Méthodes de dimensionnement des ouvrages de stockage (HU) : Différence entre versions
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− | Cette méthode a été améliorée par Chocat et Cherqui (2018) pour lever en particulier l'hypothèse d'un débit de restitution constant et commençant dès le début de la pluie. Elle ne nécessite en entrée que les valeurs des coefficients <math>a</math> et <math>b</math> d'un ajustement Montana des courbes IDF. On en trouvera une présentation détaillée à l'article [[Méthode des pluies (HU)]]. Le schéma de la ''figure 7'' en rappelle les principes. | + | Cette méthode a été améliorée par Chocat et Cherqui (2018) pour lever en particulier l'hypothèse d'un débit de restitution constant et commençant dès le début de la pluie. Elle ne nécessite en entrée que les valeurs des coefficients <math>a</math> et <math>b</math> d'un [[Montana (formule type) (HU)|ajustement Montana]] des courbes IDF. On en trouvera une présentation détaillée à l'article [[Méthode des pluies (HU)]]. Le schéma de la ''figure 7'' en rappelle les principes dans le cas simple d'un débit de fuite constant commençant au début de la pluie. |
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Le principal inconvénient de cette méthode est lié à l'hypothèse que l'ouvrage est vide au début de la pluie. Comme la durée de vidange est souvent très supérieure à la durée de la pluie dimensionnante (surtout si le débit de restitution est faible), cette hypothèse est souvent fausse et conduit à sous-estimer de façon systématique les volumes nécessaires (voir ''figure 9''). | Le principal inconvénient de cette méthode est lié à l'hypothèse que l'ouvrage est vide au début de la pluie. Comme la durée de vidange est souvent très supérieure à la durée de la pluie dimensionnante (surtout si le débit de restitution est faible), cette hypothèse est souvent fausse et conduit à sous-estimer de façon systématique les volumes nécessaires (voir ''figure 9''). | ||
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Version du 30 décembre 2022 à 17:44
Traduction anglaise : Design méthods for storage facilities
article en chantier
Dernière mise à jour : 30/12/2022
Cet article fait partie de toute une série d'articles traitant des solutions durables de gestion des eaux pluviales urbaines, comprenant en particulier trois articles de portée générale :
- l'article "Solutions de gestion durable des eaux pluviales urbaines (HU)" qui constitue un texte introductif visant à préciser le vocabulaire utilisé dans le domaine de la gestion des eaux pluviales, et tout particulièrement celui que l'on associe à leur gestion durable ;
- l'article "Solution alternative (HU)" qui s'attache à présenter les différentes solutions possibles et la façon de les distinguer et de les choisir ;
- cet article qui a pour objectif de présenter les différentes méthodes de conception des ouvrages hydrauliques de stockage (bassins de retenue et solutions alternatives) et de donner les éléments permettant de choisir la méthode de dimensionnement la mieux adaptée en fonction du problème à traiter.
Sommaire
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L'essentiel
Diversité des contextes
Les ouvrages de stockage peuvent prendre des formes très diverses dans les systèmes d'assainissement et en particulier dans les systèmes de gestion des eaux pluviales urbaines : diversité des aspects, des lieux d'implantation, des volumes concernés et des objectifs poursuivis. Dans tous les cas, leur fonction hydrologique principale est de fournir un volume tampon permettant de stocker l'excédent d'eau lorsque la capacité d'évacuation est inférieure aux entrées.
L'évacuation peut continuer à se faire en totalité dans le système d'assainissement traditionnel, dans ce cas la fonction hydrologique de l'ouvrage est simplement de diminuer les pointes de débit à l'aval et de ralentir les écoulements. A l'opposé, elle peut se faire vers un autre exutoire, le plus souvent le sol par infiltration ; dans ce cas l'ouvrage permet également de diminuer les volumes s'écoulant dans le système d'assainissement. Elle peut aussi se faire en partie vers le réseau d'assainissement et en partie vers un autre exutoire. Dans tous les cas le fait de stocker momentanément l'eau, et donc de diminuer fortement les vitesses d'écoulement, permet une décantation plus ou moins importante et donc un piégeage au moins provisoire des polluants liés aux matières déposées (voir Maîtrise des rejets urbains de temps de pluie (HU)). Ce piégeage des polluants et encore plus efficace si l'eau est infiltrée ou évapotranspirée.
