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Toiture stockante (HU)

De Wikhydro

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Traduction anglaise : Roof detention, Roof storage, Rooftop storage

Dernière mise à jour : 31/07/2023

Toiture équipée pour stocker temporairement les eaux pluviales et les restituer à un exutoire à débit limité et/ou pour en intercepter une partie ; on parle également de toit stockant, toiture réservoir ou de toiture bac (en Belgique) ; les structures de ce type font partie des solutions alternatives en assainissement pluvial.

Sommaire

Généralités

Principes et variantes

Nota : Nous ne traiterons ici que des toitures stockantes non végétalisées, les toitures végétalisées faisant l'objet d'un article spécifique.

Le principe de fonctionnement d'une toiture stockante est simple. Il consiste à autoriser le stockage provisoire de l'eau sur la toiture en contrôlant le débit évacué par un dispositif adéquat situé au point bas de la toiture (voir schéma de principe de la figure 1). Ce type de toiture permet de limiter le débit produit en utilisant un stockage provisoire de l'eau pendant quelques heures. Il est utilisable seul, avec une évacuation vers le réseau pluvial, ou à l'amont d'un autre ouvrage alternatif (par exemple à l'amont d'un ouvrage d'infiltration).


Figure 1 : Principe d'une toiture stockante.

On peut utiliser pour la rétention de l'eau, soit des toits plats, soit des toits possédant une légère pente en installant des cloisons transversales sur la toiture comme indiqué sur la figure 2. Pour que le stockage soit efficace la pente doit cependant rester faible et une toiture terrasse plate est toujours préférable à un toit en pente.


Figure 2 : Stockage sur un toit plat ou sur un toit en pente ; Source : STU, 1982.


Une toiture stockante est constituée des éléments suivants (voir figure 3) :

  • un élément porteur ;
  • un pare-vapeur et un isolant thermique ;
  • une étanchéité ;
  • une protection de l'étanchéité (généralement une couche de gravillons dans le cas des toitures non végétalisées) ;
  • un ensemble de dispositifs de vidange constitué (figure 4) :
    • d'une évacuation régulée jusqu'à une certaine hauteur d'eau par l'intermédiaire d'orifices calibrés ;
    • au delà, d'une évacuation déversoir constituée d’un trop plein de sécurité et/ou de descentes classiques permettant de limiter la hauteur d’eau en toiture à une valeur maximale compatible avec la résistance mécanique des éléments porteurs.

Outre son rôle de protection de l'étanchéité, la couche de gravillons permet de réduire les débits de pointe et assure une filtration des eaux pluviales, réduisant ainsi les risques de colmatage. Le volume que l'on peut stocker pour une hauteur d'eau donnée est cependant réduit et dépend de la porosité du matériau. Cet inconvénient est contrebalancé par le fait qu'une partie de l'eau va rester piégée dans le matériau et s'évacuera ultérieurement par évaporation. Les hauteurs ainsi interceptées et qui ne rejoignent jamais le réseau sont loin d'être négligeables pour les petites pluies avec un ordre de grandeur de 1 mm d'eau retenue pour 3 cm de graviers (Chocat et al., 1997). Une toiture terrasse recouverte de 10 cm de graviers est ainsi capable d'intercepter les 3 à 4 premiers mm précipités (à la condition qu'il n'ait pas plu depuis plusieurs jours).


Figure 3 : Schéma de principe des constituants d’une toiture stockante ; Source : Chocat et al.; 1997.


Figure 4 : Schéma de principe du dispositif d'évacuation d'une toiture stockante ; Source : Chambre syndicale d'étanchéité ; 1992.

Les principes mis en œuvre dans les dispositifs de régulation n'ont que peu évolué depuis les années 1980 et reposent le plus souvent sur des orifices calibrés (figure 5).


Figure 5 : Exemples de dispositifs de régulation à orifice calibré utilisés en France (a) et aux États-Unis (b) au début des années 1980 ; Source : STU, 1982.


Les dispositifs constitués de fentes triangulaires verticales sont toujours largement utilisés en France, même si des solutions différentes, moins sensibles au risque de colmatage, existent sur le marché (figure 6).


Figure 6 : Exemple de limiteur de débit sur un toit ; crédit photo Jean-Pierre Tabuchi.

