GRP (HU) : Différence entre versions
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Le pas de temps de calcul initial de GRP était de 1 heure. Ce pas de temps peut s'avérer trop grand pour des bassins versants très réactifs. En effet, si le décalage temporel entre la pluie et le débit à l’exutoire est relativement faible, de quelques dizaines de minutes, un modèle à pas de temps horaire risque de ne rendre compte des phénomènes que de manière assez grossière et en particulier de sous-estimer les débits de pointe. Il était donc important de pouvoir travailler avec des pas de temps plus faibles. | Le pas de temps de calcul initial de GRP était de 1 heure. Ce pas de temps peut s'avérer trop grand pour des bassins versants très réactifs. En effet, si le décalage temporel entre la pluie et le débit à l’exutoire est relativement faible, de quelques dizaines de minutes, un modèle à pas de temps horaire risque de ne rendre compte des phénomènes que de manière assez grossière et en particulier de sous-estimer les débits de pointe. Il était donc important de pouvoir travailler avec des pas de temps plus faibles. |
Version du 11 mai 2024 à 09:27
Dernière mise à jour : 11/05/2024
Modèle de prévision en temps réel des débits futurs en un point jaugé d'un cours d'eau.
Sommaire |
Objectifs du modèle
Le modèle GRP utilise les mesures et les prévisions de pluies précipitées sur le bassin versant étudié ainsi, éventuellement, que les mesures de débit au point d'intérêt. Spécifiquement développé pour l'aide à l'alerte aux crues, il est utilisé actuellement par plusieurs services de prévisions des crues en France (voir Prévision des crues : les modèles utilisés (HU)).
Ce modèle résulte de travaux de recherche soutenus par le Ministère chargé de l’environnement et menés au Cemagref d’Antony (devenu depuis IRSTEA puis intégré en 2020 au sein de l'INRAE) (Makhlouf, 1994 ; Tangara, 2005 ; Berthet, 2010 ; Berthet et al, 2012).
Principes du modèle
Les principales caractéristiques de GRP sont les suivantes. C’est un modèle :
- qui fonctionne en continu et en temps réel : il se sert de l’historique des conditions passées (pluviométriques et éventuellement débitmétriques) pour déterminer le taux de saturation des sols et pour recaler les fonctions de production et de transfert (voir § "utilisation en mode assimilation de données") ;
- global (par opposition à spatialement distribué) : il représente le bassin versant de façon simplifiée et ne prend pas en compte de manière explicite l'hétérogénéité spatiale des précipitations du bassin ;
- avec une structure à réservoirs, l’apparentant ainsi aux modèles conceptuels équivalents utilisés par différents services nationaux de prévision des crues (États-Unis, Suède, etc.) (voir figure 1).
Structure et fonctionnement
La structure du modèle hydrologique repose sur les composants suivants :
- un réservoir de production (de capacité fixe) qui permet d'assurer un suivi des conditions d'humidité du bassin ;
- une fonction d'ajustement de la pluie efficace ;
- un hydrogramme unitaire ;
- un réservoir de routage de type puissance.
Fonctionnement du modèle
Le fonctionnement du modèle sur un pas de temps est le suivant (voir figure 1) :
- la pluie est dans un premier temps neutralisée par l'évapotranspiration potentielle (ETP) ;
- le reliquat éventuel de pluie est divisé en deux parties en fonction du taux de remplissage du réservoir de production, la première partie alimentant ce réservoir, et l'autre alimentant l'écoulement ; le reliquat éventuel d'évapotranspiration potentielle contribue à la vidange du réservoir de production par évapotranspiration réelle ;
- une percolation issue du réservoir de production va également alimenter l'écoulement ;
- la quantité d'eau totale allant alimenter l'écoulement est multipliée par le facteur d'ajustement qui permet notamment de tenir compte d'éventuels échanges en eau avec des nappes profondes et/ou les bassins voisins ;
- le transfert de l'eau est assuré par l'hydrogramme unitaire qui permet de tenir compte du décalage temporel entre pluie et débit, puis par le réservoir de routage non linéaire ; le modèle ne présente qu'une seule branche d'écoulement, ce qui permet notamment d'avoir une relation univoque entre le débit simulé par le modèle et le contenu du réservoir de routage.