De plus en plus on attribue aux ouvrages des fonctions urbaines et/ou écologiques complémentaires des deux fonctions hydrologiques précédentes (voir Solutions de gestion durable des eaux pluviales urbaines (HU)). Dans certains ces fonctions qualifiées de complémentaires constituent de fait les fonctions principales et ce sont les fonctions hydrologiques qui deviennent les fonctions secondaires. Dans ce cas il n'est alors plus approprié de parler d'ouvrage mais plutôt d'espace à gérer.
Pour bien analyser ces différentes situations, il est possible de distinguer trois modes principaux d'introduction des ouvrages de stockage dans les réseaux :
- le plus à l'amont possible (gestion à la source),
- dans un ouvrage de plus grande taille servant d'exutoire (ouvrage centralisé situé "au bout du tuyau"),
- à l'intérieur du réseau.
Les spécificités de chacun de ces modes sont présentées dans les § suivants.
Gestion à la source
La gestion à la source consiste à mettre en place des solutions de gestion de l'eau de pluie au plus près de l'endroit où les gouttes atteignent le sol. Les solutions possibles sont extrêmement variées : stockage en surface, noues, tranchées, revêtements perméables, toitures stockantes et/ou végétalisées, etc. (voir Solution alternative (HU)). La difficulté principale consiste à intégrer la solution dans l'aménagement. En effet, dans la plupart des cas il ne s'agit pas d'ouvrages dédiés mais d'espaces adaptés pour remplir leur fonction de stockage provisoire des eaux pluviales en plus de leur fonction urbaine principale. Les problèmes posés par leur conception vont donc bien au delà de leur simple dimensionnement hydrologique : le choix de la nature, de la position et de l'aspect des solutions doit être effectué en lien avec le travail sur le plan masse et la topographie (figure 1). Les solutions doivent cependant être correctement dimensionnées pour éviter des dysfonctionnements ultérieurs susceptibles de nuire à leur acceptation, et donc à leur entretien correct, par les riverains.

Ouvrage centralisé (au bout du tuyau)
Les ouvrages centralisés ont été les premiers mis en place lors du retour en grâce des techniques alternatives dans la deuxième moitié du XXème siècle. Dans la plupart des cas il s'est agi de grands bassins de retenue, parfois au moins partiellement en eau, et construits à l'exutoire de bassins versants de plusieurs centaines, voire plusieurs milliers d'hectares, drainés par un réseau strictement pluvial. Leur exutoire était alors le sol et la nappe phréatique (cas des grands bassins d'infiltration de la Métropole de Lyon) ou de petits cours d'eau existant avec un débit de vidange régulé (bassins de retenue de Marne la Vallée ou de l'Isle-d'Abeau). Cette solution constitue également depuis près d'un demi-siècle la solution de base pour gérer les eaux de ruissellement des plates-formes routières et autoroutières avec probablement des milliers de réalisations rien que sur le territoire métropolitain. De tels ouvrages continuent d'être construits dans le cadre d'aménagements urbains, avec des exigences de plus en plus sévères concernant leur intégration paysagère, voire la réflexion sur les usages multiples des espaces mobilisés. Du fait de leur fonction et de leur position, ces ouvrages doivent être capables de faire face à toutes les sollicitations pluvieuses, y compris les plus sévères (figure 2).

Ouvrage de stockage en réseau
Les ouvrages de stockage en réseau ont été imaginés pour soulager les parties aval des réseaux et diminuer ainsi la fréquence et la gravité des inondations dus à leurs débordements. Ultérieurement d'autres objectifs sont apparus, en particulier la volonté de limiter la fréquence et l'importance des rejets de temps de pluie par les déversoirs d'orage. Selon le cas l'ouvrage doit être capable de faire face à des sollicitations plus ou moins sévères. La difficulté principale de réalisation de ce type d'ouvrage consiste à trouver l'espace nécessaire dans un milieu urbain extrêmement contraint. Beaucoup de ces ouvrages sont ainsi des bassins enterrés, aux dimensions parfois gigantesques (figure 3). Les contraintes principales sont le coût et les modalités d'exploitation. Le problème n'est pas tant le dimensionnement pour atteindre un objectif que l'optimisation de l'espace disponible.