Le lieu le plus simple pour implanter une toiture stockante est bien sûr le bâtiment. Les surfaces susceptibles d'être équipées en zone urbaine sont considérables et il s'agit probablement de l'une des façons les plus efficaces pour réduire les débits produits par temps de pluie. Les toitures terrasses existantes peuvent parfaitement être équipées de régulateur, et ceci de façon très économique.

Il est également possible d'envisager l'installation de toitures stockantes, végétalisées ou non, sur des surfaces aménagées autres que des bâtiments (parkings, trottoirs ou autres cheminements piétonniers) ; dans ce cas les contraintes sont moins sévères.

Historique

Dès la fin des années 1970, différentes études ont montré que toutes les toitures terrasses, particulièrement lorsqu'elles étaient engravillonnées, interceptaient une partie significative des précipitations reçues, ceci même sans dispositif spécifique de contrôle du débit évacué (voir par exemple Raous, 1983). L'utilisation des toitures stockantes est également préconisée par le STU dès le début des années 1980 (STU, 1982). Pourtant, cette solution reste très peu utilisée (mis à part sur certains bâtiments industriels) jusqu'à la fin du XXème siècle (Chocat et al, 1997).

La principale raison est une réticence de la part des professionnels à maintenir de l'eau sur la toiture pendant plusieurs heures, et ceci même si plusieurs documents techniques ont prescrit de façon claire les règles à appliquer dès la fin des années 1980 :

  • DTU 43.1 ;
  • Règles professionnelles de la chambre syndicale nationale de l'étanchéité pour la réfection des toitures (la première édition intégrant les toitures stockantes date d'octobre 1987) ;
  • Classement FIT des revêtements d'étanchéité (cahier du CSTB n° 2358 de septembre 1989).

Même si le DTU 43.1 reste encore relativement frileux et limite dans son chapitre 9.4 l'utilisation des toitures stockantes au cas des toits non accessibles, la pratique commence cependant à se développer en France depuis le début du XXIème siècle, souvent sous la forme de toitures végétalisées. Du fait :

  • de l'importance des toitures dans la surface imperméable des villes,
  • de la relative fréquence des toitures terrasses non accessibles,
  • de la facilité d'installation des dispositifs de régulation,

Les toitures stockantes représentent un gisement important et encore insuffisamment exploité pour déconnecter de nombreuses surfaces imperméables urbaines ; cependant, pour permettre un développement plus soutenu il est sans doute nécessaire que la réglementation ne soit pas aussi restrictive concernant les toitures accessibles.

Fonctions et cobénéfices

Les toits stockants collectent l’eau directement sur leur surface. Ils ne nécessitent donc pas d’ouvrage de collecte et ne consomment aucun foncier. Cette solution est donc extrêmement économique et utilisable même dans les parties les plus denses des villes.

Une couverture épaisse en graviers permet d'améliorer l'inertie thermique de la toiture et de protéger l'étanchéité de façon efficace. Comme indiqué plus haut elle permet également d'intercepter puis de restituer par évaporation une quantité non négligeable d'eau (abattement pouvant atteindre 3 à 4 mm pour chaque pluie).

Conception

Conception générale

La principale contrainte est que seules les toitures inaccessibles peuvent normalement être utilisées pour stocker provisoirement l'eau de pluie. Au sens du DTU 43.1, une toiture inaccessible est une toiture qui ne reçoit qu'une circulation réduite à l'entretien normal des ouvrages d'étanchéité et d'appareils ou installations nécessitant des interventions peu fréquentes (de l’ordre de une à deux fois par an).

Nota : Ceci n'implique pas que les toitures comportant des installations techniques (chaufferie, dispositif de ventilation mécanique, aéroréfrigérants, machinerie ascenseur, capteurs solaires, etc.) ne puissent pas servir de toiture stockante. En effet, si l'installation technique ne concerne qu'une partie de la toiture-terrasse, seule cette partie est considérée comme toiture-terrasse technique ("zone technique") et le reste de la toiture reste classée inaccessible. Par ailleurs, les toitures jardins, normalement accessibles, font l'objet de règles techniques différentes (voir Toiture végétalisée (HU) et § 9.3 du DTU 43.1).

