi qu’avec des sciences connexes, qu’elles soient formelles, expérimentales, de la nature ou  humaines et sociales.
  
 
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L'hydrologie urbaine s'intéresse à la partie du cycle de l'eau affectée par l'urbanisation ou affectant le fonctionnement de la ville : infiltration de l'eau dans les sols et fonctionnement des nappes, ruissellement des eaux en surface et écoulements dans des biefs naturels (rivières) ou artificiels (canaux, conduites souterraines), évacuation et épuration des eaux usées, etc.. Le traitement et la distribution de l'eau potable, même s'ils sont indubitablement liés à la gestion urbaine de l'eau, ne sont cependant généralement pas rattachés au champ de l'hydrologie urbaine.
 
L'hydrologie urbaine s'intéresse à la partie du cycle de l'eau affectée par l'urbanisation ou affectant le fonctionnement de la ville : infiltration de l'eau dans les sols et fonctionnement des nappes, ruissellement des eaux en surface et écoulements dans des biefs naturels (rivières) ou artificiels (canaux, conduites souterraines), évacuation et épuration des eaux usées, etc.. Le traitement et la distribution de l'eau potable, même s'ils sont indubitablement liés à la gestion urbaine de l'eau, ne sont cependant généralement pas rattachés au champ de l'hydrologie urbaine.
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* modification de la perception et des usages de l'eau ;
 
* modification de la perception et des usages de l'eau ;
 
* évolution rapide de l'occupation des sols limitant les possibilités d'utilisation de méthodes statistiques fondées sur l'observation du passé pour prédire l'avenir.
 
* évolution rapide de l'occupation des sols limitant les possibilités d'utilisation de méthodes statistiques fondées sur l'observation du passé pour prédire l'avenir.
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Nous avons choisi, de façon sans doute un peu artificielle, de limiter le cadre de ce mot à la dimension recherche. Les aspects opérationnels sont traités dans d'autres mots comme [[Assainissement (HU)]], [[Assainissement pluvial (HU)]], [[Gestion intégrée des eaux pluviales (HU)]], etc.. Les deux distinctions fortes faites entre recherche finalisées et développements opérationnels sont les suivantes :
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* Les chercheurs développent des modèles cognitifs qui visent à expliquer le fonctionnement du système étudié alors que les opérationnels ont besoin de modèles prévisionnels (qui permettent de prévoir la façon dont une modification du système étudié va modifier son fonctionnement), et décisionnels (qui permettent de prévoir quelles modifications il faut apporter au système pour modifier son fonctionnement d'une certaine façon).
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* La recherche ne tient jamais rien pour acquis ; un (bon) chercheur passe son temps à essayer de démontrer que ses modèles sont faux (ou plutôt insuffisants). Un opérationnel a besoin d'éléments pour l'action et doit s'appuyer sur des éléments de connaissances qu'il est obligé de considérer comme acquis au moment où il agit.
  
 
==Éléments d'historique==
 
==Éléments d'historique==
  
L'hydrologie urbaine est indissociable de l'une des plus significatives manifestations de l'activité humaine amorcée à la fin du 19ème siècle dans les pays industrialisés : l'urbanisation. Elle est née avec la première révolution industrielle et la découverte des problèmes épidémiologiques posés par la concentration d'individus dans un espace limité, la ville.
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Comme nous l'avons évoqué dans l'introduction, l'hydrologie urbaine est indissociable de l'une des plus significatives manifestations de l'activité humaine amorcée à la fin du 19ème siècle dans les pays industrialisés : l'urbanisation. Elle est née avec la première révolution industrielle et la découverte des problèmes épidémiologiques posés par la concentration d'individus dans un espace limité, la ville.
  