Diversité des objectifs du dimensionnement
Principes de base
Parler de dimensionnement pour un ouvrage de stockage signifie que l'on fait référence à une fonction technique dont la qualité de réalisation dépend des dimensions qui lui sont attribuées. Le terme regroupe cependant des sens assez différents selon les acteurs et les moments de l'étude. Il peut s'agir :
- d'un dimensionnement strictement hydrologique consistant principalement à fixer le débit de fuite et le volume maximum, cette approche peut être suffisante au moment des phases préliminaires de l'étude ;
- d'un dimensionnement au sens strict visant à déterminer les dimensions géométriques de l'ouvrage : surface, longueur, largeur, profondeur, cette étape est nécessaire car le débit de fuite et le volume à stocker dépendent souvent des dimensions géométriques de l'ouvrage ;
- d'une étape de conception plus avancée où l'on s'attache à positionner l'ouvrage dans l'espace en respectant les dimensions précédentes, mais également le plan masse de l'aménagement et la topographie.
Diversité des objectifs
Les fonctions techniques de nature hydrologique pour lesquelles on dimensionne une solution sont au nombre de deux :
- dimensionnement en vue de contrôler les débits s'évacuant vers l'aval ;
- dimensionnement en vie de contrôler les flux de polluants.
Par ailleurs, selon la nature des ouvrages, d'autres aspects peuvent nécessiter soit un dimensionnement au sens strict, soit la vérification de contraintes nécessaires à l'atteinte des autres objectifs que l'on peut avoir. Par exemple :
- dimensionnement mécanique dans le cas d'une chaussée à structure réservoir (figure 4) ;
- conception adéquate (sécurité des personnes, qualité biologique et esthétique du milieu, etc.) dans le cas d'un ouvrage totalement ou partiellement en eau ;
- calcul de la quantité d'eau à stocker en fonction des usages dans le cas d'une récup-utilisation de l'eau de pluie ;
- etc.
Seules les deux fonctions de nature hydrologique sont traitées dans la suite de cet article.
Niveau de service à atteindre en fonction de la sévérité de la sollicitation pluvieuse
Le dimensionnement hydrologique doit être effectué de façon à rendre le service attendu pour tous les types de sollicitations pluvieuses. Ceci s'applique bien évidemment au niveau de sévérité de la sollicitation (figure 5), mais également à sa nature : saison, durée, répartition des intensités, etc.
Dimensionner un ouvrage uniquement pour un type de sollicitation répondant à un niveau de sévérité donné (par exemple calcul du volume de stockage nécessaire pour faire face à un événement de fréquence décennale) est donc insuffisant et il est nécessaire d'étudier de façon plus précise comment l'aménagement de comportera pour différents types de sollicitation.
Dimensionnement hydraulique
Ce type de dimensionnement est le plus fréquemment mis en œuvre car il correspond à la fonction historique ayant conditionné le dimensionnement des ouvrages de gestion des eaux pluviales. Il vise à dimensionner l'ouvrage dans le but de diminuer la fréquence et l'importance des inondations. Cet objectif se décompose en deux sous-objectifs complémentaires :
- un objectif local consistant à concevoir l'ouvrage de façon à limiter les conséquences d'un sous-dimensionnement en termes de débordement ; ce sous-objectif peut se formuler par les questions suivantes :
- quel volume donner à l'ouvrage, en lien avec son débit de restitution, pour éviter qu'il ne déborde pour une sollicitation pluvieuse dont la sévérité est plus faible que celle choisie comme référence ?
- comment gérer le volume excédentaire produit par des sollicitations pluvieuses plus sévères que celle choisie comme référence de façon à éviter des conséquences graves en termes économiques et surtout humains ?
- un objectif global consistant à concevoir l'ouvrage de façon à mieux maîtriser les risques d'inondation à son aval ; ce sous-objectif peut se formuler par les questions suivantes :
- Quelle sévérité de sollicitation pluvieuse doit-on choisir pour dimensionner l'ouvrage ?
- Quel débit de fuite est-il acceptable pour l'aval en fonctionnement normal (pour les sollicitations pluvieuses plus faibles que la sollicitation de référence) ?
- Comment protéger l'aval des flux excédentaires en cas de sollicitations pluvieuses plus sévères que celle choisie comme référence ?
Selon les cas l'ouvrage peut être mis en place pour répondre principalement à l'un ou l'autre de ces sous-objectifs. Il arrive également souvent que le sous-objectif associé à la protection de l'aval soit pris en compte, de façon plus ou moins adroite, par la réglementation.