Utilisation en mode assimilation des données
Le modèle GRP peut fonctionner comme un modèle classique de simulation, en ne tenant compte que de l'information pluviométrique. Cependant, dans un contexte prévisionnel, des résultats nettement meilleurs sont obtenus lorsque l'information fournie par le débit observé à l'instant de la prévision est mise à profit dans le modèle. Cette exploitation se fait par l'intermédiaire d'une procédure d'assimilation (Voir Assimilation des données) du dernier débit observé (figure 2).
Pour un objectif de prévision, on peut considérer que cette mise à jour est partie intégrante de la structure. Le modèle a alors les précipitations et le dernier débit observé comme entrées, et ainsi il utilise les erreurs faites par le modèle aux pas de temps précédents pour améliorer les résultats aux pas de temps suivants.
Choix des paramètres
La structure du modèle ne comporte que trois paramètres libres :
- le coefficient d'ajustement de la pluie efficace, qui permet au modèle d'ajuster son bilan en complément de la fonction de rendement basée sur le réservoir de suivi d'humidité du sol ;
- la capacité (à un pas de temps et chiffrée en mmm de pluie) du réservoir de routage : il s'agit du contenu maximum autorisé par le réservoir à la fin d'un pas de temps, c'est-à-dire après sa vidange ; notons qu'au pas de temps horaire, cette capacité peut prendre des valeurs assez élevées (de l'ordre de quelques milliers de mm). Même si cela est difficilement interprétable « physiquement », de telles valeurs ne sont pas surprenantes compte tenu de la formulation en puissance du réservoir ;
- le temps de base de l'hydrogramme unitaire, qui va jouer sur le temps de réponse du bassin aux pluies.
Les valeurs de ces paramètres sont à déterminer pour chaque bassin versant par optimisation.
Grâce à sa structure compacte intégrant l'assimilation du débit observé à la structure du modèle, les paramètres du modèle peuvent être optimisés directement pour un objectif de prévision. Cette optimisation est réalisée de manière automatique par une procédure de recherche locale bien adaptée au modèle GRP.
Le modèle possède par ailleurs un certain nombre de paramètres qui restent fixes quel que soit le bassin étudié (par exemple, la capacité du réservoir de production est fixée à 275 mm). Ces paramètres ont été fixés, car les laisser libres n'apportait aucun gain de performance significatif et complexifiait l'optimisation.
Notons que certains des paramètres libres ou fixes du modèle dépendent du pas de temps de fonctionnement du modèle (voir le paragraphe suivant).
Les améliorations récentes ou envisagées du modèle GRP
Le pas de temps de calcul initial de GRP était de 1 heure. Ce pas de temps peut s'avérer trop grand pour des bassins versants très réactifs. En effet, si le décalage temporel entre la pluie et le débit à l’exutoire est relativement faible, de quelques dizaines de minutes, un modèle à pas de temps horaire risque de ne rendre compte des phénomènes que de manière assez grossière et en particulier de sous-estimer les débits de pointe. Il était donc important de pouvoir travailler avec des pas de temps plus faibles.
Comme la structure du modèle est dépendante du pas de temps, cette adaptation nécessite d'adapter aussi cette structure et de vérifier que cela n’altère pas les performances à attendre. Des travaux ont été engagés en ce sens, par exemple, pour augmenter la flexibilité temporelle du modèle GRP (Viatgé, 2019) (Ficchi, 2017). Il s’en est suivi le développement d’une structure multi-pas de de temps infra-horaires, rendue opérationnelle en 2019.
