Débordement (HU)
Traduction anglaise : Overbank, Overbank flow, Overflow
Mot en chantier
Dernière mise à jour : 18/05/2024
En hydrologie urbaine, ce terme peut désigner deux phénomènes distincts :
- un écoulement d'eau vers le lit majeur d'un cours d'eau (Overbank) ;
- un reflux de l'eau depuis le système d'assainissement vers la surface (Overflow).
En pratique, les deux types de phénomènes sont très différents et doivent être traités par des méthodes distinctes.
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Débordement dans le cas d'un cours d'eau
Dans un cours d'eau naturel (ou dans un réseau de surface artificiel), l'eau s'écoule toujours à surface libre. En cas de crue le niveau va plus ou moins progressivement monter dans le lit, puis s'épancher latéralement pour occuper son lit majeur. Le phénomène peut être très progressif ou au contraire brutal, soit parce qu'il existe un lit moyen bien marqué, soit, c'est le cas le plus fréquent, parce que le cours d'eau a été canalisé ou endigué et que le niveau dépasse la crête de l'ouvrage. Dans les cas les plus complexes il existe plusieurs lignes d'endiguement qui cloisonnent la plaine d'inondation.
Nota : En zone urbaine, le lit majeur est de plus en plus souvent occupé par l'homme et les conséquences peuvent être d'autant plus graves que l'endiguement des rivières donne une impression illusoire de protection.
Le débordement peut donc, en première approche, être considéré comme le passage d'un écoulement globalement filaire (unidimensionnel), effectué de l'amont vers l'aval du cours d'eau, à un écoulement bidimensionnel, beaucoup plus complexe (figure 1).
La modélisation du débordement dépend des modèles mis en œuvre pour représenter la crue. Pour ceci deux familles de méthodes sont utilisables (voir Modèle d'écoulement en réseau et en cours d'eau (HU)) :
- les modèles de propagation d'onde de crue ;
- les modèles hydrauliques reposant sur l'utilisation des équations de Barré de Saint-Venant.
Limites des approches utilisant des modèles de transfert d'onde
Dans le cas de l'utilisation d'un modèle de propagation d'onde de crue, le seul résultat connu dans le lit principal est la valeur des débits. Il est donc nécessaire d'utiliser un post-traitement pour en déduire les valeurs de hauteurs d'eau. Or la relation entre le débit et la hauteur d'eau n'est absolument pas univoque (à titre d'exemple, dans le cas d'une crue fluviale, le maximum de hauteur d'eau peut se produire plusieurs jours après le pic de débit). Il toujours a posteriori, une ligne d'eau en régime graduellement varié à partir des valeurs maximum de débit, mais la validité des hauteurs d'eau atteinte restera faible.
Le calcul des zones inondées, nécessite donc, au moins dans les zones à enjeux, d'utiliser des modèles hydrauliques fournissant à la fois les valeurs de hauteurs et de débit.
Approche fondée sur la modélisation des écoulements dans le lit majeur par un modèle hydraulique
Dans ce cas on dispose à tout instant des valeurs de débit, de vitesse moyenne dans le sens de l'écoulement et de hauteur d'eau à chaque instant. On peut donc prévoir, à partir de quel moment l'eau va déborder dans le lit majeur. Trois approches sont possibles.
Utilisation du modèle 1D
L'utilisation du même modèle 1D pour représenter les écoulements dans le lit majeur est parfois suffisant lorsque les limites entre les différents lits sont peu marquées. Le profil en travers de la rivière doit alors être défini pour la totalité du lit majeur et il est nécessaire de tenir compte de l'augmentation de la rugosité pour les écoulements dans le lit majeur (figure 2).