Dimensionnement en termes d'interception des polluants
La fonction de piégeage des polluants est également de plus en plus souvent prise en compte car les rejets urbains de temps de pluie jouent un rôle important dans la dégradation de la qualité des milieux aquatiques de surface. Les conséquences de ces rejets sont cependant très différentes selon les milieux (voir Impact (des rejets urbains sur les milieux aquatiques) (HU)). De ce fait les indicateurs à réduire peuvent également être très différents, en nature (matière organique, MES, métaux, pathogènes, micropolluants, etc.), mais également en forme (masse annuelle totale, fréquence des apports, masse apportée par un événement critique, etc.).
De plus il existe souvent une confusion entre la pollution piégée dans l'ouvrage et la pollution évitée. Par exemple l'eau et les polluants qu'elle contient qui seront interceptés par un bassin d'orage seront le plus souvent restitués intégralement au réseau à la fin de l'événement pluvieux. La pollution piégée sera donc nulle. En revanche la pollution évitée pourra être importante si le stockage provisoire permet d'éviter des rejets par les déversoirs d'orage en conduisant plus de flux vers la station d'épuration. A l'inverse, une pollution piégée dans un ouvrage jouant un rôle de décantation peut être renvoyée ultérieurement au milieu récepteur si les dépôts ne sont pas correctement gérés.
Il est à noter que certains ouvrages peuvent jouer un rôle différent selon que l'on s'intéresse à la pollution piégée ou aux rejets évités. Par exemple un ouvrage d'infiltration à la source installé dans le cadre d'une opération de déconnexion des surfaces aménagées va piéger localement les polluants contenus dans l'eau pluviale qu'il reçoit mais va peut-être également éviter des rejets par les déversoirs d'orage situés à l'aval du fait du volume intercepté.
L'objectif de piégeage des polluants conduit donc à se poser les questions suivantes :
- Quelles sont les polluants prioritaires à contrôler ?
- Quel est le critère déterminant à prendre en compte (diminution de la masse annuelle totale rejetée, diminution du nombre de rejets, suppression du rejet (ou pourcentage de diminution de la masse rejetée) pour un événement de fréquence donnée, etc.) ?
- Comment évalue-t-on ce critère (en termes d'interception ou en termes de rejet) ?
Les critères de dimensionnement seront donc différents selon le type d'ouvrage et le contexte et, comme pour les critères de dimensionnement hydraulique, ils seront le plus souvent contraints par la réglementation.
Contraintes réglementaires possibles et liens avec les critères de dimensionnement
Les réglementations concernant la gestion des eaux pluviales ont pu être écrites dans un but de lutte contre les inondations et/ou de diminution des rejets polluants. Chocat et al. (2022b) ont recensé 4 familles principales de règles possibles :
- Type 1 : Zéro rejet : Obligation de conserver sur la surface de l'opération d’aménagement la totalité des volumes d'eau produits par toutes les pluies tant que la période de retour est inférieure à une valeur donnée ;
- Type 2 : Débit de fuite imposé : Possibilité de rejeter la totalité des volumes d'eau produits par toutes les pluies (tant que la période de retour est inférieure à une valeur donnée) à condition que le débit de rejet ne dépasse pas une valeur de référence exprimée en valeur absolue (m3/h) ou en valeur spécifique (m3/h/ha) ;
- Type 3 : Abattement volumique : Obligation de conserver sur la surface de l'opération d’aménagement la totalité des volumes d'eau produits par toutes les pluies pour lesquelles la hauteur totale précipitée est inférieure à p mm (ainsi que le volume produit par les p premiers mm pour les pluies plus importantes) ; aucune contrainte sur le débit maximum de rejet ;
- Type 4 : Double vidange : Obligation de conserver sur la surface de l'opération d’aménagement la totalité des volumes d'eau produits par toutes les pluies pour lesquelles la hauteur totale précipitée est inférieure à p mm (ainsi que le volume produit par les p premiers mm pour les pluies plus importantes) ; possibilité de rejeter le volume excédentaire à condition que le débit de rejet ne dépasse pas une valeur de référence exprimée en valeur absolue (m3/h) ou en valeur spécifique (m3/h/ha).