De plus, d’autres travaux ont été engagés par suite des retours d’expérience, concernant notamment le modèle GRP, sur les inondations de 2013 et janvier 2014 dans le sud-est de la France, ainsi que de mai-juin 2016 sur le bassin de la Seine et le nord du bassin de la Loire :
- Une première analyse, menée dans le cadre d’un mémoire de Master 2 (Pinna, 2017), est centrée sur le constat que :
- la valeur des débits maximaux au pic de crue peut être assez largement sous-estimée, et pas seulement du fait que le pas de temps horaire peut être trop long,
- une réponse un peu « molle » du modèle pour reproduire certaines « montées » d’hydrogramme, se traduisant par un retard de celle-ci et dans le positionnement temporel des pics de crue.
Les investigations sur l’origine de ces insuffisances ont porté prioritairement sur la structure du modèle et les stratégies pour son calage, en ne perdant pas de vue qu’il faudra aussi regarder de près le rôle que peut jouer le processus d’assimilation de données.
Elles ont débouché sur l’élaboration de versions de GRP potentiellement utilisables en mode opérationnel et leur test, sur 266 bassins versants.
- Une analyse conjointe de l’unité HYCAR de l’INRAE (alors IRSTEA) avec les SPC Loire-Cher-Indre et Seine-Marne-Yonne-Loing (Pérédo et al., 2018) du comportement du modèle GRP et de ses limites lors des crues citées plus haut de mai-juin 2016, avec le constat, notamment, de sous-estimation des volumes ruisselés, ainsi que pour les crues sur des bassins versants proches en janvier 2018 (avec moins de sous-estimation), a permis de confirmer l’intérêt des pistes d’amélioration de (Pinna, 2017).
- La poursuite de ce chantier, notamment par une thèse (Astagneau, 2022), qui a :
- approfondi le diagnostic sur le même jeu de données, en
- identifiant les évènements pour lesquels les erreurs de prévision étaient les plus fortes, principalement pour des pluies intenses et géographiquement contrastées, surtout en été ou en début d’automne, lorsque l’humidité initiale du sol est faible, souvent lors d’évènements se situant en dehors des plages de ceux qui avaient été utilisés pour le calage des paramètres,
- analysant les flux internes aux modèles utilisés (GRP et ses variantes en test),
- essayant d’identifier les effets négatifs éventuels des méthodes d’évaluation des performances et les interférences dues au processus d’assimilation de la valeur du dernier débit observé,
- proposé à son tour des améliorations sans trop complexifier le modèle et le jeu des paramètres, en testant des alternatives à la structure des modèles de la famille GR (GR5H et GRP),
- et dégagé des perspectives :
- en adaptant la version (avec une structure plus adaptée) du modèle GRP et les modalités de calage des jeux de paramètres aux caractéristiques de l’évènement attendu et son contexte, en évoluant donc vers un dispositif multi-modèles GRP,
- en cherchant à limiter la surface des bassins versants modélisés, pour limiter la complexité des processus à simuler, ce qui implique soit d’exploiter les données de stations hydrométriques intermédiaires, soit d’avoir recours à la régionalisation, qui, notamment, estime des débits en des points non jaugés du réseau hydrographique, en évoluant donc vers une organisation semi-distribuée,
- en rapprochant les démarches menées en matière de modélisation pour la prévision des crues et pour l’anticipation des crues soudaines (Piotte et al., 2020) et (PICS, 2023), et celles conduites concernant les modèles géographiquement distribués.
- approfondi le diagnostic sur le même jeu de données, en
Bibliographie :
- Astagneau, P-C (2022) : Pistes d’amélioration de la généralité et de l’efficacité d’un modèle opérationnel de prévision des crues, thèse de doctorat soutenue à Sorbonne Université dans le cadre de l’Ecole doctorale Géosciences, ressources naturelles et environnement, 237 p.; disponible sur https://theses.hal.science/tel-04028903 ou https://theses.hal.science/tel-04028903v1/document
- Berthet, L. (2010) : Prévision des crues au pas de temps horaire : pour une meilleure assimilation de l’information dans un modèle hydrologique, thèse de doctorat, Université Pierre et Marie Curie, Paris.