Utilisation d'un modèle à casier
Cette approche consiste à on compléter le modèle filaire représentant le lit moyen par des éléments surfaciques, les casiers, chargés de représenter le lit majeur. Chaque casier est défini géographiquement par ses contours qui s’appuient sur des lignes de niveau ou sur des obstacles à l’écoulement (digues, routes, talus, etc.) et pas sa profondeur (figure 3). En fonction du niveau atteint par l’eau, les casiers vont progressivement se remplir, soit directement à partir du lit moyen, soit en débitant les uns dans les autres, ce qui va permettre de simuler la progression de l’inondation. Les échanges entre casiers sont régis par des lois de transfert (souvent des lois de seuils ou d’orifices).
Les modèles à casiers sont d'autant plus pertinents que le lit est bien compartimentés par des infrastructures en remblais, des digues latérales ou des talus routiers ou ferroviaires, qui contraignent les écoulements en lit majeur et conditionnent les stockages consécutifs aux débordements.
Utilisation d'un modèle 2D
des modèles à 2 dimensions (2D) horizontales, dans le cas où les écoulements vont, au sein du lit mineur (par exemple dans un estuaire large comme la Gironde) ou de la zone inondée, dans plusieurs directions horizontales ; ces modèles fournissent le niveau d’eau ainsi que les composantes horizontales de la vitesse en tous points d’un maillage reposant sur une grille de calcul horizontale ; ils nécessitent des données topographiques et bathymétriques suffisamment précises, en altimétrie (une à deux dizaines de centimètres) et en résolution horizontale (variant de quelques mètres à quelques dizaines de mètres, suivant que les variations altimétriques sont marquées ou pas) ; ils permettent aussi de représenter les écoulements de manière relativement concrète, sur des cartes dynamiques, ce qui facilite la communication au public. Mais ils sont plus lourds à mettre en œuvre, notamment pour la collecte des données nécessaires, même si de très notables progrès ont été faits depuis le début des années 2010 sur la disponibilité et la précision des informations topographiques. Ces modèles 2D peuvent aussi être très utiles pour simuler des écoulements localisés aux abords d’un ouvrage ou d’une autre singularité hydraulique ou consécutifs à l’ouverture d’une brèche dans une digue. Ils peuvent tenir compte d'autres variables climatiques (par exemple le vent).
Débordement dans le cas d'un réseau d'assainissement
L’analyse et la modélisation des phénomènes associés et/ou provoquant les débordements des réseaux souterrains vers la surface sont beaucoup plus délicates. Même si on ne tient pas compte des phénomènes transitoires qui se produisent au moment de la mise en charge des réseaux, le débordement correspond en effet à une modification totale des conditions de l'écoulement, que l'on peut approcher de la façon simplifiée suivante. Lorsque, à un point donné du réseau, la charge nécessaire pour assurer l'écoulement devient supérieure à la charge disponible (différence entre la cote sol et la charge à l'aval - Hd), seule une partie du débit peut être évacuée par la conduite (Voir la Figure 3).
Le débit excédentaire cherche alors un autre exutoire, le réseau communiquant avec la surface par des branchements, des avaloirs, et différents regards, l'exutoire en question est la plupart du temps constitué par la chaussée. Une certaine quantité d'eau reflue donc vers le sol où elle rejoint l'eau qui n'a pas encore pénétré dans le réseau (voir la Figure 4).
Cette eau peut donc s'infiltrer, s'évaporer, rester stockée sur la chaussée ou ruisseler. Il est relativement facile d'estimer le débit de débordement comme étant la différence entre le débit à l'amont et le débit que la conduite est capable d'écouler sous la charge disponible, auquel il convient d'ajouter les apports supplémentaires en provenance du sol que la mise en charge empêche de pénétrer dans le réseau. En pratique, la difficulté principale consiste donc surtout à déterminer ce que deviennent les volumes ainsi extraits du réseau. Ce problème ne peut être résolu qu'en tenant compte de la topographie de la rue ou du quartier considéré. Par exemple, si le débordement a lieu dans une cuvette, il se formera une lame d'eau qui ne pourra se déplacer et reviendra en partie dans le réseau, à l'endroit où elle en est sortie, dès que les conditions dans l'écoulement le permettront. A l'inverse, si le débordement se produit dans une rue en pente, l'eau ruissellera sur la chaussée ou dans les caniveaux, pour éventuellement rejoindre le réseau dès que celui ci disposera de capacités suffisantes (voir Figure 5). Ces écoulements en surface peuvent se faire selon les mêmes tracés que les écoulements souterrains. Ils peuvent également se faire selon des tracés totalement différents.