Ces contraintes réglementaires conditionnent de façon différente la conception des ouvrages :
- les règles de type 2 sont essentiellement destinées à diminuer les risques d'inondation à l'aval et éventuellement les rejets par les déversoirs d'orage ; elles imposent le débit de fuite (le débit de restitution total peut cependant être supérieur, par exemple dans le cas d'un ouvrage infiltrant) mais n'imposent rien en terme d'interception de polluants ;
- à l'opposé les règles de type 3 ne jouent (presque) aucun rôle en terme de diminution des débits à l'aval ou de diminution des masses de polluants rejetés pour les événements forts ; en revanche elles permettent de diminuer la masse annuelle rejetée et éventuellement la fréquence des rejets.
- les règles de type 4, et surtout de type 1 jouent un rôle positif pour tous les objectifs mais sont également celles qui contraignent le plus le dimensionnement des ouvrages.
Données à connaître
Coefficient d'apport et surface active
Pour le dimensionnement des ouvrages de stockage on se préoccupe principalement du rapport entre le volume d'eau à stocker et le volume d'eau précipitée que l'on appelle coefficient d'apport. Le produit de ce coefficient d'apport par la surface totale des zones susceptible de contribuer au remplissage de l'ouvrage constitue la surface active.
Le coefficient d'apport est très loin d'être constant et dépend de multiples paramètres : saison, pluviométrie antécédente, hauteur totale précipitée, valeurs des intensités de pluie, etc. En l'absence de mesures il est cependant nécessaire d'estimer le coefficient d'apport en fonction des caractéristiques du bassin versant. Les pluies les plus pénalisantes pour les ouvrages de stockage-infiltration (même à l'exutoire de petits bassins versants) sont généralement des pluies longues et peu intenses (la durée de pluie la plus pénalisante dépend du débit spécifique de restitution et non du temps de concentration). Pour évaluer un ordre de grandeur il est possible d'utiliser les règles suivantes :
- une partie de la pluie précipitée sur les surfaces imperméables de voirie connectées à l'ouvrage peut s'infiltrer (en fonction de l'état du revêtement, on estime que la capacité d'infiltration des surfaces de voirie est comprise entre 0,3mm/h et 3mm/h) ; il est cependant conseillé de prendre un coefficient d'apport de 1 pour ces surfaces ;
- selon la pente et la capacité d'infiltration du sol de surface, les surfaces non revêtues (même végétalisées) peuvent contribuer significativement à l'alimentation de l'ouvrage (voir la figure 6) ;
- dans tous les cas il est nécessaire de prendre en compte la surface de l'ouvrage lui-même (sauf dans le cas d'un ouvrage souterrain situé sous une surface imperméable) avec un coefficient d'apport de 1.
Dans le cas d'une gestion des eaux pluviales à la source la notion de coefficient d'apport perd l'essentiel de son sens et peut conduire à des raisonnement erronés. On s’intéresse en effet à ce qui se passe à l’intérieur de la zone aménagée et non à ce qui en sort. Il n'y a par exemple plus de différence évidente entre les surfaces d'apport et les espaces utilisés pour stocker l'eau (une toiture stockante ou une chaussée à structure réservoir ont par exemple les deux statuts). Le meilleur raisonnement consiste donc à se demander quel est le devenir de toutes les gouttes d'eau qui vont être reçues sur la zone aménagée, ceci pour les différents types de précipitation.
Capacité d'infiltration
Les ouvrages de stockage, et en particulier les ouvrages de stockage à la source, utilisent, au moins en partie, l’infiltration pour restituer l’eau de pluie au milieu naturel. La capacité d’infiltration des sols constitue alors le paramètre le plus important pour le dimensionnement correct des ouvrages. Comme ce paramètre est susceptible de varier beaucoup d’un point à un autre (parfois d'une puissance de 10, voir figure 7), particulièrement en zone urbaine, des mesures locales sont indispensables.
Pour que la valeur retenue soit la plus représentative possible, 3 choix doivent être effectués : le type d’essai à mettre en œuvre, le nombre et la position des essais, l’interprétation des mesures. Ces choix doivent être faits en fonction des enjeux (importance du projet), de la connaissance a priori que l’on possède de l’ouvrage à construire (surface, position, profondeur) et du moment auquel les essais sont effectués (depuis l’étude préalable, pour étudier la faisabilité et potentialités du site, jusqu’au projet détaillé, pour affiner le dimensionnement des ouvrages). Dans les projets les plus complexes, une étude préalable du sol visant à établir son profil pédologique peut être nécessaire. L'article Capacité d’infiltration (HU) donnent quelques informations sur la façon de faire ces choix.