 
===Genèse ( - 1970)===
 
===Genèse ( - 1970)===
  
A la fin du XIXème siècle, l'assainissement des agglomérations est considéré comme une technique d'infrastructure urbaine, qui relève principalement du Génie civil. Certes des hommes comme Kuilching (1889) aux Etat-Unis, Burkli-Ziegler (1880) en Suisse, Lloyd-Davis (1906) au Royaume Uni, Belgrand (1857, 1887) en France, jetèrent, dans leurs pays respectifs, les bases d'une approche scientifique du cycle de l'eau en milieu urbain. Leurs analyses furent cependant assez confidentielles et souvent transformées en règles simples d'ingénierie masquant totalement la complexité des mécanismes hydrologiques urbains.
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A la fin du XIXème siècle, l'assainissement des agglomérations était considéré comme une technique d'infrastructure urbaine, relevant principalement du Génie civil. Certes des hommes comme [[Belgrand Eugène (1810-1878) (HU)|Belgrand]] en France, qui avait auparavant beaucoup travaillé sur la prévision des crues de la Seine, Kuilching (1889) aux Etats-Unis, Burkli-Ziegler (1880) en Suisse, Lloyd-Davis (1906) au Royaume Uni, ont jeté, dans leurs pays respectifs, les bases d'une approche scientifique du cycle de l'eau en milieu urbain. Leurs analyses sont cependant restées assez confidentielles, malgré des échanges internationaux, et souvent transformées en règles simples d'ingénierie masquant fortement la complexité des mécanismes hydrologiques urbains. Durant toute la première moitié du XXème siècle, les ingénieurs des pays industrialisés ont consacré beaucoup d'énergie à la production de guides et de normes techniques, dont certains ont connu un retentissement international comme les ouvrages de Metcalf et Eddy aux Etats-Unis ou de Karl Imhoff en Allemagne.  
Durant toute la première moitié du XXème siècle, les ingénieurs des pays industrialisés consacrèrent beaucoup d'énergie à la production de guides et de normes techniques, dont certains connurent un retentissement international comme les ouvrages de Metcalf et Eddy aux Etats-Unis ou de Karl Imhoff en Allemagne.
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En France, cette période de normalisation fut marquée par la production de la Circulaire Générale 1333 de 1949, qui constitua la référence technique essentielle jusqu'à la date de sa révision en 1977. Ce document introduisit, en particulier, une approche originale du calcul des apports pluviaux urbains due à l'Académicien Albert Caquot (1941).
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En France, cette période de normalisation a été marquée par la production de la [[Instruction technique (HU)|Circulaire Générale 1333 de 1949]], qui a constitué la référence technique essentielle jusqu'à la date de sa révision en 1977. Ce document a introduit, en particulier, une [[Caquot (méthode de) (HU)|approche originale]] du calcul des apports pluviaux urbains due à l'Académicien des Sciences [[Caquot Albert (1881-1976) (HU)|Albert Caquot]], initiée en 1941. A la fin des années 1950, la révolution des modes de production agricole, et la croissance de la production industrielle ont entraîné une nouvelle explosion de la démographie urbaine des pays industrialisés. L'urgence de bâtir et l’appauvrissement technique des services publics a souvent limité la réflexion sur les conséquences de l'urbanisation sur le cycle de l'eau. A la fin des années 1960 ces conséquences sont devenues évidentes un peu partout, et avec elles leur cortège de nuisances de tous ordres : inondations fréquentes par des eaux de ruissellement, dysfonctionnements récurrents des ouvrages de collecte, de transport et de traitement, pollutions graves des milieux récepteurs fragiles.  
A la fin des années 50, la révolution des modes de production agricole, et la croissance de la production industrielle entraînèrent une véritable explosion de la démographie urbaine des pays industrialisés. L'urgence de bâtir limita souvent la réflexion sur les conséquences de l'urbanisation sur le cycle de l'eau. A la fin des années 60 ces conséquences devinrent un peu partout évidentes, et avec elles leur cortège de nuisances de tous ordres : inondations fréquentes, dysfonctionnements permanents des ouvrages de collecte, de transport et de traitement, pollutions graves des milieux récepteurs fragiles.
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Cette situation fut ainsi à l'origine de l'émergence de l'hydrologie urbaine scientifique.
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Cette situation a ainsi été à l'origine de l'émergence de l'hydrologie urbaine en tant que discipline scientifique et technique.  
 
   
 
   
 
===Structuration (1970-1981)===
 
===Structuration (1970-1981)===
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====Structuration internationale====
 
====Structuration internationale====
  
Le développement de programmes nationaux de recherche en hydrologie urbaine dans les pays industrialisés, au début des années 70, attestait d’une similitude des relations parfois difficiles entre la ville et le cycle de l’eau. Ces programmes favorisèrent la croissance du nombre des chercheurs œuvrant dans la discipline et une certaine dynamique de recherche. Mais cette dernière ne pouvait trouver son plein épanouissement que dans la confrontation internationale des travaux entrepris.
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Le premier programme national de recherche important en hydrologie urbaine a été développé aux USA, à l’initiative de l’American Society of Civil Engineers (ASCE, 1968) et son Directeur [[McPHERSON Murray B. (1919-1981) (HU)|Murray Mc Pherson]], avec le soutien de divers organismes dont la Fondation Nationale pour la Science (US NSF), et de l’Agence fédérale pour l’environnement (Environmental Protection Agency / EPA). Ce programme a attiré de nombreux chercheurs américains. Les résultats de leurs travaux, publiés au début des années 1970 dans des revues scientifiques internationales ou par l’EPA, allaient créer un grand intérêt et une certaine émulation, notamment dans les pays industrialisés, où se retrouvait souvent une similitude dans la difficulté des relations entre la ville et le cycle de l’eau. Cela a favorisé l’expression des besoins d’approfondissement des connaissances et de renouveau des principes d’ingénierie. Dans plusieurs pays, dont la France, des initiatives souvent encore ponctuelles et la lecture de la documentation diffusée par l’EPA ont favorisé une certaine dynamique de recherche. Mais cette dynamique ne pouvait trouver son plein épanouissement que dans la confrontation internationale des travaux entrepris.  
  
Cette dernière fut rendue possible par la conjonction d’un important programme de recherche américain de l’American Society of Civil Engineers (ASCE, 1968) et de son Directeur Murray Mc Pherson.
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Murray Mc Pherson a consacré beaucoup de son énergie pour mener à bien un des volets du programme américain qui concernait l’inventaire des potentialités internationales de recherches en Hydrologie Urbaine. Ses très grandes qualités humaines lui ont permis d’aller bien au-delà d’un simple inventaire. Murray a rendu visite à de nombreux chercheurs, européens en particulier, et, par les contacts qu’il a fait naître entre ces personnes assez isolées jusque-là, a favorisé leur organisation mondiale. Pour améliorer l’efficacité de son action, Murray a fusionné le volet international du programme de l’ASCE et les activités du groupe de travail de l’UNESCO créé dans le cadre de la décennie hydrologique internationale (1964-1974). Une première réunion internationale a été organisée en 1973 avec le concours de l’Association Internationale des Sciences Hydrologiques (ASCE, 1974 ; UNESCO, 1974).
 
