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Diagramme de Shields (HU)

De Wikhydro

Traduction anglaise : Shields diagram

Dernière mise à jour : 24/10/2023

Diagramme permettant de calculer le seuil de mise en mouvement d’une particule dans un écoulement liquide et qui sert encore de base à la plupart des calculs de contrainte critique d'entraînement.

Sommaire

Éléments d'historique

La première version du "diagramme de Shields" (voir figure 1) a été construit par Shields (1936) en utilisant des données expérimentales acquises en laboratoire par l’auteur ainsi que des données expérimentales publiées antérieurement par Gilbert (1914), Kramer (1932) et Casey (1935), ainsi que rapporté par Kennedy (1995).


Figure 1 : Diagramme originel de Shields ; Source : Shield (1936).

Les tribulations de Shields entre les États-Unis et l’Allemagne des années 1930 où il mena, non sans difficulté, ses travaux en transport solide, son retour aux États-Unis, son pays d’origine, pour une carrière d’ingénieur dans l’industrie, puis le grand succès des résultats de son travail de doctorat, notamment du fait de Hunter Rouse (1950), ont contribué à la renommée voire à la "légende" d'Albert Shields (Kennedy, 1995 ; Buffington, 1999).

En tout état de cause, son approche sert encore de base à la plupart des calculs de contrainte critique pour la mise en mouvement des particules au fond d'un canal, d'une rivière ou d'une conduite.

Présentation du diagramme de Shields

Mode de construction du diagramme de Shields

Le diagramme de Shields repose sur l'utilisation de 3 nombres sans dimension (voir Contrainte critique d’entrainement (HU)) :

  • le rapport des masses volumiques : $ ρ* $ (relation (1)) ;
  • le nombre de Reynolds particulaire : $ Re_* $ (relation (2)) ;
  • la contrainte adimensionnelle de cisaillement ou nombre de Shields : $ θ $ (relation (3)).


$ ρ* = \frac{ρ_s-ρ}{ρ}\qquad (1) $


$ Re_* = \frac{ρ.u_*d}{μ}= \frac{ρ^{1/2}.τ_w^{1/2}.d}{μ}\qquad (2) $


$ θ = \frac{ρ.u_*^2}{(ρ_s-ρ).g.d}= \frac{ρ*.u_*^2}{g.d}= \frac{τ_w}{(ρ_s-ρ).g.d}\qquad (3) $


Avec :

  • $ τ_w $ : contrainte de cisaillement près du fond ou des parois (N/m2),
  • $ d $ : dimension caractéristique des particules (m),
  • $ ρ $ : masse volumique du fluide (kg/m3),
  • $ ρ_s $ : masse volumique des particules (kg/m3),
  • $ g $ : accélération gravitationnelle (m/s2),
  • $ u_* $ : vitesse de frottement (m/s),
  • $ μ $ : viscosité dynamique (kg/m/s).

Il représente graphiquement l'évolution de la contrainte adimensionnelle critique d'entraînement, $ θ $, en fonction du nombre de Reynolds particulaire, $ Re_* $, (figure 2).


Figure 2 : Diagramme de Shields ; Source : Buffington (1999)

Les différents points expérimentaux correspondent à différents types de matériaux dont les rapports de masses volumiques varient entre 0,06 et 3,3 (Buffington et Montgomery, 1997). Les matériaux utilisés présentaient des granulométries peu étendues caractérisées par leur diamètre médian $ d_{50} $.

Analyse du diagramme de Shields

Ce diagramme met en évidence une bande qui correspond à la mise en mouvement. En dessous de cette bande, les particules sont immobiles ; au-dessus, les particules sont en mouvement, ce qui contribue à la génération d’un débit solide. Cette bande de mise en mouvement est indépendante du rapport des masses volumiques. Seuls le nombre de Reynolds particulaire et la contrainte de Shields sont ainsi des variables d’influence de la mise en mouvement.

Même si on parle souvent de la "courbe" de Shields, il faut bien se rendre compte que Shields lui-même a présenté cette zone de mise en mouvement comme une bande et non pas comme une courbe (voir figure 1). L’utilisation d’échelles logarithmiques en abscisse et en ordonnée illustre d’ailleurs l’étendue de cette zone de mise en mouvement. Il est donc extrêmement important de garder à l’esprit que la mise en mouvement d’une particule dans un écoulement est un phénomène présentant un caractère statistique, ceci du fait de la turbulence de l’écoulement d’une part, et de l’arrangement de la particule au sein des autres particules constituant le fond d’autre part.

Si l'on s’intéresse à la forme de cette zone de mise en mouvement, on constate que pour de faibles valeurs de nombre de Reynolds particulaire, la contrainte adimensionnelle de mise en mouvement décroît avec le nombre de Reynolds. La contrainte adimensionnelle minimale (aux environs de 0,03 – 0,04) est atteinte pour un nombre de Reynolds d’environ 10 à 20. Au-delà, la contrainte adimensionnelle augmente à nouveau pour atteindre des valeurs allant jusqu’à environ 0,06 pour un nombre de Reynolds de 500.

Dans sa forme, le diagramme de Shields est similaire au diagramme de Moody et Stanton obtenu pour une rugosité homogène : ce diagramme, qui représente le coefficient de rugosité en fonction du nombre de Reynolds et de la rugosité relative, présente une diminution pour de faibles nombres de Reynolds (régime turbulent lisse), une zone présentant un minimum (régime de transition) puis un pallier horizontal (régime turbulent rugueux). Par analogie avec le régime turbulent rugueux, une courbe asymptotique est souvent représentée sur le diagramme de Shields pour de grandes valeurs du nombre de Reynolds particulaire. Par analogie entre le nombre de Reynolds et le nombre de Reynolds particulaire, on parle d’ailleurs également de régime lisse, de régime de transition et de régime rugueux sur le diagramme de Shields (voir figure 2).