Données pluviométriques et climatiques
La pluie constitue la cause qui initie les écoulements et donc qui justifie la construction de l'ouvrage. Sa représentation correcte est donc essentielle à son bon dimensionnement.
Selon le choix effectué, qui dépend du modèle hydrologique utilisé, les données nécessaires peuvent être plus ou moins importantes : depuis les coefficients a et b d'un ajustement de Montana dans le cas de l'utilisation des courbes intensité-durée-fréquence par exemple par la méthode des pluies, jusqu'à des séries chronologiques complètes de longue durée représentant la pluie dans ses dimensions spatiales et temporelles (utilisation de données au sol en lien avec des données radar) et l'évapotranspiration dans le cas de l'utilisation d'une méthode de simulation. Ces données peuvent également être scénarisées pour représenter différents scénarios d'évolution climatique.
En France, toutes ces données peuvent être achetées à Météo-France ou, pour de nombreuses grosses collectivités acquises directement sur le site.
Espace disponible et objectifs d'implantation
La dernière information importante consiste à décider de l'endroit où sera implanté l'ouvrage. Si cette information est souvent imposée par le foncier disponible dans le cas des ouvrages centralisés ou installés dans le réseau, ce n'est pas le cas des ouvrages à la source. En effet, dans ce cas, tous les espaces sont potentiellement utilisables selon la solution retenue. Le choix de la nature de la solution ainsi que la surface qu'elle va occuper doit donc être effectué au moment de la conception du plan masse de l'opération. Ce choix sera déterminant pour la suite du dimensionnement. Il faut en effet bien comprendre que, en particulier dans le cas d'un ouvrage infiltrant, la surface de l'ouvrage conditionne la surface d'apport, la surface d'infiltration (donc le débit de restitution) et bien évidemment le volume de stockage disponible.
Éléments de conception des ouvrages
Grandeurs à déterminer vis à vis du fonctionnement hydrologique
Différents dispositifs de restitution : infiltration, évapotranspiration, dispositifs à débit limité, dispositifs hydrauliques. Différentes grandeurs à déterminer : Volume total et volume de réserve, débit de restitution, durée en eau et temps de vidange, position systèmes de vidange, ... ; Liens avec les dimensions géométriques ; obligation de déterminer toutes les grandeurs en même temps.
Méthodes utilisables et critères de choix de la méthode
Utilisation de statistiques de pluie
L'utilisation de statistiques de pluie est une méthode qui ne s'applique qu'au dimensionnement des ouvrages destinés à intercepter les volumes produits par les p premiers mm de pluie. Connaissant le nombre moyen annuel de pluies pour lesquelles la hauteur précipitée est supérieure à 1, 2, 3, ..., n mm (donnée disponible auprès de météo-France), il est possible par des calculs très simples et avec l'hypothèse (très forte et peu réaliste) d'un coefficient d'apport constant, de déterminer le volume nécessaire :
- pour intercepter tous les événements inférieurs à un seuil donné ; ou,
- pour intercepter un pourcentage donné du volume annuel.
Cette méthode peut être améliorée en faisant varier le coefficient d'apport, ce qui nécessite quelques calculs supplémentaires (voir par exemple l'outil OASIS).
Méthode des pluies
La méthode des pluies est une méthode très simple qui repose sur plusieurs hypothèses, en particulier :
- les pluies sont de type bloc (pluies d'intensité constante) ;
- l'ouvrage est totalement vide au début de la pluie ;
- le coefficient d'apport est indépendant de la durée de la pluie.
Cette méthode a été améliorée par Chocat et Cherqui (2018) pour lever en particulier l'hypothèse d'un débit de restitution constant et commençant dès le début de la pluie. Elle ne nécessite en entrée que les valeurs des coefficients $ a $ et $ b $ d'un ajustement Montana des courbes IDF. On en trouvera une présentation détaillée à l'article Méthode des pluies (HU). Le schéma de la figure 7 en rappelle les principes dans le cas simple d'un débit de fuite constant commençant au début de la pluie.
Le principal inconvénient de cette méthode est lié à l'hypothèse que l'ouvrage est vide au début de la pluie. Comme la durée de vidange est souvent très supérieure à la durée de la pluie dimensionnante (surtout si le débit de restitution est faible), cette hypothèse est souvent fausse et conduit à sous-estimer de façon systématique les volumes nécessaires (voir figure 9).