- Berthet, L., Perrin, C., Coron, L., Tangara, M., Fortier-Filion, T.-C., Lerat J., Andréassian, V. (2012) : Annexe 10-05 (sur DVD), dans Roche P.-A. et al. Hydrologie quantitative : processus, modèles et aide à la décision ; Springer France (590 p + 1 DVD).
- Ficchì, A. (2017) : An adaptive hydrological model for multiple time-steps: Diagnostics and improvements based on fluxes consistency ; Thèse de doctorat, UPMC, Irstea Antony ; disponible sur https://hal.archives-ouvertes.fr/tel-01619102v1
- Lilas, D., Perrin, C. , Andréassian, V., Coron, L., Peschard, J., Ansart, P., Furusho, C., Loumagne, C., Berthet, L. (2012) : Mise au point d’un modèle de prévision des crues sur le bassin versant de l’Orgeval ; Sciences Eaux & Territoires Cahier spécial n°03 ; pp10-15 ; téléchargeable sur : http://www.set-revue.fr/sites/default/files/articles/pdf/Mise_au_point_dun_modele_de_prevision_des_crues_sur_le_bassin_versant_de_lOrgeval.pdf
- Makhlouf, Z. (1994) : Compléments sur le modèle GR4J et essais d’estimation des paramètres, Thèse de Doctorat, Université d’Orsay.
- Pérédo, D., Viatgé, J., Vrignaud, C., Riffod, F., Marty, R., Berthet, L., Brunelle, J., Garandeau, J., Ramos, M.-H., Perrin, C. (2018) : Le modèle hydrologique GRP a-t-il été fiable et utile lors des récentes crues sur les bassins de la Seine et de la Loire ?
- PICS (2023) : programme de recherche « Prévision immédiate intégrée des impacts des Crues Soudaines », soutenu par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR), structuré en 4 tâches (1. Prévision immédiate des pluies et des débits ; 2. Modélisation des zones inondées ; 3. Modélisation des impacts ; 4. Conception et tests de chaînes de prévision intégrées), ayant produit, ou inspiré, 25 communications associant plusieurs dizaines d’auteurs, 7 publications, 5 mémoires de thèse, et donné lieu à une journée nationale de restitution le 18/05/2022 à Aix-en-Provence au CEREMA (350 personnes participantes sur place ou à distance), dont tous les éléments sont accessibles sur le site https://pics.ifsttar.fr/
- Pinna, T. (2017) : Peut-améliorer les performances du modèle GRP pour la prévision des crues ? Tests sur un échantillon de bassins versants français, Mémoire de Master 2, 50 p.
- Piotte, O., Montmerlé, T., Fouchier, C., Belleudy, A., Garandeau, L., Janet, B., Jauffret, C., Demargne, J., Organde, D. (2020) : Les évolutions du service d’avertissement sur les pluies intenses et les crues soudaines en France ; La Houille Blanche, 106:6, p. 75-84. ; disponible sur https://doi.org/10.1051:lhb/2020055
- Tangara, M., (2005) : Nouvelle méthode de prévision des crues utilisant un modèle pluie-débit global ; Thèse de doctorat, CEMAGREF (devenu Irstea) ;
- Viatgé, J., Pinna, T., Ficchi, A., Perrin, C. (2019) : Vers une plus grande flexibilité temporelle du modèle opérationnel de prévision des crues GRP, 9 p., La Houille Blanche 105 (2) : 72-80, DOI:10.1051/LHB/2019017 ; disponible sur https://www.shf-lhb.org/articles/lhb/abs/2019/02/lhb180086/lhb180086.html
Pour en savoir plus : https://webgr.irstea.fr/modeles/modele-de-prevision-grp/