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Le premier financé par divers organismes dont la Fondation Nationale pour la Science (US NSF) attira de nombreux chercheurs américains, dont les travaux, publiés dans des revues scientifiques internationales, allaient créer une certaine émulation en Europe, favorisant l’apparition de nouveaux noyaux nationaux de chercheurs.
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Le second consacra beaucoup de son énergie pour mener à bien un des volets du programme américain qui concernait l’inventaire des potentialités internationales de recherches en Hydrologie Urbaine. Les très grandes qualités humaines de Murray Mc Pherson lui permirent d’aller bien au-delà d’un simple inventaire. Murray visita ainsi de nombreux chercheurs européens et, par les contacts qu’il fit naître entre des chercheurs isolés, favorisa leur organisation mondiale. Pour améliorer l’efficacité de son action, Murray fusionna le volet international du programme de l’ASCE et les activités du groupe de travail de l’UNESCO dans le cadre de la décennie hydrologique internationale (1964-1974). Une première réunion internationale fut ainsi organisé en 1973 avec le concours de l’Association Internationale des Sciences Hydrologiques (ASCE 1974 ; UNESCO 1974).
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Par la suite, Murray Mc Pherson jugea plus efficace de procéder à des réunions d’experts internationaux réalisant le point des recherches en hydrologie urbaine dans leurs pays respectifs (Desbordes et Normand, 1976 ; UNESCO, 1977 ; UNESCO, 1978 ; ASCE, 1979 ; Delleur et Torno, 1983). Murray fut assisté, dans cette activité, par Harry C. Torno, fonctionnaire de l’US American Protection Agency (localisée dans l’immeuble du Water Gate à Washington…). Les contacts établis à l’occasion de ces réunions et les échanges d’informations auxquels elles donnèrent lieu furent décisifs pour le regroupement mondial des chercheurs en hydrologie urbaine.
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Par la suite, Murray Mc Pherson a jugé plus efficace de procéder à des réunions d’experts internationaux chargés de faire le point des recherches en hydrologie urbaine dans leurs pays respectifs (Desbordes et Normand, 1976 ; UNESCO, 1977 ; UNESCO, 1978 ; ASCE, 1979 ; Delleur et Torno, 1983). Murray a été assisté, dans cette activité, par Harry C. Torno, fonctionnaire de l’US American Protection Agency (localisée dans l’immeuble du Water Gate à Washington!). Les contacts établis à l’occasion de ces réunions et les échanges d’informations auxquels elles ont donné lieu ont été décisifs pour le regroupement mondial des chercheurs en hydrologie urbaine.
 
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Parallèlement aux actions de l’ASCE, l’Université de Southampton (GB) organisa en 1978 la première conférence internationale entièrement consacrée à l’hydrologie urbaine (Helliwell, 1978). C’est au cours de cette conférence que de nombreux chercheurs, à l’initiative du Professeur Ben C. Yen, de l’Université d’Illinois, émirent l’hypothèse d’une structuration plus formelle de leurs activités. Ce fut réalisé en 1981 à la faveur d’une conférence internationale organisée par Ben à l’Université d’Illinois à Urbana (USA), à l’issue de laquelle fut créé le Comité Joint d’Hydrologie Urbaine (''Joint Committee on Urban Storm Drainage (JCUSD)''), parrainé par deux association scientifiques internationales : l’Association Internationale de Recherches Hydrauliques (AIRH/IAHR) et l’Association Internationale sur la Pollution des Eaux et son Contrôle (AIRPEC/IAWPRC), devenue depuis l’Association Internationale sur la Qualité des Eaux (IAQE/IAWQ), puis l'IWA (International Water Association).
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Parallèlement aux actions de l’ASCE, l’Université de Southampton (GB) a organisé en 1978 la première conférence internationale entièrement consacrée à l’hydrologie urbaine (Helliwell, 1978). C’est au cours de cette conférence que de nombreux chercheurs, à l’initiative du Professeur Ben C. Yen, de l’Université d’Illinois, ont émis l’hypothèse d’une structuration plus formelle de leurs activités. Cela a été réalisé en 1981 à la faveur d’une conférence internationale organisée par Ben à l’Université d’Illinois à Urbana (USA), à l’issue de laquelle a été créé le Comité Joint sur l’Hydrologie Urbaine (Joint Committee on Urban Storm Drainage (JCUSD)), parrainé par deux association scientifiques internationales : l’Association Internationale de Recherches Hydrauliques (AIRH/IAHR) et l’Association Internationale sur la Pollution des Eaux et son Contrôle (AIRPEC/IAWPRC), devenue depuis l’Association Internationale sur la Qualité des Eaux (IAQE/IAWQ), puis l'IWA (International Water Association).  
  
