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B.09 - Incertitudes de la courbe de tarage

De Wikhydro

Sommaire

Description de la source d’incertitude

La courbe de tarage (relation entre la hauteur d’eau et le débit en un site déterminé), est principalement construite à partir des jaugeages qui ont été réalisés sur une gamme de hauteurs. Généralement, le nombre de jaugeages est insuffisant ou plus ou moins bien réparti et la courbe de tarage doit être extrapolée à ses extrémités : pour couvrir les besoins de prévision de crues (utilisation des modèles en extrapolation, fiche B.20) et de ressource en eau (étiage).

Un bilan réalisé par le Cemagref (2005) concernant 325 stations du bassin hydrographique Rhône Méditerranée Corse (RMC) a montré que les stations hydrométriques sont relativement bien jaugées jusqu’à une période de retour inférieur à 2 ans, et que seulement 9 % de ces stations disposent de jaugeages au-delà de la crue décennale. Les besoins de prévision de crues vont bien au-delà de ces périodes de retour ; notamment en cas de vigilance rouge.


Quantification de l’incertitude de la courbe de tarage

Partie interpolée de la courbe de tarage

Lors de l’élaboration de la courbe de tarage, la partie de la courbe qui dispose de mesures de débit est tracée en cherchant à répartir le plus équitablement possible les jaugeages en tenant compte de leur incertitude de ± 10 % (fiche B.11) et ainsi obtenir une courbe moyenne.


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Partie extrapolée de la courbe de tarage

Le tracé de la deuxième partie de la courbe (au-dessus du plus haut jaugeage mesuré), implique une bonne connaissance du fonctionnement hydraulique du cours d’eau. Elle résulte d’une extrapolation qui selon les cas tient compte des méthodes : logarithmique, formules d’écoulement (formules de Chézy, de Manning et de Strickler), méthode d’extrapolation de la section mouillée et vitesse moyenne. Parfois, sur les courbes de stations récentes, l’extrapolation a été prolongée simplement avec des méthodes graphiques faute de jaugeage et de modélisation.

  • En régime permanent et uniforme (rivière à géométrie, pente et rugosité régulière)

On peut obtenir le débit en fonction de la hauteur d’eau dans le cas d’un régime permanent et uniforme. La première tentative d’une formule émanait de Chézy : Inc130.bmp où le coefficient traduisait la forme de la section et des parois.

La formule de Manning-Strickler Inc131.bmp est utilisée pour l 'estimation des débits dans des écoulements à surface libre à partir du rayon hydraulique Rh ,de la section mouillée S (surface mouillée évaluée par mesures topographiques), de la pente i de celui-ci et d’un coefficient de rugosité K qui traduit le frottement de l’eau sur le sol dépendant de la nature des matériaux du cours d’eau (appelé coefficient de Strickler).

Une généralisation de la formule de Manning-Strickler se traduit à travers des modélisations hydrauliques avec des logiciels libres comme HEC-RAS et surtout Mascaret (outil conseillé par le SCHAPI). Ces modélisations hydrauliques 1D peuvent prendre en compte également différentes lois de seuils, approche des pertes de charges...

  • Méthode d’extrapolation de la section mouillée et vitesse moyenne

Le débit Inc132.bmp est le produit de la section mouillée S par la vitesse moyenne Vm (extrapolée à partir des couples vitesse moyenne / cote limnimétrique obtenus lors des jaugeages).

L’exercice consiste à traiter en fonction de la hauteur deux courbes distinctes : celle de la surface mouillée qui est connue et qui n’a donc pas d’incertitude, et celle des vitesses (avec incertitude) dont les valeurs extrêmes peuvent être extrapolées. Concernant la courbe des vitesses, elle est construite : d’une part d’après les jaugeages réalisés pour la partie basse et moyenne, et pour la partie haute, par extrapolation en fonction du type de rivière (plaine, montagne, pente faible-forte, …) où des valeurs de vitesses moyennes maximum réalistes sont connus.


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Divers et perspectives

Lors de la validation de la courbe de tarage, le gestionnaire indique les bornes de fiabilité inférieure (cote du jaugeage le plus bas) et de fiabilité supérieure (cote du jaugeage le plus haut augmenté de 20 % avec un maximum de 20 à 30 cm). Cette information donne déjà une indication de l’incertitude des débits calculés en dehors de ces plages. Il peut être indiqué également dans le logiciel BAREME : la cote du seuil considéré comme noyé, et celle du débordement du lit mineur (cette dernière information intéressante pour un SPC indique une incertitude supplémentaire sur les débits calculés au-dessus de cette valeur.