Toujours sur la forme, en regardant de façon un peu plus globale que précédemment, on peut se rendre compte qu’au-delà d’un nombre de Reynolds particulaire d’environ 1, la contrainte adimensionnelle seuil varie très peu. La contrainte seuil reste en effet voisine de la valeur 0,05 quelle que soit le nombre de Reynolds particulaire. Ce constat a conduit au fait que la contrainte de cisaillement adimensionnelle est souvent la seule variable considérée pour décrire la mise en mouvement.

Réécriture du seuil de mise en mouvement à partir du diamètre adimensionnel

Dans sa forme originelle, présentée plus haut, l'utilisation du diagramme de Shields n'est pas directe. En effet la contrainte de cisaillement (ou la vitesse de frottement) apparaît à la fois dans l'abscisse et dans l'ordonnée du diagramme. Afin de la simplifier, plusieurs auteurs ont proposé des expressions permettant de calculer la contrainte seuil de mise en mouvement en fonction uniquement des caractéristiques des particules et du fluide.

Yalin (1977) a ainsi proposé l’utilisation d'un nombre sans dimension différent : le diamètre adimensionnel $ d_* $ qui s’obtient par combinaison de la contrainte adimensionnelle et du nombre de Reynolds particulaire (relation (4)). L’intérêt de cette variable adimensionnelle est qu’elle est indépendante de la contrainte de cisaillement et donc indépendante de l’écoulement (figure 3).


$ d_* = \left[\frac{Re_*}{θ}\right]^{1/3} = d\left[\frac{ρ.g.(ρ_s-ρ)}{μ^2}\right]^{1/3}\qquad (4) $


Figure 3 : Diagramme de Shields-Yalin ; Source : Van Rijn (1984a).

Les expressions analytiques approchées qui permettent le calcul direct de la contrainte adimensionnelle de cisaillement en fonction du diamètre adimensionnel, peu lisibles sur la figure 3, sont reprises dans le tableau de la figure 4.


Figure 3 : Formules approchées permettant le calcul de la contrainte adimensionnelle de cisaillement en fonction du diamètre adimensionnel.

Principes de construction

Les travaux expérimentaux de Shields (1936) servent encore de base à la plupart des calculs de contrainte critique pour la mise en mouvement des particules au fond d'un canal, d'une rivière ou d'une conduite. Le critère de Shields permet par exemple de calculer le frottement critique dans le cas d’un écoulement permanent, sur un fond plat horizontal.

Nous utiliserons ici la représentation modifiée par Yalin (1977), plus facile à utiliser (Figure 1). Ce diagramme permet de calculer la valeur d'une tension adimensionnelle de frottement critique $ τ_* $ en fonction d'un diamètre adimensionnel de particule $ d_* $.


Figure 1 : Diagramme de Shields-Yalin.

$ τ_* $ et $ d_* $ s'expriment de la façon suivante :


$ d_*=d.\left(\frac{ρ_s-ρ}{ρ}.\frac{g}{ν^2}\right)^{1/3} $


$ τ_*=\frac{ρ_s-ρ}{ρ}.\frac{R_h.J}{d} $


Avec :

  • $ ρ $ : masse volumique de l'eau (kg/m3) ;
  • $ ρ_s $ : masse volumique de la particule (kg/m3) ;
  • $ ν $ : viscosité cinématique de l'eau (m2/s) ;
  • $ R_h $ : rayon hydraulique de l'écoulement (m) ;
  • $ d $ : diamètre de la particule (m) ;
  • $ g $ : accélération de la pesanteur (m/s2) ;
  • $ J $ : Pente de la ligne d'énergie (m/m).

Nota : Le rapport moyen entre la masse volumique moyenne des sables et celle de l'eau et de l'ordre de 2,6 et la viscosité cinématique de l'eau est de l'ordre de 1,3.10-6, la valeur de $ d_* $ est donc de l'ordre de :


$ d_*=21 000.d $


Bibliographie :

  • Buffington, J. (1999) : The legend of A. F. Shields ; Journal of Hydraulic Engineering ; 125(4) ; p.376-387.
  • Buffington, J., Montgomery, D. (1997) : A systematic analysis of eight decades of incipient motion studies, with special reference to gravel-bedded rivers ; Water Resources Research ; 33(8) ; p.1993-2029.
  • Garcia, M. (2008) : Sedimentation engineering : processes, management, modeling and practice ; ASCE.
  • Kennedy, J. (1995) : The Albert Shields story ; Journal of Hydraulic Engineering ; 121(11), p.766-772.
  • Rouse, H. (1950) : Engineering hydraulics ; John Wiley & Sons.
  • Shields, A. (1936) : Application of Similarity Principles and Turbulence Research to Bed-Load Movement. California Institute of Technology, Pasadena (Translate from German).
  • Shvidchenko, A., Pender, G. (2000) : Flume study of the effect of relative depth on the incipient motion of coarse uniform sediments ; Water Resources Research ; 36(2) ; p.619-628.
  • Van Rijn, L. (1984a) : Sediment transport, part I: bed load transport ; Journal of Hydraulic Engineering ; 110(10) ; p.1431-1455.
  • Van Rijn, L. (1984b) : Sediment transport, part II: suspended load transport ; Journal of Hydraulic Engineering ; 110(11) ; p.1613-1638.
  • Yalin, M.S. (1977) : Mechanics of sediment transport. 2nd ed. Pergamon Press, Oxford, UK. 360 pp

Pour en savoir plus :

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