 
====Structuration nationale====
 
====Structuration nationale====
  
En 1973, l'ingénieur Général Loriferne est chargé de mettre en place une commission chargée de rédiger une nouvelle Instruction Technique destinée à remplacer la circulaire CG 1333. Les travaux de cette commission vont s'appuyer principalement sur deux éléments :
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En 1973, l'ingénieur Général Loriferne est mandaté pour mettre en place une commission chargée de rédiger une nouvelle Instruction Technique destinée à remplacer la circulaire CG 1333. Les travaux de cette commission vont principalement s'appuyer sur deux éléments antécédents qui vont largement alimenter les débats :  
* la mise en place de bassins versants expérimentaux de quelques dizaines d'hectares qui vont fournir les données indispensables à l'analyse des phénomènes hydrologiques ;
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* La mise en place, dès 1968, de bassins versants expérimentaux de quelques dizaines d'hectares. Cette expérimentation, initiée par Michel Affholder, directeur de la première Division des Équipements Urbains (chargée, au Ministère de la Reconstruction puis de l’Equipement, en particulier de suivre la bonne mise en œuvre de la CG 1333 de 1949), va fournir les données indispensables à l'étude des phénomènes hydrologiques urbains.
* la thèse de Michel Desbordes qui va analyser en détail les données obtenues et très largement orienter la démarche de la commission.
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* L'analyse de ces données, principalement par Michel Desbordes.
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En 1974, Michel Desbordes (Desbordes, 1974) soutient sa thèse de docteur-ingénieur et créé la première équipe française de recherche dans le domaine, au Laboratoire d'Hydrologie Mathématique (LHM) de Montpellier.
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En parallèle, dans le tout jeune département de Seine-Saint-Denis, une équipe très dynamique et interdisciplinaire, avec notamment Jacques Rousset, Jacques Marchand, Jean-Claude Deutsch, Claire Cogez et Francis Calvet, s’est lancée en 1972 dans de multiples études et expérimentations innovantes pour relever les défis imposés par le décalage entre d’une part l’urbanisation massive et très rapide de ce territoire et les fortes contraintes physiques (topographie générale très plate) et, d’autre part, les limites du réseau d’assainissement en place ou des capacités financières du Conseil général.
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En juillet 1976, la Direction de l’Aménagement Foncier et de l’Urbanisme du Ministère chargé de l’Équipement créé le Service technique de l'urbanisme (STU) et en particulier une nouvelle Division des Équipements urbains (DEU) qui va jouer un rôle décisif dans le développement et l'organisation de l'hydrologie urbaine en France. Un voyage d’étude assez marquant aux Etats-Unis est organisé par l’Agence financière de bassin Artois-Picardie avec le Bureau d’études Coyne et Bellier, regroupant une trentaine d’ingénieurs ou de chercheurs des administrations, de bureaux d’études et de l’Université.
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L'année suivante l'Instruction technique relative à l'assainissement des agglomérations est publiée. Elle ouvre la possibilité d’utiliser des outils nouveaux pour le dimensionnement des bassins de retenue ou des modèles, et appuie, dans ses préconisations, le développement des recherches en hydrologie urbaine.
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En 1978, Bernard Chocat soutient sa thèse de doctorat (Chocat, 1978) et crée à l'INSA de Lyon une deuxième équipe de recherche française au sein du laboratoire Méthodes. En 1980 est également créé le CERGRENE, sous la double égide de l'ENPC et de l'ENGREF. La recherche universitaire en hydrologie urbaine commence à prendre un peu plus d’ampleur.  
  
En 1974, Michel Desbordes soutient sa thèse (Desbordes, 1974) et créé la première équipe française de recherche dans le domaine au Laboratoire d'Hydrologie Mathématique de Montpellier.  
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En parallèle des bureaux d'études (SOGREAH, Sauveterre, Hydratech, ...) développent des recherches finalisées qui débouchent sur des outils opérationnels, en particulier des logiciels de modélisation des écoulements et de dimensionnement des réseaux : dès 1972 pour CAREDAS de SOGREAH, puis HYDRA de Hydratech, et RERAM, développé au Centre d’études techniques de l’Equipement (CETE) d’Aix-en-Provence sur la base des modèles établis dans sa thèse par Michel Desbordes, et SERAIL puis CEDRE, développé par l’INSA de Lyon sur la base de la thèse de Bernard Chocat. Plus tard, le logiciel CANOE fusionnera les acquis de CEDRE et de CAREDAS.  
  
En 1976 est créé le service technique de l'urbanisme (STU) et en particulier la Division des Équipements urbains (DEU) qui va jouer un rôle décisif dans le développement et l'organisation de l'hydrologie urbaine en France. L'année suivante paraît l'Instruction technique relative à l'assainissement des agglomérations  qui justifie, par ses préconisations, le développement des recherches en hydrologie urbaine.
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Plusieurs services techniques de l’État (Laboratoire régional - des Ponts et Chaussées - de l’Ouest parisien (LROP) à Trappes, CETE d'Aix en Provence ou de Bordeaux, Laboratoire Central des Ponts et Chaussées (LCPC), ou dépendant d’autres structures, comme le Centre d'expertise du bâtiment et des travaux publics (CEBTP), ont également commencé à s'intéresser à la problématique.
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Cette effervescence a été animée et soutenue financièrement par le STU et sa DEU qui, de plus, a mis en réseau ces divers organismes grâce à de nombreux groupes de travail permettant à l'ensemble des acteurs de se rencontrer, et de partager leurs expériences ou les orientations à préconiser. De nombreux guides techniques et documents de référence ont été élaborés et publiés. Des expérimentations et opérations de démonstration ont été réalisées. Des recherches plus lourdes ont été entreprises, en particulier la campagne nationale de caractérisation de la pollution des rejets urbains de temps de pluie sur quatre bassins versants expérimentaux, pilotée par le STU, puis soutenue par le Plan Urbain dans le cadre de son programme de recherches sur l’Eau et la Ville.
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C’est aussi durant cette période que la notion de « technique alternative au tout réseau » a vu le jour, avec comme premières références : les bassins de de rétention des eaux de temps de pluie des bassins, qui auront vite connu un assez grand succès et auront été déclinés en une multiplicité de configuration ; et les chaussées poreuses, expérimentées en affrontant bien des résistances et dont les applications resteront relativement cantonnées, mais qui auront pu servir de base à diverses transpositions.  
  
En 1978 Bernard Chocat soutient sa thèse de doctorat (Chocat, 1978) et créé à l'INSA de Lyon une deuxième équipe de recherche française au sein du laboratoire Méthodes. En 1980 est également créé le CERGRENE, sous la double égide de l'ENPC et de l'ENGREF. La recherche universitaire en hydrologie urbaine commence à se développer. En parallèle des bureaux d'études (SOGREAH, Sauveterre, Hydratech, ...) développent des recherches finalisées ainsi que des outils, en particulier des logiciels de calcul. Plusieurs services décentralisés de l’État (CETE d'Aix en Provence ou de Bordeaux, LCPC, ...) commencent également à s'intéresser à la problématique. Cette effervescence est activée par la mise en place du plan urbain géré par la DEU et par le fonctionnement de nombreux groupes de travail qui permettent à l'ensemble des acteurs de se rencontrer et de partager leurs expériences.
 
