S'abonner à un flux RSS
 

B.22 - Sols gelés

De Wikhydro
Version du 4 septembre 2014 à 11:26 par Adeline Bordais (discuter | contributions)

(diff) ← Version précédente | Voir la version courante (diff) | Version suivante → (diff)

Sommaire

Le phénomène de sols gelés en hydrologie

Introduction

L'influence du gel des sols sur l'infiltration et le ruissellement est un phénomène connu, mais relativement peu détecté et assez mal quantifié. Il joue principalement sur le ruissellement des précipitations, et il faut d'ailleurs d'emblée différencier deux processus :

  • l'augmentation de la part ruisselée des précipitations tombant sur sols gelés, le gel des sols limitant alors fortement sa capacité d'infiltration ;
  • les apports hydrologiques supplémentaires générés lors du dégel de la partie gelée des sols (de la même manière que la fonte nivale).

Il peut être difficile de différencier dans les faits ces deux processus puisqu'ils peuvent facilement être simultanés (redoux et pluie suite à une période de gel) et engendrer les mêmes effets (augmentation des volumes écoulés). Dans la suite, on aura donc tendance, faute de mieux, à faire l’amalgame entre les deux...

La présence de neige n'est pas nécessaire au gel des sols, on s'intéresse ici justement au ruissellement sur sols gelés non enneigés.

Causes

Une période de températures négatives peut entraîner un gel progressif des couches supérieures du sol. Cette descente de l'isotherme 0 °C dans le sol dépend de nombreux facteurs (intensité du froid, durée du froid, ensoleillement, type de sols, couvert végétal, teneur en eau et indice des vides du sol , etc.).

Toujours est-il que, d'après la littérature, on estime la progression du gel pour des régions de plaine et avec des périodes de froid classiques pour les hivers en France métropolitaine, à quelques centimètres par jour, et que le gel des sols s'arrête à quelques dizaines de cm de profondeur (on peut atteindre de valeurs bien plus fortes dans des régions au climat plus extrême).


Inc167.bmp


Conséquences

Lors d'une phase de gel des sols, l'eau contenue dans le sol gèle progressivement, ce qui a pour conséquence de diminuer fortement la capacité d'infiltration des sols.

La première pluie qui succède à la période de gel va donc tomber sur un sol n'ayant pas eu le temps de dégeler (ou alors uniquement en surface, ce qui est insuffisant pour permettre au sol de retrouver une capacité d'infiltration) et va engendrer un ruissellement qui sera nettement supérieur à celui du même sol non gelé. C'est également à ce moment qu'une partie de l'eau contenue sous forme de glace dans le sol peut dégeler et contribuer au ruissellement, augmentant encore le coefficient de ruissellement apparent.

Exemple 1 : la crue de janvier 1910 sur le bassin de la Seine. Cette crue historique, d'après les écrits de l'époque et les études hydrologiques réalisées, a très probablement eu lieu alors que les sols étaient gelés sur au moins une partie du bassin au début de la crue (de nombreux jours de gel sont recensés entre novembre et janvier), en plus d'avoir été copieusement arrosés à l'automne et au début de l'hiver. Cela se traduit concrètement dans les études de cette crue, mais apparaît également comme la seule explication au comportement hydrologique particulier de cette crue.

Le premier épisode de pluies générateur de la crue (17-20 janvier) est vraisemblablement tombé sur des sols gelés, engendrant un comportement hydrologique atypique. C'est par exemple le cas sur les bassins du Loing et de la Seine amont (territoires ruraux, avec peu de relief, et habituellement assez peu réactifs), qui ont certes reçu des précipitations importantes, mais qui connaissent en janvier 1910 des crues d'une importance et d'une rapidité sans commune mesure avec toutes les autres crues connues, y compris d'autres crues historiques importantes.

Même si son calcul est très délicat en raison de l'imprécision sur l'estimation des débits et des pluies, on aurait vraisemblablement, pour la crue de 1910 un rapport entre la lame d'eau écoulée (LEE) et la lame d'eau précipitée (LEP) proche de 65 % sur le bassin de la Seine à Paris. À titre de comparaison, pour la crue de mars 2001 (la dernière crue significative observée à Paris, de période de retour de l'ordre de 5 à 10 ans, à l'issue d'une année hydrologique ayant battu des records de pluviométrie), on a un rapport LEE/LEP de l'ordre de 55 %.

Exemple 2 : la crue de décembre 2001 dans le nord est de la France. Cette crue plus récente s'est déroulée après une vague de froid très intense (et presque historique). D'après le bilan mensuel de décembre 2001 de Météo-France, la vague de froid a duré du 7 au 27 décembre, avec des températures atteignant fréquemment -10°C le matin et ne dépassant que rarement 0°C l'après midi en plaine. Entre le 14 et le 27, quasiment aucun dégel diurne ne se produit dans l'est et le sud du pays, les températures restant négatives même la journée. Pendant cette période, les précipitations sont faibles, ce qui signifie que sans gel des sols, les sols auraient du être relativement secs pour la saison.

Des pluies importantes se produisent le 28 et le 29 décembre sur le nord est du pays, alors que les températures viennent tout juste de redevenir positives. Sur bon nombre de bassins de ces régions, on observe de fortes crues, de surcroît très rapides, y compris sur des bassins habituellement peu réactifs, liées à un ruissellement anormalement élevé du fait des sols gelés (Fig. 2 et 3).


Inc168.bmp


Le tableau 1 donne les rapports LEE/LEP indicatifs sur plusieurs sous-bassins du SPC SmYL pour la crue de décembre 2001 et la crue de mars 2001. Malgré une humidité initiale des sols relativement peu élevée, la crue de décembre 2001 a engendré de manière générale un ruissellement aussi important que la crue de mars 2001 (qui s'était produite dans des conditions d'humidité initiale des sols très importante), voire encore supérieur pour certains bassins.


Inc169.bmp

Outils personnels