Elle présente en revanche l'avantage d'être très robuste et de permettre le calcul direct de toutes les grandeurs.
Méthode des volumes
Méthodes de simulation hydrologique
Critères de choix
Méthodes de conception et/ou méthodes de vérification et/ou méthode d'aide à la conception géométrique Tableau d'aide au choix en fonction de la nature du problème, des enjeux et la phase d'étude.
Autres éléments de conception à prendre en compte
Outils disponibles
Méthodes de conception et/ou méthodes de vérification et/ou méthode d'aide à la conception géométrique Tableau d'aide au choix en fonction de la nature du problème, des enjeux et la phase d'étude. Renvoi vers les outils gratuits d'aide au choix et d'aide à la conception : FAVEUR, OASIS, PARAPLUIE, URBIS : présentation domaine d'application et modalités utilisation.
Bibliographie :
- ASTEE (2017) : Memento technique : Conception et dimensionnement des systèmes de gestion des eaux pluviales et de collecte des eaux usées ; 273p.
- Bachoc, A., Gandouin, C., Kovacs, Y., Maytraud, T., Morin-Batut, C., Pierlot, D., Roche, P.-A., Savary, P. (2022) : Mieux penser les eaux débordantes et ruisselantes en surface dans l’espace urbain , TSM n°5, mai 2022, p.7 à 13.
- CERTU (2003) : La ville et son assainissement : Principes, méthodes et outils pour une meilleure intégration dans le cycle de l'eau ; disponible sur https://www.grand-est.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/la_ville_et_son_assainissement_certu_2006_-2.pdf
- Chocat, B. ; Cherqui, F. (2018) : La méthode des pluies revisitée ; TSM N°11 ; Page(s) 49-59.
- Chocat, B., Cherqui, F., Afrit, B., Barjot, G., Boumadhi, M., Breil, P., Célérier, J.L., Chebbo, G., De Gouvello, B., Deutsch, J.C., Gromaire, M.C., Hérin, J.J., Jairy, A., Maytraud, T., Paupardin, J., Pierlot, D., Rpdriguez, F., Sandoval, S., tabuchi, J.P., Werey, C. (2022a) : Contribution à une meilleure explicitation du vocabulaire dans le domaine des solutions dites « alternatives » de gestion des eaux pluviales urbaines ; TSM n°5 2022 ; pp 103
- Chocat, B., Afrit, B., Maytraud, T., Savary, P., Tedoldi, D. (2022b) : Comment mettre en place des règles hydrologiques efficaces pour la gestion durable des eaux pluviales urbaines ; TSM n°10 ; octobre 2022 ; pp.39-62.
- Desbordes, M. (1975) : Quelques méthodes de calcul des bassins de retenue des eaux pluviales ; Tribune du CEBEDEAU, n° 377, pp. 168-174.
- EC.eau (2017) : Adaptation de la Méthode des Volumes à la pluviométrie rennaise ; étude menée pour Rennes Métropole / Pôle Ingénierie et Services Publics ; Rapport de phase 3 ; 14p.
- Flanagan, K., Barraud, S., Gromaire, M.-C., Rodriguez, F. (2022) : Guide méthodologique pour l’évaluation de performances des ouvrages de maîtrise à la source des eaux pluviales, Office français de la biodiversité (OFB), septembre, 164 p. https://professionnels.ofb.fr/fr/node/1252
- Ministères (1977) : Ministère de la culture et de l'environnement, Ministère de l'équipement et de l'aménagement du territoire, Ministère de l'agriculture, Ministère de la santé et de la sécurité sociale ; Instruction technique relative aux réseaux d'assainissement des agglomérations ; IT 77 284 INT ; Imprimerie nationale ; Paris ; 62 p + annexes ; 1977.
- Roche, P.-A., Velluet, R., Aujollet, Y., Helary, J.L., Le Nouveau, N. (2017) : Gestion des eaux pluviales : 10 ans pour relever le défi ; Rapport Technique Conseil Générale de l’Environnement et du Développement Durable (CGEDD) ; disponible sur : https://cgedd.documentation.developpement-durable.gouv.fr/documents/Affaires-0008967/010159-01_rapport-publie_tome1_synthese_diagnostic-propositions.pdf;jsessionid=68117E81D8E689F3BF6A01719FF00537