  
 
===Développement (1980-1995)===
 
===Développement (1980-1995)===

Version du 13 juin 2020 à 09:30

Traduction anglaise  : Urban hydrology, research on urban drainage

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Dernière mise à jour : 13/6/2020

Discipline scientifique pluridisciplinaire de l'environnement se donnant pour objet l'étude de l'eau et de ses relations avec les différentes activités humaines en zone urbaine.

L'hydrologie urbaine traite tout particulièrement des relations entre la gestion des eaux de surface et l'aménagement de l'espace en milieu urbain. Les recherches finalisées développées dans son champ se nourrissent des interactions permanentes qu'elle entretient avec les aspects techniques ou organisationnels des activités liées à l’assainissement, ainsi qu’avec des sciences connexes, qu’elles soient formelles, expérimentales, de la nature ou humaines et sociales.

Sommaire

Domaine d'application et spécificité

Limites du domaine d'étude

L'hydrologie urbaine s'intéresse à la partie du cycle de l'eau affectée par l'urbanisation ou affectant le fonctionnement de la ville : infiltration de l'eau dans les sols et fonctionnement des nappes, ruissellement des eaux en surface et écoulements dans des biefs naturels (rivières) ou artificiels (canaux, conduites souterraines), évacuation et épuration des eaux usées, etc.. Le traitement et la distribution de l'eau potable, même s'ils sont indubitablement liés à la gestion urbaine de l'eau, ne sont cependant généralement pas rattachés au champ de l'hydrologie urbaine.

L'hydrologie urbaine s'est constituée en domaine spécifique (voir § Historique) pour mieux adapter ses méthodes aux particularités des espaces urbains :

  • faibles dimensions des bassins versants, et par conséquence particularités des pluies critiques (pluies courtes et violentes liées à des phénomènes convectifs) ;
  • forte imperméabilisation des sols en zone urbaine qui modifie la nature du ruissellement quantitativement (diminution des pertes à l'écoulement, accélération du mouvement de l'eau) et qualitativement (modification de la nature des polluants entraînés par l'eau) ;
  • caractère souvent artificialisé du réseau hydrographique ;
  • grande vulnérabilité des espaces urbains face au risque d'inondation et importance des enjeux financiers, environnementaux et sociaux ;
  • modification de la perception et des usages de l'eau ;
  • évolution rapide de l'occupation des sols limitant les possibilités d'utilisation de méthodes statistiques fondées sur l'observation du passé pour prédire l'avenir.

Limites de l'article

Nous avons choisi, de façon sans doute un peu artificielle, de limiter le cadre de ce mot à la dimension recherche. Les aspects opérationnels sont traités dans d'autres mots comme Assainissement (HU), Assainissement pluvial (HU), Gestion intégrée des eaux pluviales (HU), etc.. Les deux distinctions fortes faites entre recherche finalisées et développements opérationnels sont les suivantes :

  • Les chercheurs développent des modèles cognitifs qui visent à expliquer le fonctionnement du système étudié alors que les opérationnels ont besoin de modèles prévisionnels (qui permettent de prévoir la façon dont une modification du système étudié va modifier son fonctionnement), et décisionnels (qui permettent de prévoir quelles modifications il faut apporter au système pour modifier son fonctionnement d'une certaine façon).
  • La recherche ne tient jamais rien pour acquis ; un (bon) chercheur passe son temps à essayer de démontrer que ses modèles sont faux (ou plutôt insuffisants). Un opérationnel a besoin d'éléments pour l'action et doit s'appuyer sur des éléments de connaissances qu'il est obligé de considérer comme acquis au moment où il agit.

Éléments d'historique

Comme nous l'avons évoqué dans l'introduction, l'hydrologie urbaine est indissociable de l'une des plus significatives manifestations de l'activité humaine amorcée à la fin du 19ème siècle dans les pays industrialisés : l'urbanisation. Elle est née avec la première révolution industrielle et la découverte des problèmes épidémiologiques posés par la concentration d'individus dans un espace limité, la ville.

Genèse ( - 1970)

A la fin du XIXème siècle, l'assainissement des agglomérations était considéré comme une technique d'infrastructure urbaine, relevant principalement du Génie civil. Certes des hommes comme Belgrand en France, qui avait auparavant beaucoup travaillé sur la prévision des crues de la Seine, Kuilching (1889) aux Etats-Unis, Burkli-Ziegler (1880) en Suisse, Lloyd-Davis (1906) au Royaume Uni, ont jeté, dans leurs pays respectifs, les bases d'une approche scientifique du cycle de l'eau en milieu urbain. Leurs analyses sont cependant restées assez confidentielles, malgré des échanges internationaux, et souvent transformées en règles simples d'ingénierie masquant fortement la complexité des mécanismes hydrologiques urbains. Durant toute la première moitié du XXème siècle, les ingénieurs des pays industrialisés ont consacré beaucoup d'énergie à la production de guides et de normes techniques, dont certains ont connu un retentissement international comme les ouvrages de Metcalf et Eddy aux Etats-Unis ou de Karl Imhoff en Allemagne.

En France, cette période de normalisation a été marquée par la production de la Circulaire Générale 1333 de 1949, qui a constitué la référence technique essentielle jusqu'à la date de sa révision en 1977. Ce document a introduit, en particulier, une approche originale du calcul des apports pluviaux urbains due à l'Académicien des Sciences Albert Caquot, initiée en 1941. A la fin des années 1950, la révolution des modes de production agricole, et la croissance de la production industrielle ont entraîné une nouvelle explosion de la démographie urbaine des pays industrialisés. L'urgence de bâtir et l’appauvrissement technique des services publics a souvent limité la réflexion sur les conséquences de l'urbanisation sur le cycle de l'eau. A la fin des années 1960 ces conséquences sont devenues évidentes un peu partout, et avec elles leur cortège de nuisances de tous ordres : inondations fréquentes par des eaux de ruissellement, dysfonctionnements récurrents des ouvrages de collecte, de transport et de traitement, pollutions graves des milieux récepteurs fragiles.

