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Modèle réduit (HU)

De Wikhydro

Traduction anglaise : Scale model

Dernière mise à jour : 16/04/2024

Modèle physique, construit à une échelle inférieure à 1 (généralement entre 1/10 et 1/100), dans le but d'étudier certains aspects du comportement d'un système complexe ; les modèles réduits sont couramment utilisés en hydraulique pour représenter les écoulements d'eau et le transport solide (voir figure 1).

Sommaire

Conditions à respecter

La principale difficulté consiste à vérifier des conditions de similitude. Plus précisément, pour que le modèle physique réduit soit semblable en tout point au système représenté (prototype), trois conditions de similitude doivent être respectées (Martaud et Heywood, 1999) :

  • similitude géométrique qui nécessite le respect des échelles de longueur ;
  • similitude cinématique qui nécessite un rapport constant entre les vitesses observées en deux points homologues du prototype et du modèle ;
  • similitude dynamique qui impose que le rapport entre l'ensemble des forces qui agissent sur une particule du fluide soient les mêmes dans le modèle que dans le prototype.


Figure 1 : Modélisation physique du delta du Rhône dans le lac Léman ; source : Artelia.

Il n'est généralement pas possible de respecter en même temps toutes les règles de similitude, et en particulier de vérifier la similitude dynamique pour toutes les forces, voir à ce sujet l'article Condition de similitude (HU).

Exemples de règles à respecter pour construire des modèles réduits

Modèles réduits d'écoulement en charge

Pour des écoulements en charge, la similitude est régie par le seul nombre de Reynolds. Un modèle réduit d’écoulement en charge devra donc respecter l’égalité des nombres de Reynolds dans le modèle ($ M $) et dans le prototype ($ P $).

Par exemple, si on construit un modèle réduit à l’échelle géométrique $ λ $ = 1/10, en utilisant un fluide de même viscosité dans le modèle que dans la réalité, la vitesse moyenne $ V_M $ de l’écoulement dans le modèle devra être 10 fois plus grande que la vitesse moyenne $ V_P $ dans le prototype pour vérifier l'égalité :


$ Re_M = \frac{V_M.D_M}{ν} = Re_P = \frac{V_P.D_P}{ν} \qquad(1) $


avec :

  • $ Re_P $ : nombre de Reynolds dans le prototype ;
  • $ Re_M $ : nombre de Reynolds du modèle ;
  • $ ν $ : viscosité cinématique du fluide (identique dans le modèle et dans la réalité) (m2/s) ;
  • $ D_P $ : diamètre des conduites dans le prototype (m) ;
  • $ V_P $ : vitesse dans le prototype (m/s).
  • $ D_M $ : diamètre des conduites du modèle = $ \displaystyle\frac{D_R}{10} $ (m) ;
  • $ V_M $ : vitesse dans le modèle (m/s).

Modèles réduits d'écoulement à surface libre

Le champ de pesanteur, d'accélération $ g $, étant le moteur des écoulements à surface libre, reproduire un écoulement réel ($ P $) à l'échelle du modèle ($ M $) réclamerait en plus une similitude de Froude (telle que les nombres de Froude soient les mêmes sur le modèle et sur le prototype) :


$ F_M = \frac{V_M}{\sqrt{g.h_M}} = P_P = \frac{V_P}{\sqrt{g.h_P}}\qquad(2) $

avec :

  • $ F_P $ : nombre de Froude dans le prototype ;
  • $ F_M $ : nombre de Froude du modèle ;
  • $ g $ : accélération de la pesanteur (m/s2) (identique dans le modèle et dans la réalité) ;
  • $ h_P $ : hauteur d'eau dans le prototype (m) ;
  • $ V_P $ : vitesse dans le prototype (m/s).
  • $ h_M $ : hauteur d'eau dans le modèle (m) ;
  • $ V_M $ : vitesse dans le modèle (m/s).

Les conditions de similitude de Froude et de Reynolds ne peuvent donc pas être respectées simultanément avec le même fluide (sauf à échelle 1). Pour s'affranchir de cette condition de similitude de Reynolds dans les écoulements à surface libre, il faudrait que le frottement soit indépendant du nombre de Reynolds, ce qui n'est le cas que si ceux ci sont suffisamment grands, sur le modèle et sur le prototype. Il est donc nécessaire de biaiser le modèle en ne respectant complétement que l'une ou l'autre des conditions de similitude en fonction des phénomènes supposés les plus déterminants (forces de pesanteur ou de viscosité) ou en changeant la viscosité du fluide.