Une protection d'épaisseur minimale de 4 cm en gravillons est également obligatoire.

Une autre contrainte porte sur la structure porteuse qui doit prendre en compte, en plus des charges habituelles, la charge d'eau supplémentaire déterminée par la hauteur de l'évacuation déversoir. À titre d’exemple, dans le cas d'une protection en gravillons de 4 cm d'épaisseur, la charge d'eau supplémentaire est de 70 daN/m2 (eau contenue dans la hauteur du gravillon + 5 cm au-dessus). Cette surcharge reste cependant souvent inférieure à celle due à la neige et n'entraîne donc nécessairement pas de surcoût pour les bâtiments neufs. Pour les toitures existantes elle peut cependant limiter la hauteur utilisable pour le stockage.

Principes de dimensionnement et choix des dimensions

Sur le plan hydrologique, l'eau ne doit normalement pas dépasser la hauteur du substrat. Avec une hauteur de gravillons de 10 cm et d'indice de vide 0,3, on peut donc stocker 3 cm d'eau. Comme le rapport entre la surface d'apport et la surface de stockage peut être très proche de 1 (même si on ne peut pas stocker sur les surfaces correspondant à des éléments techniques), les volumes disponibles permettent généralement de faire face à la plupart des situations. Ceci est d'autant plus vrai que la garde obligatoire de 5 cm à prévoir entre le haut de la couverture et le trop plein (voir figure 4) permet de faire face à des événements notablement plus forts que ceux pris en compte pour le dimensionnement.

Réalisation / impacts négatifs potentiels et précautions à prendre

Beaucoup d'informations inquiétantes circulent sur les toitures terrasses stockantes : risque d'effondrement dû à la surcharge, risque d'infiltration d'eau dans l'immeuble, interdiction par les règles d'urbanisme, etc. La plupart de ces informations sont fausses ou du moins fortement exagérées (voir en particulier GRAIE, 2014). Certaines précautions doivent cependant être prises.

Cas des zones de montagne

Les toitures planes sont interdites dans les zones de montagnes (en particulier lorsque l’altitude est supérieure à 900 mètres). Même s’il est possible de concevoir des toits pentus stockants, cette solution n’est pas adaptée à ce type de climat

Difficulté à trouver des régulateurs ou des limiteurs de débit fiables

Une difficulté souvent indiquée est associée au choix et au dimensionnement du, ou des, régulateur(s) ou limiteur(s) de débit. Du fait de la faiblesse des surfaces concernées, les débits à réguler sont souvent très faibles et pendant longtemps il n'a pas toujours été simple de trouver un appareil à la fois fiable (en particulier peu sensible au colmatage) et permettant une régulation précise. Cette difficulté est cependant de moins en moins avérée car le développement des toitures terrasses stockantes entraîne des efforts d’innovation et de nouveaux produits de plus en plus performants sont mis sur le marché tous les ans. On trouve par exemple depuis plusieurs années des régulateurs capables de limiter le débit à des valeurs de l’ordre de 0,3 L/s (GRAIE, 2014).

De plus, la présence d'un trop-plein conjuguée à des visites d'entretien effectuées avec une fréquence suffisantes limitent les éventuelles conséquences dommageables pouvant découler d'un dysfonctionnement de ces régulateurs.

Risque de nuisances

Les risques de nuisances souvent évoquées concernent principalement les proliférations de moustiques et les mauvaises odeurs. En pratique ces deux risques sont extrêmement réduits du fait de l'obligation d'installer une couche de gravillons d'au moins 4 cm. Ils ne se manifestent qu'en cas de bouchage des dispositifs d'évacuation régulés qui maintient de l'eau eu dessus de la couche de gravillons pendant une durée importante. Un entretien régulier de la toiture (voir § suivant) permet de réduire ces risques de façon efficace.

Vie de l’ouvrage

Toutes les toitures stockantes nécessitent au moins deux visites d'entretien par an pour veiller au nettoyage des systèmes d'évacuation (susceptibles d'être progressivement obstruées par du feuillage, des branchages, etc.). Il peut être judicieux de programmer ces deux visites de la manière suivante :

Bibliographie :

Pour en savoir plus :

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