Cette situation a ainsi été à l'origine de l'émergence de l'hydrologie urbaine en tant que discipline scientifique et technique.

Structuration (1970-1981)

Structuration internationale

Le premier programme national de recherche important en hydrologie urbaine a été développé aux USA, à l’initiative de l’American Society of Civil Engineers (ASCE, 1968) et son Directeur Murray Mc Pherson, avec le soutien de divers organismes dont la Fondation Nationale pour la Science (US NSF), et de l’Agence fédérale pour l’environnement (Environmental Protection Agency / EPA). Ce programme a attiré de nombreux chercheurs américains. Les résultats de leurs travaux, publiés au début des années 1970 dans des revues scientifiques internationales ou par l’EPA, allaient créer un grand intérêt et une certaine émulation, notamment dans les pays industrialisés, où se retrouvait souvent une similitude dans la difficulté des relations entre la ville et le cycle de l’eau. Cela a favorisé l’expression des besoins d’approfondissement des connaissances et de renouveau des principes d’ingénierie. Dans plusieurs pays, dont la France, des initiatives souvent encore ponctuelles et la lecture de la documentation diffusée par l’EPA ont favorisé une certaine dynamique de recherche. Mais cette dynamique ne pouvait trouver son plein épanouissement que dans la confrontation internationale des travaux entrepris.

Murray Mc Pherson a consacré beaucoup de son énergie pour mener à bien un des volets du programme américain qui concernait l’inventaire des potentialités internationales de recherches en Hydrologie Urbaine. Ses très grandes qualités humaines lui ont permis d’aller bien au-delà d’un simple inventaire. Murray a rendu visite à de nombreux chercheurs, européens en particulier, et, par les contacts qu’il a fait naître entre ces personnes assez isolées jusque-là, a favorisé leur organisation mondiale. Pour améliorer l’efficacité de son action, Murray a fusionné le volet international du programme de l’ASCE et les activités du groupe de travail de l’UNESCO créé dans le cadre de la décennie hydrologique internationale (1964-1974). Une première réunion internationale a été organisée en 1973 avec le concours de l’Association Internationale des Sciences Hydrologiques (ASCE, 1974 ; UNESCO, 1974).

Par la suite, Murray Mc Pherson a jugé plus efficace de procéder à des réunions d’experts internationaux chargés de faire le point des recherches en hydrologie urbaine dans leurs pays respectifs (Desbordes et Normand, 1976 ; UNESCO, 1977 ; UNESCO, 1978 ; ASCE, 1979 ; Delleur et Torno, 1983). Murray a été assisté, dans cette activité, par Harry C. Torno, fonctionnaire de l’US American Protection Agency (localisée dans l’immeuble du Water Gate à Washington!). Les contacts établis à l’occasion de ces réunions et les échanges d’informations auxquels elles ont donné lieu ont été décisifs pour le regroupement mondial des chercheurs en hydrologie urbaine.

Parallèlement aux actions de l’ASCE, l’Université de Southampton (GB) a organisé en 1978 la première conférence internationale entièrement consacrée à l’hydrologie urbaine (Helliwell, 1978). C’est au cours de cette conférence que de nombreux chercheurs, à l’initiative du Professeur Ben C. Yen, de l’Université d’Illinois, ont émis l’hypothèse d’une structuration plus formelle de leurs activités. Cela a été réalisé en 1981 à la faveur d’une conférence internationale organisée par Ben à l’Université d’Illinois à Urbana (USA), à l’issue de laquelle a été créé le Comité Joint sur l’Hydrologie Urbaine (Joint Committee on Urban Storm Drainage (JCUSD)), parrainé par deux association scientifiques internationales : l’Association Internationale de Recherches Hydrauliques (AIRH/IAHR) et l’Association Internationale sur la Pollution des Eaux et son Contrôle (AIRPEC/IAWPRC), devenue depuis l’Association Internationale sur la Qualité des Eaux (IAQE/IAWQ), puis l'IWA (International Water Association).

Structuration nationale

En 1973, l'ingénieur Général Loriferne est mandaté pour mettre en place une commission chargée de rédiger une nouvelle Instruction Technique destinée à remplacer la circulaire CG 1333. Les travaux de cette commission vont principalement s'appuyer sur deux éléments antécédents qui vont largement alimenter les débats :

  • La mise en place, dès 1968, de bassins versants expérimentaux de quelques dizaines d'hectares. Cette expérimentation, initiée par Michel Affholder, directeur de la première Division des Équipements Urbains (chargée, au Ministère de la Reconstruction puis de l’Equipement, en particulier de suivre la bonne mise en œuvre de la CG 1333 de 1949), va fournir les données indispensables à l'étude des phénomènes hydrologiques urbains.
  • L'analyse de ces données, principalement par Michel Desbordes.

En 1974, Michel Desbordes (Desbordes, 1974) soutient sa thèse de docteur-ingénieur et créé la première équipe française de recherche dans le domaine, au Laboratoire d'Hydrologie Mathématique (LHM) de Montpellier.