Dans les chantiers en cours, dans le but de disposer des incertitudes lors de l’élaboration de la courbe de tarage, intégration dans le logiciel BAREME de la méthode Baratin (IRSTEA - J.Le Coz et B. Renard) basé sur les approches bayésiennes (fiche C.07) et qui tien compte notamment de l’incertitude des jaugeages et des conditions hydrauliques en fonction des hauteurs.

Sur une courbe de tarage extrapolée dans des conditions plus ou moins rigoureuses, une incertitude de ± 30 % peut-être atteinte dans sa partie la plus haute.

Cas particuliers

Courbe en raquette : il existe sur certains cours d’eau, des courbes de tarage avec hystérésis (courbe en raquette) ; c’est-à-dire une relation hauteur/débit qui varie selon que l’on est en crue ou en décrue. Le phénomène est difficile à prendre en compte, car il faut une série de jaugeages réalisés en montée de crue, et une autre réalisée en décrue pour être sûr de cet effet. Dans la plupart des cas, l’effet raquette maximal est inférieur ou égale à l’incertitude de mesure d’un jaugeage de ±10 %, ou d’une courbe de tarage extrapolée avec une incertitude supérieure à 10 %.

Phénomène d’alluvions : Sur certain cours d’eau (en général connus et répertoriés), à l’occasion des crues, on observe régulièrement un transit sédimentaire. Les matériaux provenant de l’amont vont soit creuser soit combler le lit. Ces alluvions vont « fausser » les débits qui résultent de la courbe de tarage au moment de la crue, en ajoutant ou en enlevant de la hauteur d’eau. Quelques dizaines de centimètres en plus ou en moins peuvent induire quelques dizaines de m3/s en plus ou en moins. Si le phénomène est récurrent, on est dans le cas d’une courbe en raquette.

Il peut arriver au cours d’une crue, du fait d’un transit sédimentaire, qu’un creusement ou un comblement du lit par des matériaux provenant de l’amont puissent « fausser » les débits qui résultent de la courbe de tarage. Si le phénomène est récurrent, on est dans le cas d’une courbe en raquette.

Influence de cette incertitude sur les prévisions de hauteur d'eau /de débit

À noter, le danger d’une courbe de tarage qui n’est pas suffisamment extrapolée : dans certains outils de prévision des crues comme ULYSSE, SOPHIE, une hauteur observée au-delà de la limite supérieure de la courbe, amène à une extrapolation linéaire simple qui peut avoir de graves conséquences opérationnelles.

Exemple. Au cours de la crue d’un niveau orange le 4 mai 2013 sur l’ouche, la courbe de tarage de la station de Crimolois n’était extrapolée qu’à un débit de 175 m3/s dans le logiciel de prévision SOPHIE (Fig. 3). La conséquence pour le prévisionniste a été l’affichage d’un hydrogramme plat alors que les hauteurs continuaient d’augmenter.


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Voir également

Fiche B.11 – Incertitudes de mesure hydrométrique : hauteur / débit lors du jaugeage

Fiche B.20 – Modélisation hydrologique : fonctionnement en extrapolation

Fiche C.07 – Approches bayésiennes

Pour aller plus loin

  • Bechon, P.-M. Logiciel BAREME – Conception et réalisation. DREAL Rhône-Alpes (disponible sur l’extranet SCHAPI (http://extranet.schapi.i2/spip/spip.php?rubrique463).
  • Cemagref (2005). Contrôle de la qualité des courbes de tarage de la banque HYDRO pour les débits de crue. Rapport pour le MEDD
  • Degoutte, G. Aide mémoire d’hydraulique à surface libre. (http://www.agroparistech.fr/coursenligne/hydraulique/degoutte3.pdf et suivants)
  • Goutx, D. et Ladreyt, S. (2000). Guide méthodologique de modélisation filaire des écoulements à surface libre LIDO 2.0. CETMEF
  • Jaccon-Orstom, G. (1986). Manuel d’Hydrométrie Tome V – Tracé de la courbe de tarage et calcul des débits.
  • Le Coz, J. et Renard, B. (2010). Méthode Baratin – IRSTEA
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