Cas des réseaux d'assainissement
Dans le cas des réseaux d'assainissement les écoulements se font essentiellement (du moins en France) dans des sections fermées et enterrées. Pour que l'eau arrive en surface la conduite doit donc d'abord se mettre en charge et le débordement se produira lorsque la charge hydraulique deviendra supérieure à la profondeur de la conduite (voir Débordement (HU)).
En théorie, le calcul est donc simple car, si la conduite est en charge et que l'on néglige sa déformabilité ainsi que la compressibilité de l'eau, la relation entre le débit et la vitesse devient bijective, la section mouillée de l'écoulement restant constante puisque la conduite est pleine. Comme on sait établir une relation simple entre les pertes de charge et la vitesse et généraliser les équations de Barré de Saint Venant 1D au cas des écoulements en charge, il suffit donc de tracer la ligne de charge pour trouver les endroits où elle dépasse le niveau du sol (figure 4), ce qui permet d'identifier les zones inondées. Cette méthode, disponible sur tous les outils actuels de simulation de réseau, fournit une première image déjà représentative.
La réalité est cependant beaucoup plus compliquée pour deux raisons principales.
- Tant que l'eau s'écoule à surface libre dans la conduite, il y a de l'air au dessus de la ligne d'eau ; au fur et à mesure que le niveau monte, cet air est comprimé et doit s'échapper ; le remplissage total de la conduite, surtout s'il est rapide, va donc s'accompagner de déplacements très brutaux de l'air piégé dans la partie haute et ces déplacements vont très fortement perturber l'écoulement de l'eau, donc la forme de l'hydrogramme (voir figure 5 et article Mise en charge (HU)) ; il n'existe actuellement pas d'outils opérationnel capable de prendre correctement ces phénomènes en compte.
- L'eau arrivant en surface ne va généralement pas rester sur place, mais s'écouler dans le réseau de surface constitué par les rues et autres espaces urbains ; la détermination des zones réellement inondées impose donc de représenter aussi les écoulements dans ce réseau de surface. Deux solutions sont possibles :
- représenter simplement un réseau de surface (essentiellement composés par les rues) constitué de tronçons de canaux communiquant entre eux et communiquant avec le réseau souterrain et le représenter par un modèle hydraulique 1D (figure 6) ;
- utiliser un MNT pour représenter la surface de la ville et utiliser un modèloe 2D ; ce second mode étant principalement utile lorsque les volumes épanchés en surface deviennent extrêmement importants.
Dans les deux cas il faut également représenter les connexions (dans les deux sens) entre le réseau souterrain et le réseau de surface par des ouvrages spéciaux adaptés (lois de seuil ou d'orifice).
Dans les deux cas la modélisation des écoulements en surface reste cependant très difficile du fait de la grande complexité des interactions et de la variété et de la diversité des obstacles. A titre d'exemple la figure 7 montre l'effet d'un simple giratoire sur la répartition des hauteurs et des vitesses à un carrefour.
Lorsque l'on arrive dans une zone urbaine, les difficultés redeviennent les mêmes que dans le cas des réseaux d'assainissement. Par exemple, ces réseaux communiquent avec le cours d'eau et vont parfois fonctionner à contre sens en permettant à l'eau du cours d'eau de pénétrer dans les zones urbaines malgré la présence des digues (ce qui conduit parfois à installer des clapets anti-retour sur les exutoires des réseaux d'assainissement) (figure 8).
Différents modèles existent pour représenter ce type de phénomène. Tous reposent sur une double modélisation du réseau de surface et du réseau souterrain.