En parallèle, dans le tout jeune département de Seine-Saint-Denis, une équipe très dynamique et interdisciplinaire, avec notamment Jacques Rousset, Jacques Marchand, Jean-Claude Deutsch, Claire Cogez et Francis Calvet, s’est lancée en 1972 dans de multiples études et expérimentations innovantes pour relever les défis imposés par le décalage entre d’une part l’urbanisation massive et très rapide de ce territoire et les fortes contraintes physiques (topographie générale très plate) et, d’autre part, les limites du réseau d’assainissement en place ou des capacités financières du Conseil général.

En juillet 1976, la Direction de l’Aménagement Foncier et de l’Urbanisme du Ministère chargé de l’Équipement créé le Service technique de l'urbanisme (STU) et en particulier une nouvelle Division des Équipements urbains (DEU) qui va jouer un rôle décisif dans le développement et l'organisation de l'hydrologie urbaine en France. Un voyage d’étude assez marquant aux Etats-Unis est organisé par l’Agence financière de bassin Artois-Picardie avec le Bureau d’études Coyne et Bellier, regroupant une trentaine d’ingénieurs ou de chercheurs des administrations, de bureaux d’études et de l’Université.

L'année suivante l'Instruction technique relative à l'assainissement des agglomérations est publiée. Elle ouvre la possibilité d’utiliser des outils nouveaux pour le dimensionnement des bassins de retenue ou des modèles, et appuie, dans ses préconisations, le développement des recherches en hydrologie urbaine.

En 1978, Bernard Chocat soutient sa thèse de doctorat (Chocat, 1978) et crée à l'INSA de Lyon une deuxième équipe de recherche française au sein du laboratoire Méthodes. En 1980 est également créé le CERGRENE, sous la double égide de l'ENPC et de l'ENGREF. La recherche universitaire en hydrologie urbaine commence à prendre un peu plus d’ampleur.

En parallèle des bureaux d'études (SOGREAH, Sauveterre, Hydratech, ...) développent des recherches finalisées qui débouchent sur des outils opérationnels, en particulier des logiciels de modélisation des écoulements et de dimensionnement des réseaux : dès 1972 pour CAREDAS de SOGREAH, puis HYDRA de Hydratech, et RERAM, développé au Centre d’études techniques de l’Equipement (CETE) d’Aix-en-Provence sur la base des modèles établis dans sa thèse par Michel Desbordes, et SERAIL puis CEDRE, développé par l’INSA de Lyon sur la base de la thèse de Bernard Chocat. Plus tard, le logiciel CANOE fusionnera les acquis de CEDRE et de CAREDAS.

Plusieurs services techniques de l’État (Laboratoire régional - des Ponts et Chaussées - de l’Ouest parisien (LROP) à Trappes, CETE d'Aix en Provence ou de Bordeaux, Laboratoire Central des Ponts et Chaussées (LCPC), ou dépendant d’autres structures, comme le Centre d'expertise du bâtiment et des travaux publics (CEBTP), ont également commencé à s'intéresser à la problématique. Cette effervescence a été animée et soutenue financièrement par le STU et sa DEU qui, de plus, a mis en réseau ces divers organismes grâce à de nombreux groupes de travail permettant à l'ensemble des acteurs de se rencontrer, et de partager leurs expériences ou les orientations à préconiser. De nombreux guides techniques et documents de référence ont été élaborés et publiés. Des expérimentations et opérations de démonstration ont été réalisées. Des recherches plus lourdes ont été entreprises, en particulier la campagne nationale de caractérisation de la pollution des rejets urbains de temps de pluie sur quatre bassins versants expérimentaux, pilotée par le STU, puis soutenue par le Plan Urbain dans le cadre de son programme de recherches sur l’Eau et la Ville. C’est aussi durant cette période que la notion de « technique alternative au tout réseau » a vu le jour, avec comme premières références : les bassins de de rétention des eaux de temps de pluie des bassins, qui auront vite connu un assez grand succès et auront été déclinés en une multiplicité de configuration ; et les chaussées poreuses, expérimentées en affrontant bien des résistances et dont les applications resteront relativement cantonnées, mais qui auront pu servir de base à diverses transpositions.


Développement (1980-1995)

La mise en place du JCUSD en 1981 a permis de structurer la discipline au niveau international. En France, en 1982 est également créé une section hydrologie urbaine au sein de la Société Hydrotechnique de France (SHF). Cette section va également jouer un rôle important de dissémination des connaissances en organisant plusieurs conférences aux noms généralement évocateurs ("Orages aux déversoirs", "L'eau sous la ville, la ville sous l'eau, l'eau, la ville et les sous", ...) qui réuniront chaque fois un nombreux public. En parallèle des recherches au niveau national sont entreprises. Citons la campagne nationale de caractérisation de la pollution des rejets urbains de temps de pluie sur quatre bassins versants, pilotée par le STU et le programme de recherches sur l’Eau et la Ville du Plan Urbain. Dans la deuxième moitié des années 1980 l'ASTEE créé également un groupe de travail "Assainissement pluvial" qui va en particulier travailler sous l'animation de P.Valiron et J.P. Tabuchi à la rédaction d'un ouvrage sur la maîtrise de la pollution des rejets urbains de temps de pluie (Valiron et Tabuchi, 1992). La section hydrologie urbaine et ce groupe de travail fusionneront avant la fin de la décennie, constituant ainsi un groupe national équivalent en quelque sorte au JCUSD (la SHF est le correspondant français de l'IAHR et l'ASTEE celui del'IWA).

Au début des années 1980, les lois de décentralisation limitent le rôle de l’État an matière d'assainissement, et Jean Claude Deutsch milite pour la création de Groupes d'Action Régionaux (GAR) pour poursuivre l'action d'animation entreprise par la DEU. Finalement, 7 GAR sont créés, qui auront des évolutions diverses. Le GAR de la Région Rhône-Alpes, qui va s’appeler le GRAIE, va connaitre une grande réussite. En 1987 l'association Eurydice 92 est créée et en 1989 paraît le "Memento sur l'évacuation des eaux pluviales urbaines" (Deutsch et al, 1989) qui peut être considéré comme la première production d'Eurydice tant la composition du groupe de travail est voisine de celle des membres fondateurs de l'association.