Modèles distordus et non distordus

Deux types de modèles sont fréquemment utilisés :

  • les modèles non distordus présentent des échelles géométriques identiques dans les trois directions (verticale et horizontales), et les pentes sont conservées sur le modèle et le prototype ;
  • le nombre de Froude faisant intervenir le tirant d’eau, les modèles distordus utilisent sur la verticale une échelle différente de celle retenue pour les dimensions horizontales. Cette procédure permet d’obtenir des tirants d’eau suffisants sur le modèle et de réduire son encombrement au sol. Elle présente cependant des inconvénients, en particulier les pentes ne sont plus conservées et certains phénomènes, tels que les courants secondaires, ne sont pas reproduits. En pratique, il est déconseillé d’utiliser une distorsion supérieure à 3.

Quelles que soient les lois de similitude retenues, il est nécessaire d’évaluer le biais ou l’effet d’échelle introduit par le non respect de la vérification simultanée des similitudes de Froude et de Reynolds.

Modèles à fond mobile

Ces modèles sont mis en œuvre pour reproduire au mieux les phénomènes de charriage et d’érosion observés dans les cours d’eau naturels ou les canaux artificiels tels que les collecteurs, les émissaires, les canaux d’irrigation. Les difficultés principales de mises en œuvre de ces modèles résident dans la restitution à l’échelle des apports solides amont, et dans la reproduction des phénomènes tels que les rides ou les dunes, le pavage, etc.

Modèles de transport en suspension

Ces modèles sont essentiellement utilisés en hydrologie urbaine pour reproduire au mieux les phénomènes de décantation dans des ouvrages de traitement. Le rôle de la turbulence dans le maintien (ou non) des particules en suspension impose pour ces dernières le respect de similitudes souvent difficiles à définir (similitude en taille des particules en regard des échelles caractéristiques de la turbulence dans le modèle, similitude des vitesses de chute relativement aux vitesses convectives moyennes dans le modèle). C’est la raison pour laquelle l’on voit des effluents naturels représentés par des particules de masse volumique, voire de nature, différente : marc de café, chicorée, noyaux d’olives pilés (!). Enfin les "épiphénomènes" associés à la floculation sont encore plus difficilement représentés.

D'une façon générale, dans ce cas des modèles à fonds mobiles, ou des modèles chargés de représenter du transport de suspension (décanteurs par exemple), les lois de similitude associées aux comportements des particules solides couplées aux lois de similitude des écoulements nécessitent une analyse fine des phénomènes mis en jeux.

Intérêt des modèles réduits

Avec le développement de moyens de calcul de plus en plus puissants et de grandes plate formes partagées de simulation (voir par exemple TELEMAC-MASCARET (HU)), on pourrait penser que la simulation numérique va rendre inutile le recours aux modèles réduits. En pratique, si les études purement hydrauliques peuvent souvent se satisfaire de modélisations numériques, il n'en est pas de même lorsqu'il existe des interactions fortes entre les écoulements d'eau et le transport solide, particulièrement lorsque l'on s'intéresse aux effets à long terme d'un aménagement sur un milieu naturel. Dans ce domaine, les modèles numériques "ne sont pas assez précis pour être utilisés pour les prévisions au delà de quelques années et souffrent de limitations dans la représentation des phénomènes physiques" (Caude, 2004).

Les modèles réduits semblent donc encore avoir de beaux jours devant eux, d'autant qu'ils présentent une dimension pédagogique extrêmement intéressante à une époque ou les processus de prise de décision intègrent de plus en plus de concertation publique.

Pour en savoir plus :

  • Martaud, M., Heywood, S. (1999) : Les modèles physiques en hydraulique urbaine ; La Houille blanche ; n°1, 1999 ; pp 67-74 ; disponible sur www.shf-lhb.org:
  • Caude, G. (2004) : La modélisation physique au XXIème siècle ; La Houille Blanche, 90:3, pp. 17-24 ; disponible sur : https://doi.org/10.1051/lhb:200403001
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