Au niveau international le JCUSD se développe, avec une présence française permanente (Michel Desbordes de 1981 à 1987, puis Jean Claude Hemain de 1987 à 1993, puis Bernard Chocat à partir de 1993). Les ICUSD continuent à être organisés tous les trois ans et les acteurs français (GRAIE, Eurydice) déposent une candidature pour 1991. C'est finalement l'Allemagne qui est choisie pour organiser cette conférence, mais le JCUSD propose au GRAIE et à Eurydice d'organiser une conférence thématique. C'est ainsi que naissent les conférences Novatech à partir de 1992.


Maturité (1995-2020)

Au niveau international le JCUSD est désormais bien installé. Il anime de très nombreux groupes de travail sur des thématiques qui ne cesse de se diversifier. Une évolution géographique sensible se dessine. Les États Unis sont désormais en retrait, l'Europe constitue le centre de recherche le plus actif, des équipes fortes et structurées de développent en Australie et en Asie, et en particulier au Japon. Au vu de ces évolutions, le JCUSD décide de changer de nom et d'abandonner le S de Storm. Il apparaît en effet clairement que ce n'est pas uniquement les périodes de pluie intense qui concernent l'hydrologie urbaine, mais que celle-ci doit s'intéresser à toutes les conditions climatiques possibles ainsi qu'à leur succession. Cette idée sera reprise dans le guide technique "la ville et son assainissement" publié en 2003 après 5 ans de travail et qui introduira la notion de niveau de service à fournir en fonction de la situation pluviométrique.

En 1996 paraît, sous l'égide du JCUD un numéro spécial de "Journal of Hydraulics Research" (Ellis and Marsalek, 1996) qui fait le point sur l'état des connaissances scientifiques sur le domaine.

L'année suivante, en France, est publiée l'encyclopédie de l'hydrologie urbaine et de l'assainissement, rédigée par l'association Eurydice (Chocat et al, 1997). Ce document sera ultérieurement largement réutilisé et valorisé sous la forme d'un glossaire international (Ellis et al, 2004), essentiellement destiné à faciliter les échanges entre les chercheurs de différents pays.

En France, la recherche commence à se structurer de façon différente autour d'observatoires (OPUR à Paris, OTHU à Lyon, ONEVU à Nantes) qui fédèrent des spécialités de plus en plus nombreuses autour des hydrologues (météorologues, chimistes, biochimistes, géographes, microbiologistes, etc., mais aussi sciences humaines et sociales.) et qui permettent d'acquérir des données sur des durées beaucoup plus longues.

L'hydrologie urbaine scientifique est aujourd'hui devenue une discipline mature qui va bien au delà de la vision hydraulique qui a présidé à sa création 50 ans plus tôt.

Enjeux actuels de l'hydrologie urbaine

à developper


Bibliographie

  • ASCE (1968) : Systematic study and development of long range program of urban water resources research ; ASCE ; New York ; 651 p.
  • ASCE (1974) : Report on International Worshop on the hydrological effects of urbanization ; Warsaw 1973 to the National Science Foundation ; ASCE New York ; 61 p.
  • ASCE (1979) : International Symposium on urban hydrology ; Washington june 1979 ; Technical Memorandum n° 38 ; ASCE New York ; 140 p.
  • Chocat, B. (1978) : Un modèle de simulation des écoulements dans les réseaux d'assainissement pluvial ; thèse Docteur ingénieur ; INSA Lyon ; 304p.
  • Chocat, B. (coord.) et Eurydice (1997) : Encyclopédie de l'hydrologie urbaine et de l'assainissement ; ed. Tec et Doc ; Lavoisier ; Paris (épuisé) ; 1124p.
  • Delleur, J. W., Torno, H. C., ed. (1983) : Proceedings of International Symposium on Urban Hydrology ; Baltimore (USA) ; may 1983 ; ASCE ; New York ; 261 p.
  • Desbordes, M. (1974) : Réflexions sur les méthodes de calcul des réseaux urbains d'assainissement ; thèse Docteur ingénieur ; Université des Sciences et Techniques du Languedoc ; Montpellier ; 171 p.
  • Desbordes, M, Normand, D. (1976) : Urban hydrological modeling and catchment research in France ; Technical Memorandum IHP-8 ; ASCE ; New York ; 58 p.
  • Deutsch, J.C. (coord.) et Groupe de Travail du STU (1989) : Mémento sur l'évacuation des eaux pluviales ; La documentation française ; Paris ; 349 p.
  • Ellis, J.B., Chocat, B., Fujita, S. Marsalek, J., Rauch, W. (2004) : Urban Drainage: A Multilingual Glossary ; IWA Publishing.
  • Ellis, J.B. and Marsalek, J. (1996) : Overview of urban drainage: environmental impacts and concerns, means of mitigation and implementation policies ; Journal of Hydraulics Research ; Vol 34 ; N°6.
  • Helliwel, P. R. (1978) : Urban Storm Drainage ; Pentech Press ; London (GB) ; 728 p.
  • UNESCO, ed. (1974) : Hydrological effects of urbanization, studies and reports in Hydrology ; n° 18 ; UNESCO Press ; Paris ; 280 p.
  • Valiron, F., Tabuchi, J.-P. (1992) : Maîtrise de la pollution urbaine par temps de pluie ; ed. Tec et Doc ; Lavoisier ; Paris (épuisé).

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